Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

22 novembre 2006

Bush et le chemin de Damas

Une couverture de Time en 89: Baker, main de fer dans un gant de velour deteste perdre...

Mon attention est attirée par cette brêve de l'excellent site mediarabe.info: Un journaliste de l'agence officielle syrienne se serait renseigné sur l'assassinat de Pierre Gemayel auprès d'un journal libanais pro-syrien...près d'une heure avant les faits!
Cela semble signer le forfait.
Ce qui est le plus stupéfiant dans cette histoire, c'est bien sûr la coincidence de l'attentat contre l'héritier d'une illustre famille chrétienne avec la visite du ministre syrien des affaires étrangères à Bagdad et le rétablissement de relations diplomatiques interrompues il y a 26 ans. La Syrie revient dans le jeu, avec l'assentiment de Washington où James Baker, chef de file des "paléo-conservateurs", président du groupe d'étude sur l'Irak et opposant de la première heure de l'intervention est désormais l'homme qui compte. Ses préconisations ont été mises en musique avant même d'avoir été officiellement présentées au président: Appeler à l'aide la Syrie et l'Iran. Surtout la Syrie.
Un analyste néo-con comme Laurent Murawiec (Hudson institute) me confiait hier que la réponse des républicains et de Bush à leur défaite cinglante aux élections, avait été de capituler dans l'heure et sans conditions devant l'axe du mal. Cela s'appelle la fin du voyage pour ces intellectuels idéalistes venus de la gauche et qui avaient misé sur Bush-fils pour appliquer leurs théories en matière de politique étrangère.
C'était bien la peine, en effet, si c'était pour dérouler aussi vite le tapis rouge à tous les dictateurs de la région. Demain faudra-t-il s'accomoder d'un Iran nucléaire pour avoir la paix en Irak?
Cela démontre à nouveau la cécité américaine en matière de politique moyen-orientale. D'une certaine façon la recommandation des néo-conservateurs n'était pas incohérente: Un changement de régime en Irak sans aller aussi à Damas n'avait guère de sens. C'est aussi l'avis d'un "réaliste" comme François Géré qui était de passage, lui aussi, à France 24 hier pour un "pilote", une émission non diffusée (qu'il en soit encore remercié).
Mais alors combien de soldats fallait-il envoyer? Et les Etats-Unis ont-ils vraiment la capacité de se projeter partout en même temps? Les pays arabes agités de rivalités tribales, minés par la corruption ont-ils la larme à l'oeil lorsqu'on leur parle de démocratie, surtout si celle-ci commence par avoir l'apparence d'un GI? Ils veulent peut-être qu'on les débarasse de leur tyran (en tout cas en Irak), mais est-ce pour adopter le parlementarisme?
Il en va différement avec le Liban. Et là, le soutien au mouvement démocratique libanais, fait avec le consours de la France a été plus efficace. Hélas, les nouveaux maitres de Washington ont l'air prêts à abandonner le mouvement du 14 mars à son triste sort en échange d'un petit service syrien en Irak. Après tout, Bush père avait bien lâché les chiites irakiens après la première guerre du golfe, alors qu'il leur avait promis sa protection.
Si ce scenario noir devait se vérifier, ce qui n'est pas sûr compte tenu de la combativité et du courage incroyable montré quotidiennement par les anti-syriens du Liban, alors on pourrait bien très rapidement regretter le temps des "néo-cons".

18 novembre 2006

Homonymie

Je n'ai pas eu le temps de vous raconter comment j'ai failli être enrôlé au FN! L'histoire est amusante.
Mardi dernier, en pleine "bourre" de préparation de "pilote" à France 24, je reçois à quelques minutes d'intervalle, deux coups de fils de confrères de Libé et du Monde: "Est-ce vous qui étiez ce week-end à la fête des Bleu Blanc Rouge? (BBR la fête annuelle des lepénistes). certaines "sources" nous disent vous y avoir vu et nous font une description assez précise de vous." Diable! Me voici donc tout près de la disqualification. Je fais immédiatement le rapprochement avec Anthony Attal, un dirigeant de la Ligue de Défense Juive (contrairement à ce qui est écrit il n'en est apparemment pas le président). La presse a affirmé qu'il avait été convié avec Dieudonné à la fête du FN. Apparemment quelqu'un cherche à détourner le soupçon sur moi afin de sortir la LDJ d'un mauvais pas. Son représentant est-il tombé dans le panneau? Je n'en sais rien, et je n'ai aucun moyen de le savoir, ne connaissant personne dans cette organisation qui a assez mauvaise réputation. Mais il semble que l'on cherche à se servir de moi et cela ne me plaît pas. Il est vrai que j'aurais pu, tout au plus, me trouver sur place en tant que journaliste, sans que cela soit le moins du monde compromettant. J'ai "couvert" le FN pendant des années et le précieux privilège de notre métier est, précisément, de pouvoir fréquenter des personnes peu recommandables ou considérées comme telles. Mais l'histoire est tout simplement inexacte. Je sais gré à ces deux journaux d'avoir vérifié leur information. D'autres l'ont peut-être reprise sans prendre cette précaution.
Le plus drôle c'est ce que certains ont mis en avant pour accorder un fond de vraisemblance à tout cela: Puisque j'avais accordé, en juillet, une interview à la revue d'extrême droite "Le choc du mois", je pouvais très bien faire désormais partie de la "famille". Alors là, les bras m'en tombent....Quelques ayatollahs de la profession (mais aussi quelques amis abusés) se sont émus de voir que mon nom figurait dans cette revue qui, depuis qu'elle reparaît, adopte semble-t-il (ce n'est pas une de mes lectures régulières!) un ton plus modéré et une ligne davantage pluraliste. Surtout peu de gens ont pris la précaution de lire ce que j'y disais: Je tente d'expliquer les raisons de la désaffection-peut-être provisoire- des Juifs de France (en tout cas les proches de la ""communauté") avec la gauche, mais j'explique pourquoi, à mon avis, Le Pen ne pourra jamais espérer capter une partie significative du "vote juif", tout simplement parce qu'il incarne la nostalgie de la droite vichyste et antisémite. Mon interlocuteur a été très courtois et j'ai pu relire l'interview avant parution. Je n'ai rien à en retirer.
Que l'on puisse une seconde me soupçonner, pour cette raison, de me rapprocher en quoi que ce soit du FN est risible mais aussi révélateur d'un certain terrorisme intellectuel insupportable. Diaboliser, voire criminaliser, Le Pen et ses amis depuis vingt ans n'a servi qu'à le faire prospérer électoralement et à esquiver les "bonnes questions" (comme disait Fabius) qu'il posait, en y apportant, bien sûr, de mauvaises réponses.
Tant pis pour ceux qui estiment que je suis devenu infréquentable...

15 novembre 2006

Avenir du blog

Je remercie tous ceux qui m'ont fait part ici (et pas sur la plate forme 20 minutes...) de leurs encouragements et de leur soutien.
Je ne me sens pas visé particulièrement, je fais juste quelques constatations sur une mauvaise engeance évoluant sur le net.
Mon propos ne visait évidement pas ceux qui expriment ici des désaccords avec mes points vue. Qu'ils sachent que j'apprécie autant (si ce n'est plus...) leurs contributions que celles de tous ceux qui sont d'accord avec moi...
Il s'agit de tout autre chose. Il y a des choses très intéressantes sur le net et la multiplication des vidéos amateurs dans la campagne électorale en fait partie. A mon avis elles concourrent à la manifestation d'une vérité malheureusement trop souvent absente du discours politique, ce qui a beaucoup favorisé, à mons sens, le developpement des extrêmes.
Que la pratique du "off" soit moralisée et restreinte au strict minimum me paraît très souhaitable. Puisse les "pros" en prendre de la graine!
Quand au futur site de France 24, il sera très attractif et comportera en effet une plateforme blog, au moins pour les collaborateurs de la chaine...A suivre.

14 novembre 2006

Confidence d'un blogueur lassé

Ces derniers temps, je consacre une bonne partie de ma journée à France 24 et lorsque je rentre, souvent fort tard, j'ai en général peu de temps pour consulter vos messages et les mettre en ligne. Là, je viens de refuser trois commentaires hostiles à mon post sur Karl zéro, venant d'internautes intéressés par ce qu'ils appellent les "théories alternatives" sur le 11 septembre. Pour eux, je ne suis qu'un journaliste stipendié qui désinforme ou participe au grand complot pour cacher la vérité. Ou bien je fais partie de ces gens qui préfèrent le "confort de leurs certitudes". On est sur une autre planète. Aucun argument ne permet de se comprendre. C'est une impasse totale, car nous nous réclamons tous de la Raison mais n'en avons pas la même définition. Aujourd'hui, d'ailleurs il est vain de se réclamer du rationnel.
Je ne pense pas que ces gens soient dangereux. Je pense qu'ils sont paumés. Gravement.
J'ai aussi, c'est plus banal, refusé quelques messages de nature antisémite provenant des amis de Dieudonné. Je le fais machinalement. Mais ce qui m'inquiète c'est que lorsque je regarde comment la plupart des internautes atterrissent sur ce blog, je suis consterné. A 90% ce sont des recherches google qui contiennent le mot "juif" ou "sioniste". Ou des combinaisons autour de ces mots clés. La plus demandée étant de loin "Sarkozy+Juif". J'avais en effet consacré un post à Sarkozy "traité de sale juif" par des manifestants pendant les émeutes des banlieues l'année dernière.
Je suis transparent, vérifiez vous même
Quand je vois tout cela je m'interroge de plus en plus sur l'utilité de tout ce cirque.
J'en conclus qu'elle est voisine de zéro. Je pense que beaucoup de gens se servent de nous pour se donner de l'importance et je pense que vous me lirez de moins en moins ici.

02 novembre 2006

Comment peut-on être smicard?


Je signale ce post très interessant de Daniel Schneidermann, dans le Big Bang Blog. On n'en attendait pas moins de l'indispensable redresseur de tors du PAF: Dévoiler les débats internes d'"Arrêt sur image". Je ne suis pas surpris que certains journalistes soient égarés par une méfiance instinctive envers tout ce qui peut être de près ou de loin assimilé à "la droite". De ce point de vue, Sarkozy, mais aussi TF1 sont "de droite". Cela nourrit l'estime qu'ils ont d'eux-mêmes. La méfiance ne me gêne pas. Je dirais plutôt que le scepticisme est de rigueur dans notre métier, ce qui n'est pas à confondre avec la méfiance qui a une versant trop négatif. De toute manière la méfiance, ou plutôt, donc, le scepticisme professionnel, le recul ou la distance sont des attitudes bienvenues lorsqu'elles s'appliquent à tout le monde et pas seulement à la droite....Or, beaucoup de journalistes ont tendance à investir toute démarche, pensée ou action réputée de gauche d'un a priori favorable. Comme le dit Daniel l'enfer est pavé des meilleures intentions, et dans le cas qui nous occupe (les smicards comme "cible" potentiellement récupérable dans la campagne de Sarkozy), le procès facile que l'on peut faire à TF1 de vouloir influencer l'audience pour qu'elle soit plus receptive aux thèmes de l'ami de Martin Bouygues, empêche tout simplement de poser la seule question interessante, journalistiquement:
Peut-on envisager le retour vers l'emploi d'un nombre important de chômeurs dans un pays ou l'écart est si infime entre la situation matérielle d'un smicard et celle d'un inactif qui vit de revenus d'assistance?
Sarkozy pose ce problème et c'est mal vu à gauche, sauf par Ségolène Royal peut-être. Mais est-elle encore de gauche, vous répondrons aussitôt les belles âmes? Dans le temps, être "travailliste", c'était être de gauche, socialiste même. Il semble que la gauche rejette désormais ces valeurs et qu'elle ait trouvé avec les chomeurs une catégorie plus "prolétarienne" que celle des smicards.

Il y a chomeur et chomeur, mais aujourd'hui, il en est qui ont une vie plus agréable que celle des femmes de ménage ou des caissières. Il est faux de dire que tous les chomeurs font tout ce qu'ils devraient pour retourner à l'activité. Le système ne les encourage pas à se comporter autrement et, en "homo economicus", ils arbitrent en permanence entre leur situation et celle qui deviendrait la leur en cas de reprise d'une activité. Et c'est vite fait, la conclusion est qu'il vaut mieux ne pas devenir...smicard. Comment expliquer, autrement que par des préoccupations d'ordre moral supérieures, le fait que malgré celà les smicards préfèrent le rester plutôt que de goûter aux délices de l'oisiveté? Pourquoi la gauche est-elle devenue à ce point amorale, renonçant à récompenser l'effort et le mérite, au mépris de toute justice?