Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

28 août 2007

Et bien, rentrons, maintenant

Je ne fais pas partie des "workoholics" qui aiment la rentrée et l'attendent avec impatience. Pour moi, elle signifie surtout que l'été (même pourri) touche à sa fin et ça me fiche le spleen.
C'est le moment, dans ces derniers jours d'août qui sont comme un sas, de reprendre contact, d'atterrir. En vacances, je ne lis plus les journaux comme autrefois, mais seulement des livres. Ma collection attendait donc. Comme à chaque fois ce qui me frappe le plus ce sont ceux qui sont partis. Une véritable hécatombe, cet été: Antonioni, Bergman, Serrault, Lustiger, Barre, Amouroux...Si on n'y prend garde, on peut, deux ans après, demander dans un dîner des nouvelles de tel ou tel defunt en s'étonnant qu'il ne tourne plus beaucoup ou qu'on ne l'entende plus dans les medias! Pour un journaliste, ça "marque" mal.
Et puis, aussi, la sortie du livre de Yasmina Reza, "L'aube, le soir ou la nuit" (quel titre!) qui a suivi le candidat Sarkozy presque 24 heures sur 24 pendant presque un an. Histoire d'une fascination. Quel coup d'image extraordinaire! On y apprend, si j'en crois les gazettes, que Mme Reza et M. Sarkozy éprouvent un commun mépris pour les journalistes qui ne "comprennent" rien. Il y a en effet beaucoup de sots dans cette profession, mais la généralisation est évidement injuste. On ne peut en effet imaginer plus anti-journalistique que cette démarche purement artistique, esthétique même. Mais pourquoi pas? J'y reviendrai, quand je l'aurais lu.
Comme près d'un million de Français, dont notre président, j'ai passé mes vacances-la plus grande partie en tout cas- aux Etats-Unis. On entendait parler français partout, y compris dans le coin le plus reculé de l'Arizona! Curieux pays en tout cas, où, en une heure d'avion on quitte les "rednecks" puritains, obèses et conservateurs de l'Utah pour les californiens body-buildés qui militent pour l'"empeachment" de Bush. Pays du service, où l'on se met parfois à deux pour vous vendre un sandwich et vous l'emballer, où l'on sent l'activité bouillonnante à chaque coin de rue, mais où vous pouvez croiser un SDF handicapé dormant sur une plage au pied de son fauteuil. Bref, avec tous ses excès, l'exact contraire de notre société d'assistance. Il ne saurait s'agir d'imiter les américains. Mais, ne pourrait-on, au moins, s'inspirer de leur conviction dans le fait que le travail est la source de tout, y compris de la dignité humaine? Cette conception va très loin, trop loin. Les Américains, surtout les républicains, sont persuadés que si l'Etat aide les gens qui en ont besoin, il y a trop de risque que d'autres imaginent des stratégies oïsives pour profiter du système, et que cela tire toute la société vers le bas, aux dépens des bosseurs. Il y a du vrai là dedans. Pas plus tard que deux jours après mon retour, je me trouvais au bord d'une plage (française) avec quelqu'un qui se flattait de toucher le Rmi qu'il cumulait avec un juteux travail au noir. Un sport national.
Je vois aussi que l'omerta sur la "rupture" introuvable de Sarkozy commence à se briser. Certains de ses amis, anonymement pour l'instant, commencent à s'impatienter, à regretter la timidité des premières réformes. Surtout, avec la crise immobilière aux Etats-Unis, plus personne ne croit que la croissance sera au dessus de 2%, et alors ce sera la cata. La lecture des pages économiques-très pessimistes-des journaux tranche de plus en plus nettement avec celle des pages politiques qui épargnent encore Sarko et en sont restées au recit glamoureux du couple élyséen, de ses vacances de "milliardaire". C'est la France!
Moi, ça ne me choque pas que Sarko profite de ses amis riches, pourvu qu'il tienne ses promesses. Or, pour l'instant, on voit surtout un changement de style. Un forme de parler-vrai, de lucidité bienvenue. On sent une volonté de reveiller le pays, mais encore peu de prise de risque et trop de soucis de la popularité. Le retour aux réalités sera violent et c'est pour bientôt.