Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

22 décembre 2005

Meilleurs voeux

Nous avons tous bien besoin de faire une pause.
Je vous souhaite de passer de bonnes fêtes de fin d'année.
Rendez vous début 2006

15 décembre 2005

Manuel Valls destabilise les nouveaux identitaires

Il fallait être sacrement bien réveillé pour relever ce moment (rare) de vérité télévisuelle. Cela se passait hier, et d'ailleurs fort tard, dans "Culture et dépendances" sur France 3
Giesbert a raison d'inviter Tariq Ramadan. Depuis ses explications confuses sur la lapidation des femmes, il semble que les bien-pensants préfèrent soulever le tapis. Or il n'y a rien de pire que de paraître victimiser Ramadan. Il a à ses côtés l'ineffable Claude Ribbe, auteur du "Crime de Napoléon". face à eux, notamment, Manuel Valls, le député maire socialiste d'Evry, péchu, survolté presque, jamais aussi bon que dans l'adversité. Ramadan le bombarde: "Vous ne connaissez pas votre pays", "Vous êtes l'élite." "Vous incarnez la
classe politique". Sous entendu, même s'il ne le dit pas ainsi : "vous êtes déconnectés, comme tous les privilégiés blancs européens et judéo chrétiens qui maintiennent les derniers arrivés dans leur statut d'anciens colonisés." Ramadan voudrait que tout le monde reste dans sa petite case. l'homme politique dans son élite, dans sa France qu'il exècre et le jeune de banlieue dans sa mosquée. Bien. Valls proteste: "Je ne sais pas ce que c'est la classe politique, moi je suis un élu et j'habite en banlieue. Vous ne la représentez pas moi si. Alors pas de leçon" Et plus tard: "Vous êtes le porte parole des Frères Musulmans."
Mais le plus révélateur était ceci. Ribbe écoute tout cela, chafouin. De temps en temps il en balance une sur Napoléon. Max Gallo est au bord de l'autocritique: "Peut-être n'ai-je pas assez parlé de l'esclavage." Puis la fougue de son voisin Ramadan lui inspire cette réflexion, destinée à Valls: "Vous êtes peut-être élu, mais vous êtes le pays légal, pas le pays réel..." Valls, qui connaît ses classiques relève que c'est, mot pour mot le credo de Charles Maurras, il y a un siècle. Ribbe a compris sa bévue et doit protester qu'il "n'est pas Maurassien." "C'est quand même intéressant." persiste Valls qui jubile intérieurement (il s'extériorise rarement). Qui d'autre, à cette heure tardive aura compris ceci: Les héritiers de la pensée réactionnaire, communautaire, antirépublicaine et identitaire de l'Action Française étaient ce soir là face à Valls

05 décembre 2005

Bravo au petit lieutenant


Parenthèse cinéma: J'ai rarement ressenti pareil enthousiasme, une telle empathie pour des personnages de fiction, surtout devant une production française, que devant le "Petit Lieutenant", de l'excellent Xavier Beauvois. C'est certainement l'un des meilleurs films de l'année. Beauvois est aussi poignant dans le drame que dans le "docu", et quelle direction d'acteurs! Nathalie Baye est au top, émouvante et belle. Mention spéciale pour Roshdy Zem, à mes yeux le meilleur acteur français du moment (avec Magimel, autre fétiche de Beauvois.)

La thèse du declin

Il me semble que réagir aux difficultés que traverse la France, c'est faire mentir ce pronostic de déclin qu'expose ici Yves Laulan. Pourvu qu'il se trompe. Malheureusement j'en doute

Rocard toujours lucide

Il y a au moins encore un homme lucide au PS, c'est Michel Rocard. Comment ne pas partager son pessimisme?

02 décembre 2005

Austerlitz aux oubliettes!


Je n'ai pas une passion forcenée pour le personnage de Napoléon. Je n'ai pas envie de me lancer ici dans un énième exposé des mérites et des tares de l'empire. Il y a eu des milliers de pages écrites là-dessus et par beaucoup plus compétent que moi. Je m'en fous un peu, comme dirait Houellebecq, nouveau réac désigné par le nouvel obs.
Mais on lit sur les forum internet des torrents d'insanités sur Napoléon, accusé pêle-mêle- comme ici-d'être un précurseur de Hitler, le véritable inventeur de camps de concentration, j'en passe pour arriver, bien sûr, au noeud de la présente controverse: L'empereur a rétabli l'esclavage aux Antilles pour les beaux yeux de Joséphine. C'est le point central du livre de Claude Ribbe, "le Crime de Napoléon" (éditions Privé). On oublie gaiement que Napoléon (ou Bonaparte je ne sais plus lequel) avait auparavant aboli la traite. Mais on n'est plus à ça près.
Ce qui est grave ce n'est pas seulement le déchaînement crétin qui voudrait réduire l'oeuvre de Napoléon à cette seule décision (qui n'est pas un "détail"), c'est que cette campagne a intimidé notre président, notre premier ministre (pourtant grand admirateur de l'homme des cents jours) et même notre Sarko ( au demeurant, lui aussi un "nouveau réac" au sens nouvel obs) au point qu'aucun n'ose se montrer aujourd'hui pour le bicentenaire d'Austerlitz.
Austerlitz, c'est quand même l'histoire de France non? Et ne dites pas que vous n'aimez pas les batailles et la guerre. Moi j'ai répété "Nos ancêtres les Gaulois", comme tous mes camarades de primaire, alors que je puis vous assurer qu'aucun ne l'était, et je le savais déjà! Mais c'était à ce prix là qu'on, fabriquait des petits Français.
Après Jeanne d'Arc, voici les belles âmes, les hérauts des droits de l'homme, prêts à abandonner Napoléon et Austerlitz à Le Pen qui, dit-on caracole déjà dans les sondages non publiés. Continuez braves gens et vous aurez encore des désillusions en 2007...
Nous étions, nous Français chevaleresques, de la fête il y a quelques mois, en Angleterre, pour les 200 ans de Trafalgar. Pensez, on avait même envoyé le "Charles de Gaulle" qui ne fait plus la guerre.
Finkielkraut a bien raison: Un pays qui célèbre ses défaites mais pas ses victoires est un pays qui ne s'aime pas. Comment voulez-vous qu'on l'aime?

29 novembre 2005

L'intox de Villepin sur CNN


"Corriger l'image de la France" est légitime. Encore faut-il se garder de traversir la réalité:

PARIS (AFP) - Alors que les violences dans les banlieues ont rencontré un large écho, notamment aux Etats-Unis où certains médias ont évoqué une France à feu et à sang, Dominique de Villepin a tenté de corriger cette image en livrant mardi son analyse de la situation sur CNN International.
Dans un entretien accordé en anglais dans un salon de l'Hôtel Matignon à la journaliste vedette Christiane Amanpour, le Premier ministre a d'abord déclaré
qu'il préférait parler de "graves troubles sociaux" plutôt que d'"émeutes" pour qualifier cette crise.

"Je ne suis pas sûr que nous puissions parler d'émeutes. C'est très différent de la situation que vous avez connue en 1992 à Los Angeles par exemple. Vous aviez eu à l'époque 54 personnes tuées et 2.000 blessées. En France, pendant ces deux semaines de troubles,
personne n'est mort", a-t-il souligné.

Parmi les causes de ces violences, le Premier ministre a mis en avant "le sentiment de discrimination", soulignant que les personnes impliquées dans les affrontements étaient "très souvent" des jeunes "issus de la deuxième génération d'immigration qui ne connaissent pas leur pays d'origine" et qui souffrent d'une "sorte d'absence d'identité".

Il a réaffirmé, comme il l'avait fait à plusieurs reprises ces derniers temps,
qu'il n'y avait pas de "dimension ethnique ou religieuse" à cette crise "contrairement à ce que nous connaissons dans d'autres parties du monde".

"Ce qui est intéressant, c'est que la plupart de ces jeunes veulent être Français à 100%. Ils réclament une égalité des chances. Notre objectif est donc maintenant de répondre à leurs exigences et de nous fixer comme priorité (des efforts supplémentaires en matière) de logement, d'éducation et d'emploi", a ajouté M. de Villepin.

"Ces jeunes ne veulent pas être reconnus comme musulmans, noirs ou comme des gens issus d'Afrique du Nord, mais comme des Français", a-t-il affirmé.

Rappelant qu'il est opposé au concept de discrimination positive -"l'affirmative action" américaine-, "dont le but est avant tout de prendre en compte la race ou la
religion ", Dominique de Villepin privilégie une aide spécifique aux "territoires qui connaissent des difficultés, en termes d'éducation par exemple".

Plusieurs ministres avaient déjà tenté, auprès de la presse étrangère, de redorer l'image de la France dans les médias internationaux, alors que les professionnels du tourisme commençaient à s'inquiéter d'éventuelles retombées négatives.

Le porte-parole du gouvernement Jean-François Copé avait ainsi invité les journalistes étrangers à "ramener ces incidents à leur juste proportion" et dénoncé "les caricatures qui n'ont pas lieu d'être". Une initiative parfois mal vécue par les intéressés, qui y avaient vu une forme de pression.

Sur CNN, M. de Villepin -qui s'était fait connaître de la communauté internationale en février 2003 en incarnant, à la tribune de l'ONU, le refus de l'intervention militaire américaine en
Irak - a réaffirmé que la France "savait dès le début qu'il était très facile de partir en guerre mais qu'il serait très difficile de sortir d'Irak".

Se gardant de critiquer Washington, il a recommandé la plus grande prudence dans le déroulement du retrait des forces américaines d'Irak: "je pense que le calendrier doit être un calendrier global. Le vrai calendrier sera dicté par la situation irakienne".

La famille du retraité de Stains, battu à mort, celle du père de famille roué de coup à Epinay sur seine, qui a connu le même sort, apprécieront la sortie de Villepin, qui par ailleurs a déjà oublié que, ce week end s'est constitué un "Conseil Representatif des Associations Noires".
Enfin, on sera rassuré de constater que, malgré ses difficultés domestiques, la France avait tout vu, tout prévu, en Irak

Faut-il pénaliser le rap?


L'idée de certains députés et sénateurs de poursuivre en justice les rappeurs dont les textes peuvent constituer des appels à la violence anti française n'est même pas une fausse bonne idée, c'est une vraie une mauvaise idée.
Il ne fait pas de doute que les textes de certaines chansons-je ne vais pas les rappeler ici-sont outrancières, sexistes, racistes, antisémites, appellent à la violence parfois de façon extrêmement...prosaïques contre la police. Ont-ils pour autant servi de détonateurs aux émeutes? Et si, au contraire ils avaient servi d' exutoire aux passions des banlieues? Ces chanteurs ont un grand sens du marketing et de la promotion. ils connaissent parfaitement les instincts de leur cible commerciale et, comme d'autres, ils lui font entendre ce que les auditeurs et consommateurs de disques veulent entendre et sont prêts à acheter. Bref dans cette affaire, Besancenot s'est fait le VRP de Sony Music, comme l'explique le rhéteur.
Outre le fait que, comme le rappelle Bertrand Dicale dans le Figaro de vendredi, nombre de grands chanteurs français (Brassens) ont signé des paroles passant pour subversives, il est probable qu'interdire ou exercer la moindre censure sur le rap aurait sans doute l'inverse de l'effet recherché. Il mobiliserait les "jeunes" contre ce qu'ils dénonceraient aussitôt comme une atteinte à la liberté d'expression.
Ce qui compte ce sont les conditions du passage à l'acte et aucune chanson n'a jamais, à elle seule, fait descendre personne dans la rue. Ce sont peut-être des hymnes à un moment donné et elles ont le mérite de nous édifier sur ce qui suscite l'adhésion dans les cités reléguées de la République. Encore faut-il ne pas se voiler la face ou faire la sourde oreille.
PS: Si j'avais un peu plus de temps, je classerais dans le bêtisier républicain l'amendement Léonetti sur "les aspects positifs de la colonisation". On a le droit de le penser, d'en discuter et aussi de combattre cette idée. Mais l'inscrire dans une loi? L'imposer comme évangile pour tous? Une manie française de légiférer sur tout. L'assemblée a là une occasion de réparer cette boulette, et le PS -qui propose l'abrogation du texte voté dans un hémicycle désert en février dernier- a fait preuve d'un bel opportunisme, comme on dit au foot.

24 novembre 2005

L'antiracisme est-il le communisme du 21ème siècle?


En allant à RTL ce soir, je me doutais bien que je passerai un mauvais moment. Il y a des circonstances dans lesquelles il faut assumer. On allait y parler de l'interview d'Alain Finkielkraut au journal israélien Haaretz. Piqué par les extraits qu'en a sorti Sylvain Cypel dans le Monde, et averti de l'inimitié qu'il éprouve pour Finkielkraut j'avais pris la précaution de lire l'intégralité de l'interview sur le site du journal (en anglais), ce que je recommande à tous ceux qui lisent l'anglais.
Je le dis tout net je n'aime pas le ton de l'interview et je préfère Finkielkraut à l'écrit qu'à l'oral. Entre autres choses je n'aime pas l'utilisation du terme "pogrom antirépublicain" qui me semble excessif, je ne partage pas sa description idéalisée de la colonisation, même si on sait que les colonialistes étaient, parfois, animés des meilleures intentions civilisatrices, le bilan est quand même largement négatif. Surtout, même si je comprends sa colère, je trouve qu'il a tort de sembler abonder dans la concurrence victimaire en faisant un parallèle entre la persécution de ses parents (avec la complicité de la police française) et les souffrances infligées par la France coloniale aux noirs. Il faut sortir de cela.
Mais je ne voulais pas participer au lynchage qui est en marche. Dès ce soir, j'apprends que le Mrap (!) s'est empressé de porter plainte et, plus grave, de demander l'éviction du philosophe de France Culture. Demain ce sera de Polytechnique. Voilà ce qu'ils sentent à portée de main: Finkiekraut paria, "reconduisons le à la frontière!", s'exclame même un dieudonniste sur le site des Ogres, véritable tissu de haine. Un procès en diabolisation est en route comme pour Sarkozy, comme pour Olivier Pétré Grenouilleau, harcelé, et réellement poursuivi pour révisionnisme parce qu'il a commis l'erreur de faire un travail complet sur les traites négrières qui ne se limite pas à l'auto-flagellation de l'homme blanc mais brosse un tableau de tous les esclavagistes, blancs, noirs, arabes et, quelques uns juifs. Aujourd'hui, ce chercheur, que certaines associations "antiracistes" ont réussi à intimider ne peut plus s'exprimer en public. Le colloque prévu au Sénat, sur les traites négrières a été annulé. J'avais cru comprendre que les mêmes reprochaient à la France son amnésie sur ces crimes. En fait ils veulent, à la manière des staliniens en effet, que l'on ne montre que ce qui les arrange de la réalité.
Faire passer Finkielkraut pour un raciste, ou un lepéniste est abject. Ce qu'il dénonce ce n'est pas le combat contre le racisme évidement c'est ce que certains ont fait de l'idéologie antiraciste qui étouffe tout et qui, notamment présuppose qu'un "jeune" noir de banlieue, surtout s'il brûle des voitures pour dénoncer la terrible condition de relégué social qui est la sienne ne peut pas être raciste "anti-blanc". Le racisme c'est seulement pour les riches, les bourgeois, les capitalistes, les blancs, surtout les juifs, enfin excusez moi, on dit les sionistes maintenant pour éviter les procès.
j'irai plus loin: Si certains policiers deviennent racistes parce qu'ils arrêtent systématiquement des Arabes et des Noirs depuis 10 ans, ce n'est guère étonnant. Que la plupart ne le soient pas est admirable. Il ne faut donc pas s'étonner que ces "jeunes" (une petite minorité il faut le marteler) qui se sont persuadés que tous leurs maux venait de la France blanche (et juive) deviennent racistes et antisémites. Le nier est suspect. C'est la bonne conscience qui se substitue à la réflexion, à la recherche de la vérité. J'aime décidément énormément cette phrase de Camus: "Mal nommer les choses c'est contribuer à la misère du monde." On ne s'en sortira pas en fuyant la réalité ou par des procès en sorcellerie.
Dire qu'il y a un facteur ethnico-religieux dans ces événements ? Même cela mes contradicteurs refusaient à me le concéder. Mais quand, dans les années 80, les quartiers pakistanais et Africains de Brixton, en Angleterre, flambaient, ils parlaient bien d'émeutes raciales non? Et la presse étrangère ne s'y est pas trompé qui a justement parlé de quartiers "musulmans" des alentours de Paris, en tout cas dans lesquels les non-musulmans y sont minoritaires, mêê si c'était pour s'étonner d'une telle ségrégation. Oui l'Islam a servi d'étendard, même si c'est un islam politisé, fantasmé, qui n'a rien à voir avec la religion qu'observent pacifiquement des millions de musulmans en France. Ce n'est même pas un jugement de valeur, c'est un fait.
Quand Finkielkraut parle de l'équipe de France "Black black black", qui "attirerait la risée en Europe", on ne peut pas le suivre, et on se demande s'il a bien été compris, surtout le sachant grand amateur de foot, et alors que plus loin il a cette très belle formule en disant qu'il est "color blind", c'est à dire que quand il voit un individu, il ne voit pas sa couleur de peau. Mais si on lit ce qui suit ( et que Cypel n'a pas retranscrit, ce qui est malhonnête), on comprend le sens du propos: Si les "jeunes" noirs et arabes qui ont hué cette équipe de France qui leur ressemble tant "ethniquement" , lors de France Algérie, n'est-ce pas, nous dit-il, qu'au delà de la couleur, ils huaient la France, comme l'injurient en toute impunité du Mrap, certains rappeurs tel que Mr R.
Et c'est bien cela qui doit nous occuper, la haine de la France d'une partie, une petite partie de ces jeunes Français noirs ou arabes qui se sentent des "indigènes de la république". Ce qui est embarrassant, inquiétant pour le fonctionnement de la République, c'est que la majorité s'est sentie défendue, representée, comprise par les émeutiers. Et qu'une fois de plus c'est la violence qui a (un peu) payé. Mais s'agit-il de racisme? Ne voit-on pas ailleurs, dans les conflits sociaux par exemple la même impossibilité de négocier, de prévenir les crises?
Tout mettre sur le compte du racisme de la France est là encore trop facile et abusivement culpabilisant. Il y a des racistes en France, mais la la France n'est pas raciste, comme elle l'a été sous Vichy. C'est bien ce que les dieudonnistes ne comprennent pas lorsqu'il veulent avec obsession mettre sur le même plan la shoah et l'esclavage.
De même la discrimination positive a pu être légitime aux Etats-Unis, parce que les noirs y ont été légalement discriminés. Rien de tel n'a eu lieu en France.
Je ne sais pas si Dieudonné est "le patron de l'antisémitisme", mais sa rhétorique est jumelle de celle de Le Pen et même en moins complexée, car, lui, on ne le traitera jamais de nazi, de raciste puisqu'il est censé être une victime. Le soutien qu'il a reçu de Golnisch sous couvert de défense de la "liberté d'expression" est, à cet égard, éloquent.
Quand Finkielkraut dit que la façon de parler "banlieue" de certains jeunes, leur façon de vouloir tout tout de suite, d'idolâtrer la société de consommation et sa valorisation par les quelques réussites médiatisées, que tout cela représente un handicap dans leur recherche d'emploi (sorti de leurs quartiers, mais justement il n'y a pas de boulot dans les quartiers), c'est une évidence qui montre que l'on ne peut pas mettre tout sur le compte des discriminations.
Sa vraie dénonciation, même s'il a eu tort de se lancer dans des comparaisons avec Israël, c'est bien celle des dégâts d'une certaine modernité avec laquelle il entretient une relation plus que conflictuelle ce qui le conduit à des généralisations déplacées.
Je n'ai pas approuvé tous les propos de Finkielkraut, loin s'en faut, mais ce qui m'a le plus gêné, c'est que pour au moins deux autre chroniqueurs présents ce soir, c'était déjà trop que de ne pas vouloir participer au lynchage.
PS: Je trouve quand même rassurante la critique de l'article par le mouvement des maghrébins laïcs de France.
A aucun moment elle ne tombe dans la haine, l'injure. Les musulmans laïcs sont bien les premières victimes de tout cela. Hélas beaucoup de lecteurs n'y ont rien compris!

18 novembre 2005

Sarkozy a-t-il été traité de "sale juif" par les émeutiers?

Selon cet extrait d'un reportage du vrai Journal de Canal + les "racailles" jouaient bien à l'intifada et ont conspué le ministre de l'intérieur en le traitant de "sale juif". Curieusement la rédaction du magazine a préféré sous titrer les vociférations: "Sarkozy fasciste!"
jugez vous même en regardant la vidéo



17 novembre 2005

Audrey devrait réviser


La sémillante Audrey Pulvar a eu, hier, les honneurs de la une du Herald Tribune. Elle incarne, aux yeux de nos confrères américains, le soucis, récent, des medias audiovisuels français de mettre en avant des personnalités representant la France multicolore. On croit volontiers Audrey lorsqu'elle raconte qu'un responsable de chaine auprès de qui elle cherchait un emploi lui avait répondu qu'il "avait déjà un(e) noire n'en avait pas besoin d'un(e) autre." Plus curieuse est en revanche la remarque finale de l'article, dans laquelle Audrey affirme qu'elle "croira vraiment que les choses ont changé quand les minorités seront representées au gouvernement". On se doit de lui rappeler qu'ils sont, d'ores et déjà, au moins trois: Hamlaoui Mekachera( Anciens combattants), Léon Bertrand (Tourisme), et Azouz Begag (Egalité des chances).
Il y a quelques années, on affichait dans les rédactions la liste des ministres afin que chacun la connaisse. Tout fout le camp...

16 novembre 2005

Le gouvernement traite la presse comme en Algérie

Un confrère allemand de la Frankfurter Runschaü qui venait, avec ses collègues, d'être convoqué par Jean-François Copé pour un rappel à l'ordre sur la réalité de la situation dans les banlieues me confiait l'autre jour à quel point il avait été choqué par la méthode. Les correspondants pensaient obtenir des informations, on leur a fait la leçon. Mais ils ne viennent pas tous de pays où un président peut tenir le crachoir un quart d'heure à la télévision sans avoir à répondre à la moindre question! "Et puis, me dit-il, ce n'est quand même pas nous qui avons décrété l'état d'urgence!"
Encore une manifestation de la fameuse arrogance française. Même les deux pieds dans la glaise, les ministres français qui devraient pourtant en profiter pour prendre une leçon de modestie se permettent de corriger le travail de la presse étrangère. Avec la presse domestique, il est vrai que ce genre de sermons passent très bien et sont même anticipés.

15 novembre 2005

Dormez tranquilles braves gens


Elle n'est pas magnifique cette dépêche AFP sobrement titrée: "Allocution de Jacques Chirac et retour au calme dans les banlieues"? Suffisait d'y penser bon dieu! Seulement 162 voitures brûlées et 42 interpellations, la routine quoi... Juste 3 cocktails molotov lancés contre une mosquée à Saint Chamond (attention aux écoles ce soir...) et 13 incendies de voitures à Paris intra-muros, contre un seul la veille. Soit une augmentation de 1300%! (là, j'exagère, je sais). A part ça tout va pour le mieux dans la France sous Etat d'urgence. On sera pas emmerdés par les touristes à Noël. Chirac nous promet qu'avec l'aide de toutes les bonnes volontés il va réduire la "fracture éthnique" et fissa. Tout le monde se sent beaucoup mieux.

PS: Vous êtes nombreux à me dire que la lettre de l'Elysée au blog de Jacques Chirac est un faux. Dont acte. Chirac a donc de l'humour. Au moins.

14 novembre 2005

A l'Elysée, on n'a pas le sens de l'humour

Je découvre avec retard et consternation que l'auteur du blog de jacques Chirac a cessé de publier (au mois d'avril) suite à une lettre comminatoire de la présidence.
J'aime bien le ton de la lettre qui commence par "Jacques Chirac a été amusé" (le gentil chi) pour se terminer par: "il va vous arriver des bricoles si vous continuez". (le mechant chi).Brrr...Décidement cette fin de quinquennat est glaciale.

13 novembre 2005

Nos medias sont-ils devenus fous?

Voici 17 jours que la France s'est embrasée et ce dimanche, je lis, éberlué, dans une dépêche d'agence, que la "situation revient progressivement (!) à la normale" (Reuters), car il n'y a eu que 374 voitures brûlées lors de cette 17ème nuit de violence. Et par une autre (AFP) que "le retour au calme est perceptible, malgré "quelques incidents".
Quelques incidents?
Pour la première fois, ce samedi des affrontements ont eu lieu, place Belcourt, sur les Champs Elysées de Lyon, entre casseurs et policiers.
Par ailleurs, se manifestent, ça et là, pour la première fois, des opérations de représailles, aussitôt suivies d'ailleurs de contre-représailles: Vendredi, un engin incendiaire a été lancé contre une mosquée de Carpentras, au moment de la prière. Le lendemain c'est celle de Lyon qui était visée. Samedi toujours, une voiture bélier était lancée contre une école maternelle de la Carpentras. Cela aurait pu être une église.Ça s'est vu ailleurs. Inquiétant. Des signes avant-coureurs d' une guerre civile ethnico-religieuse?
En tout cas, pour moi cela a tout de l'aggravation.
J'avais en effet fini par admettre, avec France3, que la litanie du nombre des voitures brûlées ne constituait pas un indicateur intelligent de la réalité dans les banlieues. Je ne comprenais pas pour autant la décision de la chaîne qui avait, pour cette raison, renoncé à donner ces chiffres. Mais il faut aussi admettre que quand les chiffres baissent, ils ne veulent pas dire grand chose non plus.
On le voit la tactique des émeutiers a changé. Ils veulent chercher le contact dans les grands centres-villes. Comment vont réagir France 2 et TF1 qui ont décidé, elles, de ne plus donner le nom des cités qui brûlent (F2) ou de ne plus montrer des images de voitures en flammes (TF1)?
Je ne comprends rien à cette vague d'autocensure, sinon qu'elle ajoute aux malheurs de la France. Nous sommes dans un pays où les élites ne veulent décidément pas voir la tragédie, et ont dramatiquement intériorisé la culpabilisation bien-pensante qui ferait des medias les responsables de ce soulèvement des banlieues, de la France entière la grande fautive pour ne pas avoir suffisament fait de place à ces enfants d'immigrés ramenés à leurs seuls déterminants ethniques.
Autre chose: Ces scènes de défoulement collectif étaient par exemple décrites dans les paroles du chanteur rap Monsieur R (adulé par Besancenot). Mais quand les rappeurs parlaient de la France comme "d'une garce", ou de "niquer la police", on n'a pas voulu les prendre au pied de la lettre, de peur de ne pas sembler assez "moderne".
Pour une réflexion approfondie, pessimiste et lucide de ces événements comme affolement de la modernité, écoutez la denière émission d'Alain Finkielkraut sur RCJ
Pour une vision encore plus noire, celle de Maurice G Dantec, interviewé sur radio Canada

blog surréaliste

J'ai bien aimé ce blog créé par un ancien du CFJ (comme moi). Il ridiculise joyeusement la logique people, avec des notes insignifiantes du genre: J'ai croisé Catherine Frot au marché Port Royal. Elle a acheté ses poireaux chez Marco et est repartie dans la direction de Montparnasse.

11 novembre 2005

In memoriam, Ahmed Ismaïl Khatib

La photo de cet ange, je tiens à ce qu'elle figure ici.
Cette histoire a ému beaucoup de monde et rend optimiste.
Hélàs, dans la relation qu'en fait Le Monde, pourtant assez courte, il est regrettable que la correspondante du journal, Stéphanie Le Bars n'ait pas pu faire autrement que de faire allusion à la ténébreuse affaire Mohamed Al Durah, dans la mesure où il existe aujourd'hui une incertitude sur l'origine du tir fatal au jeune palestinien.

10 novembre 2005

PS: Un vote arrangé

Il ne fait aucun doute, comme l'a dénoncé Jean-Luc Mélanchon, que le vote interne au PS a été "arrangé". 24 heures avant le début des opérations de vote des membres de la direction hollandiste appelaient des journalistes pour les assurer de leur victoire et du résultat: 55%! Ce n'est plus de la transparence, c'est de la télépathie! Hier, un dirigeant du NPS m'affirmait lui aussi que le résultat avait été négocié: "Fabius ne sera pas humilié et nous ferons 25%". Mais le sort de François Hollande n'est pas réglé pour autant. La modération d'Arnaud Montebourg, ce matin, alors qu'il est lui aussi convaincu qu'il y a eu magouille indique que NPS entend se rapprocher de ceux qui, au sein de la majorité (et ils sont nombreux), veulent changer de premier secrétaire. L'argument est le suivant: On ne peux pas diriger le parti avec 55% face à un opposant qui s'appelle Laurent Fabius. Ce qui veut dire de nouvelles alliances et, forcément, un changement de leader. Les jeux sont ouvert pour le congrès.

Petrole/Nourriture: Nouvelle inculpation d'un responsable politique français

Le juge du pôle financier de Paris Philippe Courroye a mis en examen mercredi soir Michel Grimard dans l'enquête sur des malversations présumées liées au programme "pétrole contre nourriture" dans l'Irak de Saddam Hussein, a-t-on appris jeudi de source judiciaire.
Placé en garde à vue lundi après-midi dans les locaux de la brigade de répression de la délinquance astucieuse (BRDE) à Paris, cet ancien membre du conseil national du RPR est poursuivi pour "trafic d'influence" et "corruption de fonctionnaire étranger".
Michel Grimard est l'une des onze personnalités susceptibles, dans l'enquête française, d'avoir bénéficié de largesses du régime de Saddam Hussein sous forme de bons d'achat de pétrole en échange de leur soutien, selon des documents découverts à Bagdad et remis au juge Courroye aux Etats-Unis.
Selon une source judiciaire, il aurait été allocataire
de 12,5 millions de barils de pétrole sous forme de bons, dont il aurait tiré une commission de 410.000 dollars.
source: AFP

09 novembre 2005

Intifada des banlieues? (suite)

En écho à la note précédente, cette opinion publiée par le Monde, de Marco Diani, sociologue du CNRS qui ne pense pas comme les autres sociologues. Très nouvelle formule

Sur quelques simplifications trompeuses

Entretien hier, à Public Sénat, avec la philosophe Blandine Kriegel, présidente du HCI, haut conseil à l'intégration, La situation française résulte non pas d'un échec du modèle républicain mais de son blocage." Autrement dit, si les banlieues s'embrasent c'est parce que nous ne sommes pas suffisamment républicains. Parce que notre République et nos élites sont corrompues ou coupées du réel, nos institutions essoufflées. Les déboires du système néerlandais, très communautariste, montre bien que le mal frappe tous les modèles européens d'intégration des minorités dites "musulmanes", et pas seulement le modèle français reposant sur la laïcité.
Sous la plume de Roger Cohen, dans le Herald Tribune, je trouve aussi une autre piste intéressante (Cette "colonne" n'est malheureusement pas disponible gratuitement sur le web). Et si, nous dit-il, ces éruptions, étaient des manifestations de la crise du modèle social européen. On en voit les symptômes particulièrement sévères dans la zone euro et singulièrement en France: Faible croissance, rejet de la mondialisation, chômage de masse particulièrement chez les jeunes, mais aussi effondrement de la valeur travail et abus des systèmes d'assistance qui rendent l'activité insuffisamment attractive à des niveaux de salaires modestes « le travail c'est pour les bouffons!") Crise de système qui explique la spectaculaire perte de confiance dans les vertus du capitalisme (voir le sondage Libé-Louis Harris selon lequel 61% des français disent avoir une mauvaise opinion du capitalisme, et 51% une bonne opinion du socialisme !)
Cohen s'appuie sur une comparaison avec la réussite du modèle Singapourien, basé sur la liberté individuelle, le travail, la guerre aux discriminations (prévue dans nos textes mais que n'appliquons que mollement) et une croissance à 8% par an! Plus près de nous, on pourrait dire que si le communautarisme anglo-saxon paraît à certains si séduisant c'est peut-être tout simplement parce que la croissance y est deux fois supérieure à la notre, que le marché du travail est plus fluide et rend la recherche de l'assistance moins attrayante, en résumé que l'intégration économique, par le travail, fonctionne mieux que chez nous. Dans ces conditions les employeurs sont moins tentés de discriminer les populations d'origine étrangère! de surcroît, il est étrange que les thuriféraires du communautarisme oublient que dans le passé les anglais et les américains ont eu leur lot d'émeutes urbaines, d'une violence comparable aux "nôtres".
On parle beaucoup en ce moment de l'insuffisante visibilité médiatique des minorités "visibles", certains y voyant une explication à la crise actuelle. Je ne crois pas, pour ma part, que les casseurs soient des interprètes de cette revendication (légitime) de visibilité. J'y vois davantage un comportement nihiliste débouchant- à partir d'un prétexte- sur une tentative insurrectionnelle, peut-être récupéré par les islamistes.
Je ne nie pas les discriminations, notamment à l'embauche. Mais si l'on fouille un peu, on trouve beaucoup d'exemples d'intégrations réussies dans le monde économique. Si les secteurs des medias et de la politique paraissent plus fermées (mais c'est en train de changer) c'est que ces milieux sont particulièrement coupés du monde réel, et peu aptes à la remise en question. D'ailleurs ils font de moins en moins recette.

07 novembre 2005

La France en berne

L'UOIF (Union des organisations islamiques de France), faux nez des frères musulmans, édicte une fatwa interdisant aux musulmans de France de participer aux violences urbaines. Mme Pecresse, porte parole de l'UMP, trouve cela "normal(...)car toutes les interventions pour faire respecter les lois de la république, d'où qu'elles viennent sont bonnes." Qu'est-il arrivé à mon pays? Devant l'impuissance gouvernementale, un Président qui anonne quelques banalités, sur un ton patelin sur les marches de l'Elysée, on en vient à espérer des intégristes qu'ils parviennent à ramèner les "jeunes" à la raison.
La fédération nationale des collectifs de defense et de développement des services publics appelle à une manifestation le 19 novembre et précise qu'il y a "incontestablement un lien avec la situation dans les banlieues." On avait plutôt le sentiment que les émeutiers détruisaient les services publics (autobus, écoles, pompiers etc...), au lieu d'en réclamer davantage.
La Ligue des Droits de l'Homme demande, elle, un "changement radical de politique" et "une mobilisation civique qui permette aux victimes de l'injustice de s'unir pour qu'il y soit mis fin." De quelles victimes s'agit-il, au juste? Du père de famille battu à mort devant sa femme pour un appareil photo à Epinay sur seine? Du retraité de Stains (M. Le Chenadec) tué pour avoir osé demandé (avec respect) aux voyous de cesser de dégrader son immeuble? Des centaines de salariés mis au chomage technique? Des milliers d'autres qui n'ont plus de voiture pour aller bosser? Les droits de l'Homme sont-ils menacés en banlieue? A part le droit à la sécurité à la tranquilité de tout citoyen je ne vois pas. Pauvre Ligue des Droits de l'Homme!

03 novembre 2005

Intifada des banlieues?



Il faut croire que l'éloignement aide certains hommes politique à ouvrir les yeux. Ainsi, il faut saluer la lucidité d'Alain Juppé, qui a compris que l'essentiel de ce qui est en cause en banlieue était la question du "vivre ensemble". L'inquiétude vient, nous dit-il, des divisions entre "français et étrangers, français d'origine et immigrés de la 2ème ou de la 3ème génération, chrétiens (souvent ô combien déchristianisés!) et musulmans... " Autrement dit, nous avons sous les yeux les résultats de 30 ans de politiquement correct et de débat interdit sur la question de l'immigration.
Villepin, qui a-décision exceptionnelle- annulé sa visite officielle au Canada (où il devait d'ailleurs rencontrer son ancien mentor) a compris le caractère quasi insurrectionnel de la situation. Personne ne détient la solution pour ramener le calme. Notons simplement que les appels à "un grand débat" (Bayrou, Ayrault) semblent bien timides, quand, sur le terrain, un syndicat de policiers (CFTC) demande "un couvre feu pour ramener l'ordre républicain, faute de quoi ce sont 700 cités qui entreront à leur tour en guerre civile." Vous avez bien lu, "guerre civile." On pourrait aussi employer le terme "intifada" qui nourrit l'imaginaire des musulmans dans les banlieues, depuis des décennies.
La dimension religieuse de ces évènements s'impose chaque jour davantage. Le Monde semble, par exemple, s'impatienter de voir les "frères musulmans ramener le calme". Si Le Monde a raison de pointer le rôle des barbus, il a tort de paraître s'en réjouir. On sait que la stratégie des islamistes est de s'imposer comme interlocuteur incontournable de l'Etat. Ils pensent y arriver, (et vont peut-être y arriver), en ramenant les banlieues à la raison, après avoir, pendant un temps, soufflé sur les braises. Ce serait conforme à leur attitude constante.
La dimension culturelle, les carences éducatives, sont aujourd'hui les premières responsables des dangers qui menacent environ 100 000 enfants, comme vient de le montrer un rapport de l'Odas, l'observatoire décentralisé de l'action sociale, à partir des rapports effectués sur le terrain par les travailleurs sociaux. Cela veut dire que les déterminants sociaux ne sont pas cruciaux, comme on a trop rapidement tendance à le penser. Ainsi, dans une cité "difficile" donnée, entre deux familles disposant du même revenu et se trouvant dans la même situation sociale, le climat envers les enfants sera beaucoup plus favorable si les parents sont unis, plutôt que s'ils sont divorcés, si les tuteurs exercent réellement leur autorité, plutôt que lorqu'ils l'ont abandonné, quand les enfants font leurs devoirs et se couchent tôt, plutôt que lorsqu'ils sont livrés à eux-mêmes, regardent la télé pendant des heures, ou pis, trainent seuls dans les rues la nuit.
Transposé à la situation des ghettos musulmans de nos banlieues, cela veut dire qu'il ne faut pas céder à la tentation d'essentialiser ce qui s'y passe, mais en même temps se rendre compte que l'éternelle tentation de l'excuse sociale est infailliblement interprétée comme un encouragement à poursuivre les mises à sac, les incendies, les tirs à balles réelles contre les representants de la République. En effet pourquoi s'arrêter si ces actes de vandalisme sont interprétés par les "sociologues" (comme, hier encore, par Michel Wieviorka), comme l'expression d'un "désespoir"? Il y a lieu de penser que les gosses qui entendent, chez eux, un discours positif envers la France seront davantage préservés que ceux qui baignent dans un climat de rancune.
Ces messages ont des effets dévastateurs, comme de celui de provoquer l'extention des émeutes à des banlieues beaucoup plus "calmes" que Clichy-sous-bois, Aulnay ou Sevran, mais ou existent néanmoins des quartiers sensibles, par exemple à Suresnes ou Antony où des voitures ont été brûlées la nuit dernière.
Il est particulièrement inadmissible que la gauche et une partie de l'UMP, proche de Villepin, donne l'impression que les jeunes ne font que répondre aux "provocations" de la Police ou de Sarkozy. Malgré ses balourdises, le ministre de l'intérieur ne fait que dire des vérités d'évidence. Comment, par exemple, peut-on lui reprocher de dénoncer la "racaille" et les "voyous", termes qui s'appliquent en effet aux délinquants et a l'avantage de les distinguer des autres habitants qui entendent mener une vie paisible et honorable? Comment lui reprocher de pratiquer des amalgames et en même temps préférer le terme lénifiant "jeunes" pour désigner les casseurs? Ceux-là n'incitent-ils pas à penser que tous les "jeunes" sont en fait des voyous?
Le résultats c'est que les "jeunes" et leur "grand frères" (terme hallucinant qui désigne à la fois les éducateurs municipaux et les barbus de la mosquée) ont cru pouvoir disqualifier Sarkozy en lui préferant Villepin ou son homme lige, Azouz Begag, dont la mission essentielle paraît non pas de favoriser l'égalité des chances mais de discréditer le rival du premier ministre dans la perspective de 2007.
Au lieu de ces gesticulations pourries d'arrières-pensées politicardes, le ministre de la justice aurait mieux fait de conseiller au procureur de la République de désigner un juge d'instruction pour garantir l'indépendance de l'enquête sur le déclenchement des troubles à Clichy, ou sur l'affaire de la grenade tirée contre la mosquée. C'est ce qu'on attendrait d'une démocratie moderne, mais en somme nous une? Tout le monde a droit à l'expression de la vérité, plutôt qu'à une version officielle qui a force de se refermer sur elle-même finit par en paraître biaisée. Ainsi pourquoi la police a-t-elle d'abord évoqué un cambriolage avant de reconnaître qu'il ne s'agissait que d'un vol sur un chantier? La République ne se divise pas. C'est peut-être ça, finalement, le sens de la "générosité".

PS: 14H31. Une dépêche AFP annonce l'ouverture d'une information judiciaire pour "non assistance à personne en danger" dans la mort de Zyad et Banou. Il était temps.

30 octobre 2005

Bloc Note


Voici sous forme de bloc-note quelques réflexions sur les sujets de la semaine écoulée que j'aurais aimé développer davantage si le temps ne m'avait pas fait défaut:
Les deux nuits d'émeute de Clichy-sous-bois montrent à quel point nous dansons sur un volcan. "Jusqu'ici tout va bien", disait le héros de "La Haine", le (meilleur) film de Kassovitz. Jusqu'à quand? Deux gosses prennent peur devant un contrôle d'identité. Avaient-ils fait une connerie ou seulement peur des conséquences s'ils étaient embarqués? Ils croient se mettre à l'abri en escaladant le mur d'enceinte d'un transformateur EDF. Connerie fatale cette fois.
Le sociologue Sebastian Roché a expliqué dans un de ses livres que les flics sont considérés comme une bande ennemie dans les banlieues. Ils inspirent de le crainte et de la haine. On ne perçoit plus l'utilité civique ou sociale de leur boulot, pas plus que celles des médecins, pompiers, chauffeurs de bus. D'où les tirs à balles réelles, les propos insensés du genre "ici c'est la guerre, c'est Bagdad." Il y a quelques années les mêmes jouaient l'intifada en brûlant des synagogues. Seuls leurs cibles ont changé. "Pour eux, les flics c'est Sharon sur l'esplanade des mosquées", me confie un ami, journaliste qui habite lui-même le "9-3"
On comprend la douleur des familles et des amis des deux jeunes victimes. Mais manifester contre quoi? La Police? Elle n'a semble-t-il pas grand chose à se reprocher sur ce coup là, même si, à force elle s'est laissée prendre au jeu de la guerre des bandes. EDF salaud? Ce n'est pas plus sérieux non plus. Pourtant les habitants de ces cités ghettos se sentent abandonnés par l'Etat. Et ils ont de quoi être en colère. Une colère exploitée par "la racaille" soucieuse de préserver ses petits trafics florissants. Les milliards de la politique de la ville n'ont servi à rien. Ce qu'on aurait été en droit d'exiger c'est que le système éducatif ait pu préparer les jeunes à trouver un emploi. Au lieu de ça les profs influencés par l'esprit soixante-huitard ont préféré les maintenir dans le bain de leur "culture d'origine", et leur "droit à la différence".
Au lieu de cela les profs apprennent aux enfants à devenir de bons anti-américains, et que le terrorisme est "l'arme des faibles", comme le démontre Barbara Lefèvre dans son enquête terrifiante sur les manuels scolaires ("Elèves sous influence" Audibert-Doc en Stock, je reviendrai sur ce livre dans une prochaine note.)
Une suite d'erreurs politiques fatales qui se perpétue avec la proposition récurrente du droit de vote aux élections locales pour les étrangers extra-communautaires. Une mesure que personne, d'ailleurs, ne demande en banlieue. Les jeunes Français ne sont même pas inscrits sur les listes électorales! A quoi cela sert-il de vouloir octroyer ce que les gens ne demandent pas lorsqu'on est incapable de leur apporter l'égalité des chances? Quand va-t-on arrêter de ce servir de cet échec de tous les gouvernements depuis au moins 30 ans à des fins électoralistes? N'est-ce-pas M. Sarkozy?

J'entends l'argument de destruction massive avancé par Brice Hortefeux, première gachette de Sarkozy: "Est-il normal que le père de Zidane ne vote pas?" Oh là,! Ce n'est même plus Zizou qui est sacré, c'est toute sa famille! Et dans ce cas pourquoi lui octroyer seulement le droit de vote aux élections locales? Qu'est-ce qu'on attend pour lui donner la légion d'honneur et à sa mère aussi, parité oblige, pour les féliciter d'avoir enfanté et élevé un tel prodige national? Hortefeux s'est-il seulement rendu compte qu'il utilisait là un raisonnement pétainiste? Je ne crois pas. En République le mérite est individuel. Tout le reste (la gratitude envers ses parents notamment) relève de l'intime. M. Zidane père a-t-il seulement demandé le droit de vote? Il a bien trop de dignité pour ça. Et Zidane, est-il seulement inscrit sur une liste électorale? A l'ambassade de France à Madrid? Ça mériterait d'être vérifié.

Les incohérences de l'Etat actionnaire. Un papier intéressant du Monde. En effet à quoi bon ouvrir le capital d'une entreprise si c'est pour lui mettre ensuite des bâtons dans les roues. Surtout si, en fin de compte, on finit par lui accorder une hausse de tarif maquillée. On perd alors sur tous les tableaux. Les actionnaires sont mécontents (l'action a perdu 3% et du coup la privatisation d'EDF semble moins reluisante) et les usagers aussi, qui ne tarderont pas à se rendre compte qu'on les a grugé. Côté socialistes, ce n'est guère mieux. Entendre Fabius et Jospin dénoncer ce qu'ils avaient prévu d'organiser eux-mêmes il y a quelques années est absolument confondant. Fabius veut renationaliser EDF? Renationaliser une entreprise détenue à 85% par l'Etat! Je me demande dans quel état le PS va sortir de cette surenchère gauchiste, qu'il prétend pourtant éviter.

"Le monde sans le sionisme", "Israël doit être rayé de la carte". Elan de solidarité mondial avec Israël face aux outrances iraniennes. L'antisémitisme des Gardiens de la Révolution ne fait plus de doute. Que de chemin parcouru en deux ans! Depuis ce fameux sondage de l'Union Européenne qui plaçait Israël en tête des "fauteurs de guerre" (Et l'Iran, 12ème...). Est-ce seulement le retrait de Gaza qui explique que plus personne ne songe à expliquer que Téhéran (Et accessoirement le Hezbollah et sa chaîne de télévision financée par l'Iran) est seulement coupable "d'antisionisme" ou "d'anti-israélisme".

19 octobre 2005

Archéologie socialiste







Le choc des motions, hier soir à la "Mutu" (retransmis intégralement sur Public Sénat) était passionnant. Au fond, peu de choses ont changé au PS depuis le congrès de Rennes (1990) et l'éclatement de la famille mitterrandiste. En archéologue, on peut même retrouver les strates du congrès de Metz (1979). Aujourd'hui, le NPS occupe, en gros, le créneau que tenait à l'époque le CERES de Jean-Pierre Chevènement. Un mélange d'authenticité socialiste revendiquée et de surrenchère sociale tous azimuts. Fabius incarne, lui, l'héritage mitterrandien, pur jus. Ce n'est pas pour rien qu'un Charasse se trouve encore à ses côtés. Seul le courant Utopia (rien que le nom fait secte new age) fait figure de nouveauté, mais comme un hybride écolosocialiste qui ne dépareillerait pas en sous-courant des Verts.
La prise de contrôle par la gauche, au congrès du Mans, se dessine. Comme à Metz. Les jospino-strausskhaniens (une stratification récente), alliés à la deuxième gauche rocardienne (moins l'épine sociale-libérale de Bockel) seront-ils minoritaires? C'est l'enjeu du congrès du Mans.
En écoutant les discours, et en lisant les textes des motions (y compris celui de Hollande), on constate que les socialistes, lorsqu'il sont dans l'opposition et surtout en phase de préparation de congrès, ont toujours autant de mal à avancer des propositions de réformes originales. A part l'idée de la TVA sociale qu'ils n'osent pas "vendre" de manière trop agressive (sauf Bockel), leurs propositions se résument à l'abrogation des réformes de la droite. Au panier donc la réforme des retraites, de la sécu, du code du travail, de l'impôt sur le revenu etc...Oui, mais, à la place, on fait quoi pour éviter le naufrage des finances publiques? On augmente les impôts à l'infini? Ce n'est pas très sérieux. Là dessus, seul Bockel voit juste, mais sa voix est inaudible par la "base", prise de convulsion au seul mot "libéral", surtout accolé à celui de socialisme. Il est temps, en effet, que les socialistes français se rendent compte qu'ils ne vivent pas sûr une autre planète. En Europe, il sont les derniers à refuser le réalisme de l'économie de marché. La distinction jospinienne entre "économie de marché" et "société de marché", la première étant seule réputée acceptable, a fait long feu. Le PS est donc condamné a tenir un discours impossible à traduire en actes, s'il revient en responsabilité. Comme dirait Montebourg, il est devenu "une machine à trahir". Le parti de la "réforme" est condamné à n'être que celui de la conservation des "acquis sociaux" et des avantages corporatistes.
Et celà n'a rien d'étonnant car, si le PS rechigne à devenir social-démocrate, c'est que, en France, la droite n'est pas vraiment...de droite. Du moins, elle ne l'est pas encore. Celle qui est au pouvoir avec De Villepin et Chirac se montre, en matière économique, souvent plus à gauche que Blair et même que Schroeder! Tant que cela durera il n'y aura pas d'espace, en France, pour un PS ouvertement, fièrement, social-démocrate.
Sarkozy essaie bien de se distinguer par un programme beaucoup plus libéral, c'est à dire plus à droite. Mais s'il est élu ou gouvernera-t-il? La classe politique française est décidement un objet à part.

14 octobre 2005

Pétrole contre nourriture (suite)


Sur les derniers développements du volet français de "Pétrole contre nourriture", je ne peux faire mieux que de renvoyer à l'excellent "Politique arabe de la France". Je ne sais pas qui se cache derrière ce blog de très haute qualité, ni pourquoi son auteur, visiblement très bien informé, ressent le besoin de préserver son identité. Peu importe.
Nous sommes quelques uns à avoir relevé les ambiguïtés de cette affaire. En tout cas, comme le souligne "PAF", les journaux français se décident à lui accorder enfin l'importance qu'elle mérite (Une de Libé, puis du Monde). Les déclarations de Boidevaix devant le juge valent quasiment aveu et sont une reconnaissance d'un système de corruption dans lequel l'intéressé a trempé. Pour son compte personnel? Ou pour celui de ses protecteurs politiques? Premier mystère. En tout cas Boidevaix n'avait pas renoncé à jouer les utilités auprès de son administration d'origine. Le Quai était-il au courant des relations d'affaire de son ex-secrétaire général? Se servait-il encore de Boidevaix comme d'un honorable correspondant "free lance"? Le juge a encore du travail...
Mérimée, lui, a reçu moins d'allocations et pendant moins longtemps que Boidevaix et il semble qu'il était approché en raison de sa proximité avec Kofi Anan, dont il était le conseiller depuis 1999. Mais il reste une incertitude sur la date effective de son départ à la retraite: 1998, comme l'affirme le Monde- et dans cas Dominique de Villepin a eu raison de dire, ce matin, sur Europe 1, qu'à l'époque des faits incriminés (2001), il était retiré- ou bien fin 2001, décembre exactement, date de son 65 ème anniversaire?,Mérimée se serait alors encore trouvé, au moins administrativement, rattaché au Quai d'Orsay, ce qui serait évidement plus gênant pour la France. PAF nous promet de se renseigner sur ce point.
Autre mystère: la date à laquelle Mérimée a effectivement cessé de conseiller Kofi Anan. La journaliste américaine Claudia Rosett a relevé que le site internet de l'ONU a longtemps mentionné le nom de Mérimée au nombre des conseillers du secrétaire général, avant de le supprimer brutalement lorsque le scandale a éclaté. Interrogé par Rosett une source administrative de l'ONU a expliqué qu'il s'agissait d'un "oubli" et que Mérimée ne travaillait plus à l'ONU depuis longtemps...
PS: Comment trouvez-vous la nouvelle mise en forme? On se sent tout de suite au XXI ème siècle non?

10 octobre 2005

Je reprends

Reprenant le travail ce matin, il me reste en tête quelques brêves qui ne sont pas toutes à l'honneur de ce beau métier de journaliste. Je reprends, donc:
Les journalistes de Capital (M6) protestent contre la censure d'un reportage sur la Logan (voiture "low cost" lancée par Renault dans les pays de l'Est, mais vous allez voir que les salariés précaires de nos cités vont l'adorer). Un gros importateur de la Logan, a qui on demandait si Renault perd des parts de marchés avec ce modèle avait répondu "oui, je crois." Le directeur de l'info de M6, Jean-François Bureau a le culot d'affirmer que cette intervention relève d'un "choix éditorial" et non de la censure. Il fallait oser. Dans le même temps, il a quand même dit la triste vérité à ses journalistes: Renault est un très très gros annonceur de la chaîne. Alors, pas folle, la guêpe. Les journalistes de Capital croyaient travailler pour un magazine d'investigation économique. Ils se trompaient lourdement. Ils préparaient en fait, eux aussi, les cerveaux pour la pub. Or le terrain de Capital étant le même que celui de la Pub (les marques, les réussites, bref le "Kapital"), en cas de glissade, ça ne pardonne pas.
-Dieudonné envoie ses fantassins de la "nation noire" envahir le plateau de Fogiel (France 3), estimant que l'animateur devrait être relevé de ses fonctions. En effet, Fogiel vient d'être condamné pour un SMS bidon, passé dans une émission sur Dieudonné et que le tribunal a trouvé raciste: "Dieudonné, cela te faisait rire si on faisait des sketches sur les odeurs des blacks?"
Ce message n'a rien de raciste, à mon humble avis. Il aurait pu être envoyé par un téléspectateur. L'ennui c'est que son auteur était un collaborateur de l'émission. Ces procédés (faux messages, appels d'auditeurs bidons, voir faux témoins) sont très souvent employés dans les émissions de divertissement qui traitent malheureusement des sujets trop polémiques pour les JT, donc réputés insuffisament "fédérateurs" (?) Total, un phénomène politique tel que Dieudonné n'est pas traité avec le minimum de rigueur journalistique nécessaire. L'arroseur (Fogiel) se retrouve arrosé et Dieudonné peut à nouveau passer pour une victime. Manque de rigueur ou manque de liberté (vis à vis des annonceurs), tels sont les maux dont souffre le traitement de l'actualité à la télévision.

09 octobre 2005

Goulag, vers l'oubli?

"Si nous ne faisons pas plus d'efforts pour nous rappeler l'histoire de l'autre moitié du continent européen, l'histoire de l'autre régime totalitaire du XXème siècle, c'est nous en occident qui finirons par ne pas comprendre notre passé, nous qui ne saurons comment notre monde est devenu ce qu'il est."
Ceci est tiré de l'épilogue du livre d'Anne Applebaum "Goulag, une histoire" (Grasset). Tout a peut-être été dit et écrit sur les crimes du communisme, mais avons fait correctement le même "effort de mémoire" que pour les crimes du nazisme? Pas sûr. Sinon les partis qui se réclament encore, en France, du marxisme-léninisme ne recueilleraient pas environ 17% des intentions de vote en France, selon les derniers sondages. Sinon le PCF ne se féliciterait pas d'accueillir 7000 nouveaux adhérents depuis janvier dernier. Sinon, notre Président de la République n'aurait pas traité comme il l'a fait les Polonais, au moment ou ceux-ci étaient candidats à l'entrée dans l'UE et, pour autant ne partageaient pas les mêmes vues que Paris sur la guerre en Irak. Un jeune de 20 ans sait parfaitement à quoi s'en tenir dès qu'il s'agit du nazisme. Mais sait-il que 28 millions d'êtres humains, koulaks, polonais, tchèques et autres membres d'autres minorités nationales, opposants et dissidents, parfois rien de tout cela, furent déportés ou Goulag entre 1917 et 1992? Et qu'entre 14 et 20 millions n'en sont jamais revenus? Car c'est l'un des apports de cette journaliste américaine de rappeler que les camps de concentration ne sont pas le seul fait du stalinisme mais sont au contraire aussi vieux que la révolution bolchevique elle-même et que le dernier d'entre eux n'a fermé qu'avec la chute de l'URSS. En matière d'Histoire et de mémoire, somme-nous devenus hémiplégiques?

PS: sur l'usage abusif du terme "goulag", au sujet de Guantanamo (par Amnesty International), Anne Applebaum a écrit un article intéressant intitulé "l'Amnésie d'Amnesty".

04 octobre 2005

Cure de télé et lectures

Etant contraint à m'économiser je passe le plus clair de mes journées allongé. Mon corps est occupé à cicatriser mon fémur et cela me coûte énormément en énergie. La marche, avec béquilles, ne pose, elle pas trop de problème. Mais cent mètres me font l'effet d'un jogging!
J'ai donc passé beaucoup de temps à dormir, mais aussi à lire et un peu plus que d'habitude à regarder la télé. Parmi les nouveautés de la rentrée, j''ai trouvé Elise Lucet très convaincante dans le difficile exercice du 13 H. Elle est sans doute la meilleure présentatrice du moment. LCI, en revanche ne cesse de m'affliger. Field n'a plus rien gardé de ce qui faisait sa pétulance à l'époque de 7 sur 7. Sa partition est empruntée et en dehors de l'excellent "politiquement show" le 18/20 est un désert. Les interview sont trop longues et déconnectées de l'info. LCI ennuie et I télé est encore un peu loin, mais le coup est jouable si Canal se décide à mettre un peu de moyens et relève le niveau professionnel.
Denisot, que je n'avais pas vu depuis longtemps essaie de renouer avec la "music live" de la grande époque NPA. Mais là encore tout est vraiment au ras de pâquerettes. Finalement je ne suis pas si mal sur Public Sénat. Enfin, quand j'y suis. Je compte bien reprendre dès lundi, d'ailleurs.
Côté lectures, Houellebecq m'a un peu agacé. Son truc ronronne. On voit bien l'intuition de la fin de l'humanité mais je le trouve trop noir, trop pessimiste. Il ne reste que les scènes de cul pas trop mal écrites d'ailleurs, mais à la fin vous êtes plutôt soulagé que ça se termine. bref il n'y a pas ce déchirement que l'on ressent en quittant un grand roman. (
La possibilité d'une île, Fayard)
J'ai été passionné, en revanche, par "
Le Fils du Serpent" de mon confrère du "Nouvel Obs" Airy Routier (Albin Michel). La vie et la mort du banquier Edouard Stern, enfant terrible de la finance et enfant martyr qui a trouvé la mort des mains de sa maîtresse dominatrice. Une fille assez moyenne mais qui avait révélé son moi intime. Routier laisse entendre que la dame n'a pas agi sur un coup de folie passionnelle mais qu'elle aurait exécuté un contrat lancé par un des nombreux ennemi de Stern. Sa mort pourrait être lié à l'affaire Rhodia, dont Thierry Breton fut administrateur. Stern qui avait perdu des dizaines de millions d'euros dans la combine avait juré la perte des responsables. Quel polar!
Côté politique, hommage à Denis Jeambar qui dit ses 4 vérités à Chirac dans un court essai: "
Accusé Chirac Levez-vous!" (Seuil). Impitoyable mais juste. Je n'en retirerais pas une virgule. Comment la France a-t-elle pu en arriver là, à voter deux fois pour un homme qui, écrit Jeambar, a fait passer sa passion du pouvoir avant celle de la France et à dévoyé une grande intelligence. Le mystère Chirac, s'étonne-t-il, c'est que la fonction suprême ne l'a jamais grandi.

30 septembre 2005

Quand les urgences de Cochin ne répondent pas

Quelques explications pour les lecteurs assidus de ce blog, pour expliquer cette longue (8 jours) interruption de mes notes. Dimanche dernier, de retour du jardin du Luxembourg, j'ai fait une mauvaise chute en rollers et je me suis fracturé le col du fémur. "Sport de jeune, blessure de vieux", a, assez bien résumé une amie! Il faut dire que je prête le flanc (ah! ah!) aux mises en boite. Ok, je n'avais jamais fait de patin à roulettes de ma vie, et, impétueux, j'avais récemment décidé de m'y mettre, avec mon fils de 7 ans et demi. Le coup classique: j'ai d'abord été excessivement prudent, puis je me suis laissé griser par mon aisance aussi nouvelle que surprenante dans cette discipline qui m'a toujours attirée. J'ai pris une (petite) descente, ce qu'évidement je n'aurais jamais du faire. Et, alors que j'étais pratiquement rentré chez moi, vlam! Le gadin magnifique, de tout mon poids sur le bitume. Pompiers (service trois étoiles, les gestes, les mots qu'il faut etc...), puis les urgence de Cochin. Là, dans la salle d'attente, j'avais à peine commencé à méditer sur cette tuile (je devais commencer le 18 heures de Public sénat le lendemain), que les choses commençaient aussitôt à se compliquer pour l'usager de base du système-de-santé-éblouissant de M.Chirac que je suis. Les urgentistes de l'hôpital Cochin,, après m'avoir annoncé la mauvaise nouvelle (optimiste incorrigible, je pensais m'être seulement luxé la hanche), me disent qu'ils ne peuvent pas m'opérer avant au moins 36 heures et me proposent un transfert vers la clinique B. Ils m'avaient déjà fait le même coup pour un panaris, il y a environ deux ans. J'avais alors pensé que mon cas n'était pas assez sérieux pour l'un des hôpitaux les plus réputés de France, particulièrement en orthopédie. J'en étais ressorti avec un ordonnance d'Héxomédine Trancutanée et une feuille de route vers la même clinique B. où opèrent un certains nombre de chirurgiens de Cochin. Mais, là, je me voyais quand même assez mal barré pour un nouveau tourisme hospitalier avec une fracture que je ne souhaitais pas laisser traîner. L'interne a quand même ajouté que si je connaissais un chirurgien ailleurs, il ne voyait pas d'inconvénient à me transférer, même à Pétaouchnoque, si tel était mon bon plaisir. Ayant une préférence pour les hôpitaux dès qu'il s'agit d'opération sous anesthésie générale, me voilà, pendu à mon portable, toujours allongé sur ma civière, lutant contre la douleur, et en train d'essayer de joindre, un dimanche, tout ce que mon carnet d'adresse compte de sommités du corps médical. Finalement, après plusieurs avis tous contradictoires, j'optai pour l'Hopital Saint-Antoine, ou j'étais attendu, puis opéré dès le lendemain et traité comme...un être humain pendant 6 jours par une équipe dont le savoir faire et la disponibilité m'a, en effet "ébloui". Et je n'ai bénéficié d'aucun traitement de faveur puisque mes "collègues" d'infortune furent traités avec les mêmes égards. Une infirmière m'a même fait un shampooing sur mon lit hier soir! Je les remerce tous au passage.
Deux conclusions s'imposent:
1: J'ai de plus en plus de soupçons sur le fait que l'hopital Cochin fait tout ce qui est en son pouvoir pour arrondir le chiffre d'affaire d'une clinique privée ou exercent une partie de ses chirurgiens.
2: Il va falloir que je trouve autre chose que le roller pour avoir l'air de rester jeune. Si vous avez des idées...
Bon week-end quand même!

22 septembre 2005

Pétrole contre nourriture: pudeurs françaises


L'instruction du volet français de l'affaire "pétrole contre nourriture" avance à grand pas sous la conduite du juge Philippe Courroye. Hier, Claude Kaspereit, fils de Gabriel, ancien pilier du système parisien de l'époque chiraquienne, a été mis en examen. Il aurait bénéficié de 8,5 millions de barils de brut irakien revendus ensuite avec plusieurs millions de dollars de bénéfice.
Le 11 septembre dernier, celle de Serge Boidevaix, pour "trafic d'influence et corruption" a bien failli passer inaperçue. L'AFP l'a présentée comme celle d'un "ancien diplomate français." Comme s'il s'agissait d'un simple fonctionnaire du rang! Or, Boidevaix est, excusez du peu, un ancien secrétaire général du quai d'Orsay formé à l'école de Michel Jobert. Lui aussi est un membre du sérail chiraquien. Il fut le conseiller diplomatique de Jacques Chirac de 1974 à 1976, à la grande époque d'Osirak, celle ou le jeune occupant de Matignon était tombé sous le charme d'un non moins jeune vice-président irakien du nom de Saddam Hussein. Boidevaix est aussi un proche de Maurice Gourdeau Montagne, actuel conseiller diplomatique du chef de l'Etat. Voilà qui ne suffit pas à affirmer que Chirac est mouillé dans "Pétrole contre nourriture", mais au moins peut-on émettre l'hypothèse d'une implication possible de l'Elysée.
Boidevaix, reconverti dans le monde des affaires, est bien un ancien directeur de la chambre de commerce franco-arabe, c'est un intime de Tarek Aziz. Cela fait beaucoup de raisons pour lesquelles le pouvoir irakien de Saddam pouvait juger utile de le récompenser. Boidevaix s'est vu attribué, lui, plus de 32 millions de barils! En a-t-il ensuite fait profiter ses mentors politiques de cette manne? La question mérite, me semble-t-il, d'être posée avec un peu plus d'insistance.

En cherchant des informations sur Boidevaix, je suis tombé sur un excellent blog intitulé "politique arabe de la France", qui retrace complètement la carrière de l'ancien diplomate.
Voyez aussi comment l'agence reuters a traité l'information en soulignant correctement, elle, la qualité du mis en examen

19 septembre 2005

Premier jour au Sénat

Journée de prise de fonction à Public Sénat aujourd'hui. Mes fenêtres donnent sur le jardin du Luxembourg. Il y a pire comme environnement.
Attrait de la nouveauté, intérêt aussi pour la participation à l'encadrement d'une équipe jeune et motivée par la politique. Bref citoyenne. Elle donne une autre image de ce métier ou l'apparence et la course au vedettariat ont tendance à l'emporter sur les "fondamentaux". Je pense que ce pari peut-être gagné. Un signe: j'ai appris que le talk show de Fogiel sur France3 était en chute brutale (et irrémédiable) d'audience. Je crois vraiment que ces émissions sont condamnées aux gloires éphémères. Tant mieux. Même si Fogiel lui même fait preuve d'une certaine ténacité dans ses interview, que l'on aimerait voir chez d'autres journalistes encartés, il tombe un peu trop souvent dans la posture du pitbull. Attendons janvier pour que la nouvelle équipe de France télévision dévoile ses intentions.
Et puis il y a la nouvelle tranche d'info de 18 h qui sera à l'antenne la semaine prochaine.
Retrouvailles aussi avec l'équipe de Proche-Orient. Info qui lance une souscription en vue de reprendre son activité. Sympathique et chaleureux de retrouver l'équipe qui donnera bientôt de ses nouvelles. La souscription est encore ouverte sur le site. C'est important.

14 septembre 2005

Ségolène Royal s'essuie les escarpins sur le Sénat


Je suis en colère. En colère contre Ségolène Royal. A peine avais-je signé mon contrat avec Public Sénat que Madame Royal déclarait qu'il fallait supprimer le Sénat. Pourquoi subitement? D'autant que, franchement, c'est un sacré serpent de mer, De Gaulle lui-même y avait déjà pensé, avec le succès que l'on sait. S'agit-il d' une attaque personnelle? Je me suis posé la question.
Ségolène Royal a tout à fait le droit de demander la suppression du Sénat, des départements, de la fête des mères, du Beaujolais nouveau, des prix littéraires, des reality shows etc...Ce qui me met en colère c'est qu'elle le demande pour des raisons politiciennes, c'est à dire pour tacler (par derrière) son rival régional Raffarin qui entend faire son retour dans la haute assemblée, et en briguer la présidence. En cas d'empêchement de Chirac, il pourrait alors lui succéder, même temporairement. Amusant non? Mais n'allons pas si vite en besogne. Le" Pompidou du Poitou" (quelle trouvaille!) n'en est pas encore là.
Et bien j'ai le regret de dire à Mme Royal qu'elle a tort. Et pas seulement parce que je pense qu'une institution qui m'emploie a largement justifié son utilité (!). Je suis prêt à apporter la démonstration du caractère indispensable du Sénat. Même si l'on est en droit d' estimer que le mode de désignation des sénateurs (qui a déjà beaucoup évolué vers plus de représentativité) peut encore évoluer, et que la durée du mandat devrait être réduite. Un seul fait, afin de ne pas être trop long, sur un sujet qui, je le sens bien ne vous passionne pas: Dans un monde de plus en plus mercantile, où les puissances économiques sont en mesure de dicter leur loi aux citoyens, il est pour le moins surprenant, pour ne pas dire suspect, qu'une élue de gauche veuille supprimer une institution qui représente le peuple, ne rend de comptes à personne d'autre et contrôle l'exécutif de façon parfois plus approfondie que l'Assemblée Nationale.
Quant à moi, j'en suis arrivé à la conclusion qu'avoir pour employeur l'une des deux chambres parlementaires- qui n'a à vendre que des rapports difficiles à lire- ce n'est pas plus honteux ou compromettant que d'être salarié de marchands de canons ou de béton.

13 septembre 2005

Ramadan à Blair: Supprimez la journée de la Shoah!


La nomination récente de Tarik Ramadan comme conseiller de Tony Blair avait de quoi intriguer. La première idée de ces nouveaux conseillers issus pour la plupart de la communauté musulmane britannique dépasse toutes les craintes: Invités à faire des propositions pour lutter contre l'émergeance d'une génération de terroristes "home made" et "home grown", ces messieurs, si l'on en croit cet article du Sunday Times, estiment que Tony Blair devrait commencer par supprimer la journée de commémoration de la shoah. Parce que, disent-ils, elle offense les musulmans de Grande Bretagne. A la place, il conviendrait, si on les suit,d' instituer une journée de célébration de tous les génocides, parmi lesquels (ou plutôt surtout) le "génocide palestinien". Du Ramadan tout craché.
En vérité, par cette proposition, les nouveaux conseillers de Tony Blair font la démonstration par l'absurde et à leur corps défendant que l'Islam ne comprend rien à l'histoire européenne (faudrait-il dire à l'histoire commune de l'humanité?) et à la place à part qu'y occupe la Shoah. Bref Blair est là face à la quadrature du cercle communautariste.

11 septembre 2005

Quatre ans après


Quatrième anniversaire des attentats. J'ai apprécié l'analyse de Mark Danner tirée de son livre dans un article du Herald Tribune (je sais, deux citations en deux jours c'est limite pédant mais c'est devenu mon journal préféré.)
Je la trouve néanmoins faible sur un point. On peut soutenir que l'intervention en Irak a sucité des vocations de jihadistes par centaines. Il me semble que ce qui a le plus alimenté la mystique du kamikaze islamiste et favorisé les recrutements c'est l'audace des attentats eux-mêmes, la diffusion en boucle, névrotique, des images des tours en flammes. Cette démonstration, enfin faite aux yeux su monde entier, que l'Amérique n'était pas invincible avait de quoi transformer dans le monde arabe les frustrations en une determination farouche à infliger le plus de mal possible à l'Amérique. On comprend mieux la necessité pour l'Amérique de réagir vite et fort, quitte à obliger l'ennemi à livrer le combat sur un champ de bataille. Ce sera l'Afghanistan, puis (trop?) rapidement l'Irak.
Ce qui reste le plus regrettable dans cette affaire: Que le travail n'ait pas été terminé en Afghanistan, le mensonge des ADM bien sûr, et enfin, c'est lié, l'absence de coalition internationale et un mandat de l'ONU pour renverser Saddam Hussein
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10 septembre 2005

Philip Roth Canonisé de son vivant

Philip Roth vient de voir son oeuvre distinguée en entrant au catalogue de la prestigieuse "Library of America", sorte de Panthéon des lettres américaines. Un privilège d'ailleurs presque toujours réservé aux écrivains disparus, comme nous l'apprend cet article de Charles Mc Grath dans le Herald Tribune. Je me demande ce qu'attends son éditeur pour traduire et publier le dernier opus de Roth, "A plot against America" (un complot contre l'Amérique), paru il y a presque un an.
Dans ce roman, Roth depeint les drames d'une famille juive du New Jersey entre 1940 et 42. Il imagine les conséquences qu'auraient pu entrainer la nomination par les Républicains de Charles Lindbergh comme candidat contre Roosevelt. Antisémite déclaré, ouvertement isolationiste et pro-nazi (à la différence de Wendell Willkie, le candidat que choisirent alors les républicains), Lindbergh, héros national, l'aurait, dans le climat de l'époque, emporté sur l'homme du New Deal. C'est en tout cas l'hypothèse de Roth. Devenu Président, Lindbergh signe alors un traité d'amitié avec Hitler et laisse se développer une vague d'antisémitisme aux Etats-Unis. Sous pretexte que les Juifs sont accusés de ne pas être assez fondus dans la culture américaine, l'administration de Lindbergh encourage tout ce qui peut les arracher à leurs quartiers de prédilection, en envoyant par exemple leurs enfants dans des familles d'agriculteurs du Middle West, ou en organisant des mutations professionnelles.
Pendant ce temps, Hitler tisse tranquillement sa toile en Europe, assuré de ne pas entrer en guerre contre les Etats-Unis.
L'Amérique heureusement, réussira finalement- grâce à des hommes comme La Guardia, le maire de New York- à racheter son âme...

09 septembre 2005

Enorme: Chirac réapparaît!



Chirac est sorti du Val de Grâce! Il était temps les médias commençaient à se poser des questions sur sa disparition totale du paysage depuis près d'une semaine. Pour quelqu'un qui était censé marcher et travailler dans sa chambre...
Et à la sortie quoi? Rien ou presque. Pas un mot, pas une question, évidement, sur sa santé. Chez nous, les journalistes-et encore, triés sur le volet- ont le droit de poser des questions au Président une fois pas an, le 14 juillet. Le reste est à discrétion. Trois minutes de discours de sous-préfecture crispé sur l'excellence du système hospitalier ("aussi bien au plan humain qu'au plan technique." Ah, ce qu'il aime ressembler à sa caricature notre Chi!"). Du reste qu'est-ce que Chirac a bien pu en voir du "système hospitalier", dans sa chambre présidentielle du VDG? On devine quand même que la nourriture était passable car Chirac semblait nous dire: "J'ai hâte d'aller manger un vrai truc". Et ce "Chez moi" pour parler de l'Elysée dont il n'est qu'un hôte de passage (long passage, d'accord), cela faisait un peu propriétaire non?
Alors faute d'info, disons ce que l'on a cru assez nettement déceler: une raideur évidente dans le côté droit, perceptible tant dans l'oeil (torve) que dans la démarche, très peu assurée.
Voilà à quoi, journaliste ou pas, on en est réduit. Il paraît qu'au pays des aveugles...
Compte tenu des pouvoirs qui sont les siens, ne serait-ce que celui d'appuyer sur le bouton nucléaire, ne sommes-nous pas en droit de demander la transparence sur la santé du Président. Ah le grand mot de transparence. Ce n'est pas une curiosité maladive, une manifestation de la tyrannie démocratique. Seulement je ne m'en remets toujours pas que, pour être informé de la santé de Mitterrand en 1981, il fallait être abonné à Minute!
Dans le cas présidentiel, l'application de la loi sur le secret médical est simplement une incongruïté. Le Président devrait être contraint à des examens réguliers et sincères qui devraient, au minimum, comme le suggère Olivier Duhamel, être soumis au Président du Conseil Constitutionnel.

08 septembre 2005

Dieudonné ou l'antisémitisme au second degré



La confirmation, en appel, de la relaxe de Dieudonné pour son sketch antisémite conforte ma conviction que ces affaires ne gagnent rien, sauf les agressions physiques, à être portées devant les tribunaux.
Comprenez bien:
1/ Je pense que Dieudonné n'est pas seulement antisioniste et anti-israélien, comme le prétendait ce matin encore une journaliste d'une radio de service public qui ne parvenait pas à masquer son soulagement. Il est bel est bien antisémite et même dangereusement, puisqu'il à l'ambition, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, de fédérer autour de lui, sous habillage humoristique, un parti antisémite. Ses réunions publiques sont ses spectacles ou on se marre bien sur le dos des juifs, en toute bonne conscience donc puisque c'est pour rire. Ben voyons...
On pourrait parler d'un antisémitisme de second degré, comme il y a dans le droit pénal anglo-saxon des homicides de premier et de deuxième degré. Or nos tribunaux, nos juges, ne disposent pas des outils conceptuels et juridiques nécessaires pour trancher ces affaires. Notre arsenal de lois antiracistes, déjà l'un des plus répressif qui soit, n'est ni efficace ni adapté et ne le sera jamais sauf à apparaître encore plus comme une atteinte à la liberté d'expression. Tout simplement parce que les propos antisémitisme au premier degré sont devenus extrêmement rares. L'antisémite au premier degré a compris qu'il serait infailliblement condamné, donc il se doit de présenter différemment ses prises de positions. D'utiliser "l'understatement", la litote..ou le rire qui n'est pas la même chose que l'humour, comme chacun devrait le savoir.
Le registre de l'antisionisme total lui fournit un contexte idéal pour être compris par son auditoire (déjà acquit) à son antisémitisme, sans s'exposer à des représailles juridiques.
Dieudonné est un cas limite. En faisant mine de se retrancher derrière la licence de l'humoriste il profite d'une jurisprudence constante. Pour les tribunaux on peut rire de tout. Ils ont raison d'ailleurs, mais comme disait Pierre Desproges, pas avec n'importe qui. C'est là ou Dieudonné est plus que douteux. Le fait que la présidente de la cour se soit sentie obligée d'assortir son arrêt de relaxe par un jugement moral montrant qu'elle réprouvait Dieudonné est à la fois regrettable (la morale ne devrait rien à voir là dedans surtout quand il est flagrant qu'elle contredit instantanément une lecture du droit) et montre le désarroi des juges face à ces affaires.
2/ Si ce n'est pas à la justice de condamner Dieudonné, c'est la société, notamment ses médias qui devraient le faire. Pour le coup au nom de la morale et en prenant enfin conscience de nos responsabilités face à un politicien manipulateur. Aucun animateur de télévision ne devrait l'inviter. C'est à peu près le cas, me semble-t-il, depuis le début de cette polémique. Mais il y a fort à parier que Dieudonné se servira de cette nouvelle relaxe pour conforter sa paranoïa victimaire ("je suis victime d'un complot, d'un acharnement") et comme une autorisation pour continuer son oeuvre nuisible. Certains animateurs de talk Show ne tarderont pas, en ce qui les concerne, à refaire venir sur leur plateau un homme sulfureux qui vient d'être blanchi (pardon du jeu de mot) par la justice. Qui pourra encore le leur reprocher?
Le ton du papier de France Culture ce matin, en était un début d'illustration. A suivre avec l'affaire Edgar Morin qui a su mobiliser en sa faveur le monde intellectuel.
S'en remettre à la justice pour s'exonérer de ses responsabilités morales et politiques est un très mauvais signe. C'est celui que donne les médias mais aussi les inconditionnels de la judiciarisation de ces affaires. Le combat se mène ailleurs que dans les prétoires.

06 septembre 2005

L'Amérique malade. La France léthargique

L'Amérique est à la fois hyperpuissante et malade. La catastrophe humanitaire provoquée par Katrina nous montre la première puissance mondiale, incontestée et pourtant totalement démunie comme une vulgaire nation du tiers-monde. Tout dans les images du drame évoque cela, de la couleur de la peau des victimes, jusqu'au sauveteurs terrorisés, obligés, souvent, de jeter des rations du haut des hélicoptères, en se protégeant des gangs par des fusils à pompe.
Il est bien possible que l'opinion américaine, déjà en train de basculer au sujet de l'Irak mette à profit cet électrochoc pour se décider à soigner ses propres blessures. "
Que sommes-nous devenus si nous ne savons plus nous occuper de nous-mêmes?", écrit par exemple Maureen Dowd, en conclusion d'un éditorial du New York Times d'une extrême sévérité sur l'incompétence de cette administration.
On aurait pourtant tort de se réjouir par avance, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, d'un retour à plus d'isolationnisme, car, me semble-t-il, le monde a encore besoin des Etats-Unis, pourvu qu'ils soient dirigés par quelqu'un d'autre que Bush.
Face à cette Amérique en pleine détresse, il est extrêmement choquant de voir la France, son peuple, ses médias, qui s'étaient montrés si prompt dans la compassion au moment du Tsunami, pratiquement silencieuse. Certes, les offres d'aide étrangère sont rarement dénuées d'arrière pensées. Qu'il s'agisse des Russes, des Cubains, des Vénézuéliens, ou de certains pays musulmans, il y a là une façon de rappeler à bon compte à l'Amérique qu'elle est plus fragile qu'elle ne le pensait et qu'elle ferait bien de considérer le reste du monde avec un peu moins d'arrogance.
On pouvait espérer de la France,qui a une telle dette envers les Etats-Unis, un geste désintéressé, plus spontané, qui aille surtout au delà de la dizaine de volontaires de la Croix Rouge envoyés en Louisiane où la France a pourtant laissé une emprunte culturelle, même si elle s'est sédimentée. Ou sont les campagnes, les appels aux dons pour les centaines de milliers de réfugiés américains qui ont perdu le peu qu'ils avaient? Rien. Un silence affligeant, une indifférence, au mieux, que je ne peux expliquer autrement que par le niveau inquiétant atteint par cette vieille passion française qu'est l'anti-américanisme: "
Ils n'ont qu'à s'occuper de leurs pauvres au lieu d'envoyer leurs troupes en Irak. Ça leur apprendra!" Voilà ce que l'on croit entendre dans les chaumières. Un Américain, même noir, de l'Alabama vaut-il moins qu'un indonésien de Banda Ace? Où bien, terrible hypothèse, le mouvement de solidarité du début d'année s'expliquait-il par le nombre de Français, d'occidentaux, qui ont péri en Asie et ne sont pas rentrés de leurs vacances?
J'ai quand même noté, je le note pour la bonne bouche, la proposition d'aide venant de la ville d'Orléans. Est-ce un message codé, une clauque, des vieux européens, des vieux orléanais, en direction de Rumsfeld qui avait ironisé sur la mollesse de la vieille Europe? Sur le dos des pauvres sans-abri de la Nouvelle-Orléans? Je pense à cette chanson de Sardou un peu triviale, mais de circonstance: "Si les ricains n'étaient pas là..." Mais pour les moins de vingt ans tout ça est bien loin.

Affligeant également, le désintérêt manifeste de la presse française pour l'accident de santé de Chirac. Elle s'est, dans l'ensemble, contentée des communiqués officiels, quand on voulait bien lui en distiller, s'interdisant de poser les questions élémentaires sur la capacité de Chirac à diriger la France, dans ces temps difficiles, en pleine possession de ses moyens. 48 heures après la nouvelle est déjà reléguée en page intérieure, bien après l'augmentation du prix de l'essence. Cette apathie consterne venant d'une profession malade du conformisme et à la bienséance à laquelle on a continuellement menti sur cette question, ne serait-ce que par omission. Comment s'étonner, après ça que les français rechignent à payer 1€ (au moins) pour acheter un journal!

Pour ceux qui souhaitent aider les sinistrés américains, le Herald tribune donne quelques pistes

30 août 2005

Bayrou, le Tony Blair français?


J'ai, je le confesse, longtemps sous-estimé François Bayrou. Trop longtemps. Je n'aimais non plus ses manières. Un jour avant une interview en direct à la radio il a voulu me dicter la première question (un sujet de société, je ne sais plus lequel, qui lui tenait à coeur et sur lequel il voulait prendre date.) Comme je m'obstinais à respecter mon plan initial, il m'a fait le coup (horripilant) du: "je vais répondre à votre question mais je voudrais d'abord dire quelque chose..." Bon, ça faisait un peu trop ancienne école pour mordre au portrait du gentil Bayrou qui va moderniser la politique.
Et bien j'avais tort d'en rester aux sarcasmes répandus sur son compte (voir les guignols de l'info, grâce auxquels nous devons au moins sept des dix ans de règne Chirac et ce n'est pas fini...).
Voilà, je viens de suivre sans décrocher le discours de clôture de l'université d'été de l'UDF que LCI et i télé ont eu la bonne idée de retransmettre. (Public Sénat est encore en vacances, sinon elle l'aurait fait aussi.)
Et bien, je n'avais pas entendu un aussi bon discours politique depuis des lustres. C'était dense, inspiré, plein de lucidité et d'idées sur la façon de remettre la valeur travail au coeur. Du social sans incantation ni démagogie et en prime il se paye le luxe de reprendre à son compte l'idée d'une taxe Tobin sociale, la meilleure idée qu'ai jamais pondu ATTAC. La seule d'ailleurs.
Et bien je suis séduit. Voilà. Et je pense que, oui, il n'y a plus aucune, je dis bien aucune différence aujourd'hui entre DSK, Kouchner, Rocard et quelqu'un comme Bayrou. Que les premiers devraient bel et bien laisser Fabius, Emmanuelli et l'hystérique Mélenchon à leur combines et leurs rêves d'alliance avec Bové et Besancenot et créer enfin un vrai parti social démocrate dans ce pays. Quand au second il devrait entrer résolument dans l'opposition, opposition dont il est, pour l'heure, le porte parole le plus inspiré et constructif.