Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

20 octobre 2007

ADN, Guy Môquet, la gauche va dans le mur.

Bernard Henri Levy explique dans son dernier essai ("Ce grand cadavre à la renverse"-Grasset), qu'être de gauche c'est d'abord affaire de réflexe. J'aime bien cette idée, si elle veut dire rester en éveil, en alerte, se porter spontanément au secours d'une victime d'injustice. La Justice avant l'Ordre, LA leçon de l'affaire Dreyfus. Bien. Mais ça ne doit pas empêcher de réfléchir aussi. Or, je ne comprends pas l'attitude stéréotypée de la gauche dans l'affaire des tests ADN. Je dis tout de suite que cet amendement du député Mariani me parait être une ânerie. Je trouvais réducteur cette conception biologique de la famille, scandaleux qu'on opère une sélection par l'argent en prévoyant que le test était à la charge des candidats au regroupement familial, dangereux que les pères soient testés et que des secrets de famille puissent ainsi voler en éclat. Mais je n'ai jamais compris le pilonnage de la gauche sur "le rappel des pires heures de notre histoire", des rafles de Juifs, l'accusation de fascisme, d'eugénisme, et j'en passe. C'était un amendement réac qui a été totalement vidé de son contenu et qui peut même éventuellement permettre de lever des soupçons, donner un coup de pouce à des dossiers qui sont aujourd'hui rejetés parce que les autorités administratives n'ont pas confiance dans les documents d'état civil présentés. On a même prévu que ces tests devaient être effectués sous le contrôle d'un magistrat. Ce n'est quand même pas la peine de convoquer Vichy, en un réflexe pour le coup très pavlovien.
Et que dire aussi du refus de certains profs (de gauche on l'imagine) de lire aux élèves la lettre de Guy Môquet? Uniquement parce qu'ils n'encadrent pas le Président qui en a décidé ainsi? On le craint. Ils évoquent leur souci de ne pas être politiquement manipulés, récupérés, instrumentalisés. De quelle manipulation s'agit-il? Le martyr du jeune Guy Môquet est un symbole qui a ému Sarkozy et qu'il veut donner en exemple aux jeunes collégiens et lycéens. Bien sûr, les profs ne sont pas de simples fonctionnaires aux ordres, qu'il ne faut pas s'arrêter là et qu'une explication s'impose ensuite dans laquelle les enseignants peuvent faire leur boulot. Par exemple rappeler le rôle du PCF entre 1940 et 1941? Pourquoi pas. Et si c'était cela qui les gênait? A moins qu'il ne s'agisse que d'un pur réflexe sectaire. Touche pas à mon Guy Môquet. Pourtant il y aurait beaucoup à dire autour du destin de ce jeune homme victime du totalitarisme français (Là dessus BHL a raison de relever les erreurs historiques commises Sarkozy), choisi par Vichy-le vrai Vichy pas celui que fantasme notre gauche- pour le peloton d'exécution après un attentat anti nazi, simplement parce qu'il était communiste et fils de communiste, et pour épargner d'autres Français "innocents". Vous croyez que ce n'est pas universel et actuel comme histoire, et que ça ne mérite pas d'y consacrer une heure dans les écoles?

17 octobre 2007

Le facteur Cécilia

Où est Cécilia? Cécilia, partie. Hors du nid. La presse people et politique est en pleine ébullition depuis quelques semaines. Pomponette (c'est ainsi que les paparazzi l'ont surnommée) est passée par ici (Genève), elle ne repassera pas par là (Maroc). Et pendant ce temps là, le Président se tait, semblant avoir brutalement perdu son allant. Et chacun de se demander quand et comment tout cela va finir, depuis, il faut le dire, l'incroyable épisode du vote "séché" au second tour de la présidentielle. Mais bon, qui aujourd'hui peut dire que son propre couple, sa propre histoire seront éternels? Ici, ce qui contribue à dramatiser c'est à la fois la "première" (un Président qui divorce pendant son mandat) et aussi le fait que l'on sente Super-Sarkozy, l'hyper-président réellement hyper fragilisé sur cette question. N'a-t-il pas lui-même avoué avec la franchise qui caractérise ses interventions que son seul soucis était Cécilia? Les "no comment" à répétition du porte-parole de l'Elysée, David Martinon en disent long également sur l'embarras dans lequel est plongé le Président et son entourage. Au fond, c'est comme si aucun sujet, aucun défi (l'Iran, Poutine, Trichet, les régimes spéciaux et les syndicats, etc...) ne faisait peur au Président, sauf celui-là. Peut-être espère-t-il encore un nouveau revirement de son épouse qui parait bien-il n'y a aucune information même "off" sur ce sujet-davantage déterminée, ironiquement, à pousser à cette rupture. Il faut rappeler d'ailleurs ce qu'en dit le constitutionnaliste Guy Carcassonne: L'immunité dont jouit toujours le Chef de l'Etat pendant la durée de son mandat vaut aussi pour les affaires civiles. Puisqu'il peut ne pas répondre à la convocation d'un juge aux affaires matrimoniales, il peut très bien, s'il s'obstine, empêcher le divorce! Gageons qu'il ne devrait pas adopter une telle attitude, mais-l'amour aveugle-sait-on jamais?
Le coup dur pour Sarkozy est que ce soucis arrive en même temps que les premiers nuages politiques, les conséquences des difficultés budgétaires, les infirmières bordelaises, qu'il est plus difficile à combler que leurs homologues bulgares...ce qui permet au Nouvel Obs de titrer sur "l'Octobre noir". Si ce n'est que le mois d'octobre...
L'opinion ne va pas changer d'avis sur Sarkozy parce que tout d'un coup il se retrouve célibataire. La vraie question porteuse d'éventuelles conséquences politiques est la suivante: Qui dit rupture dit souvent trahison. Lequel des deux, s'il y en à un(e), parviendra donc à passer, aux yeux du public, pour la victime?
PS: Voici un premier indice. L'Elysée commence à suggérer que l'attitude de la première dame commençait à "perturber le fonctionnement" de la Présidence de la République.

09 octobre 2007

Le fossile et le marteau



Il ne faut surtout pas manquer ce débat de France 24 : « Le Che, saint ou bourreau? ». Le Che est mort il y a 40 ans, mais « le mur de Berlin ne s’est pas effondré sur lui » dit joliment Jean Ortiz, auteur de « Che plus que jamais », ouvrage collectif et, comme son nom l’indique, hagiographique consacré à la pensée et à l’actualité du commandante. Tout est là. Pour la gauche radicale, extrême, mouvementiste, gauchiste, altermondialiste etc…à laquelle s’adjoignent tardivement les lambeaux du Parti communiste…Le Che, c’est le marxiste léniniste qui ne veut pas mourir. L’idéologie et son cortège de crimes a beau s’être effondrée partout, sauf précisément à Cuba et en Corée du Nord, la survivance du mythe Guevara porte en elle la promesse que l’histoire peut toujours se répéter. Que l’ Amérique latine fera mentir le proverbe. Tous ensemble vers un nouveau grand soir dans ce continent victime par excellence de l’impérialisme yankee ! Le communisme est mort, vive le communisme ! Et si l’on fait remarquer que Cuba n’en finit pas d’agoniser, Ortiz, modèle de communiste fossilisé, martèle que « Cuba est dans une phase de transition vers le socialisme ». Une transition qui a tendance à durer. L’inquiétant c’est qu’avec lui, l’histoire se mettrait à bégayer sans avoir rien appris des errements passés. Dans le numéro hors-série de l’Huma consacré au Che, pas un article sur la « face cachée du Che » révélée par le livre éponyme de l’opposant cubain Jacobo Machover : pas la moindre trace des témoignages de ses anciens frères d’armes (« Il tuait comme on avale un verre d’eau »), des procès expéditifs, des exécutions sommaires d’anciens batististes, mais aussi d’innocents choisis presque au hasard, pour l’exemple, parfois seulement parce qu’ils portaient l’uniforme de la police. Comme Rafael Garcia, 26 ans, injustement accusé de l’assassinat d’un membre du mouvement castriste du 26 juillet, et que le Che, superviseur de l’épuration au lendemain de la révolution, envoya au peloton d’exécution tout en le sachant innocent.
La dernière lettre de Garcia a sa jeune épouse en rappelle une autre, celle de Guy Môquet : « Mon amour adoré, ceci est la dernière lettre de ma vie. Nos quatre mois de mariage furent les plus beaux du monde. Je suis fier de ma famille. Je vous aime à la folie. La seule chose qui me peine est que je meurs innocent. Je dois te laisser mon amour, car je crois qu’ils viennent me chercher. Rendez-vous dans l’autre vie ou nous nous retrouverons, ma chérie. Rafael. » Aucune révolution, aucune épuration ne se fait sans drame. C’est précisément pour cette raison que la gauche anti-totalitaire parvint à la conclusion que la révolution n’était, tout compte fait, pas souhaitable. C’était avant les révolutions « de velours » à l’Est de l’Europe qui se libérait tranquillement du communisme. Mais comment peut-on encore parler aujourd’hui, comme le fait Patrick Le Hyarrick, le directeur de l’Humanité de « l’humanisme de Che Guevara » ? Amusant, d’ailleurs, de voir comment les communistes français aux abois tentent de récupérer aujourd’hui le mythe, en soulignant la « fraicheur » et « l’éthique » (sic) marxiste du médecin argentin qui fut décrété « cubain de naissance » par le régime castriste. A deux ou trois reprises, en effet, Guevara n’avait pas ménagé le Komintern . Moscou, et en France le camarade Maurice Thorez, se méfiaient il faut le dire beaucoup du guérillero excité de la Havane (Castro aussi, à la fin, qui l’envoya se faire tuer ailleurs, ce qui fut fait). Aujourd’hui, l’Huma encense le Che, en escamotant ses crimes et en prenant ainsi le risque de reproduire les mêmes erreurs qu’avec ceux du stalinisme, reconnus après la bataille, sous la pression des évènements. Oui, décidément, le (grand) cadavre bouge encore…

04 octobre 2007

Le Rafale, un désastre national

Le tacle du ministre de la défense Hervé Morin contre l'avion Rafale a causé la stupeur chez Dassault. Dans "Argent Public" nous avions, dès 1999 souligné la folie de cette aventure, à coup de subventions publiques, en remarquant déjà qu'aucun pays ne voulait nous acheter cet appareil ultra-sophistiqué, quand de l'autre côté nos partenaires européens mettaient au point ensemble l'Eurofighter dont l'Arabie saoudite vient de commander 72 unités. On voit ce qui reste aujourd'hui de cet entêtement dans l'orgueil national et le rêve de grandeur: L'Etat français lui-même s'apprête à réduire ses propres commandes, faute de moyens. Pour qu'un ministre tire ainsi sur un tel symbole national (les emplois etc..), c'est que nous n'avons plus guère de choix. Il n'y a là rien de réjouissant, mais j'ai ressenti une sorte de satisfaction rétrospective. A l'époque, la réaction de Charles Edelstenne, le patron de Dassault avait été des plus violente. Pas sur le plateau de l'émission, ou je lui avais posé des questions précises appuyées sur notre enquête, mais en coulisse. Des années plus tard, je me suis rendu compte que j'étais encore tricard chez Dassault. Passé sur une autre chaine, je devais animer un débat au salon du Bourget. Dassault fit savoir qu'il n'y participerait qu'avec un autre modérateur. J'étais considéré comme un ennemi! Evidemment, la chaine en question m'a demandé de m'effacer et je n'ai pas souhaité faire un esclandre. Tels sont nos moeurs journalistiques...
J'éprouve pourtant de la fierté pour ce que nous avons réalisé dans cette émission.