Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

30 septembre 2005

Quand les urgences de Cochin ne répondent pas

Quelques explications pour les lecteurs assidus de ce blog, pour expliquer cette longue (8 jours) interruption de mes notes. Dimanche dernier, de retour du jardin du Luxembourg, j'ai fait une mauvaise chute en rollers et je me suis fracturé le col du fémur. "Sport de jeune, blessure de vieux", a, assez bien résumé une amie! Il faut dire que je prête le flanc (ah! ah!) aux mises en boite. Ok, je n'avais jamais fait de patin à roulettes de ma vie, et, impétueux, j'avais récemment décidé de m'y mettre, avec mon fils de 7 ans et demi. Le coup classique: j'ai d'abord été excessivement prudent, puis je me suis laissé griser par mon aisance aussi nouvelle que surprenante dans cette discipline qui m'a toujours attirée. J'ai pris une (petite) descente, ce qu'évidement je n'aurais jamais du faire. Et, alors que j'étais pratiquement rentré chez moi, vlam! Le gadin magnifique, de tout mon poids sur le bitume. Pompiers (service trois étoiles, les gestes, les mots qu'il faut etc...), puis les urgence de Cochin. Là, dans la salle d'attente, j'avais à peine commencé à méditer sur cette tuile (je devais commencer le 18 heures de Public sénat le lendemain), que les choses commençaient aussitôt à se compliquer pour l'usager de base du système-de-santé-éblouissant de M.Chirac que je suis. Les urgentistes de l'hôpital Cochin,, après m'avoir annoncé la mauvaise nouvelle (optimiste incorrigible, je pensais m'être seulement luxé la hanche), me disent qu'ils ne peuvent pas m'opérer avant au moins 36 heures et me proposent un transfert vers la clinique B. Ils m'avaient déjà fait le même coup pour un panaris, il y a environ deux ans. J'avais alors pensé que mon cas n'était pas assez sérieux pour l'un des hôpitaux les plus réputés de France, particulièrement en orthopédie. J'en étais ressorti avec un ordonnance d'Héxomédine Trancutanée et une feuille de route vers la même clinique B. où opèrent un certains nombre de chirurgiens de Cochin. Mais, là, je me voyais quand même assez mal barré pour un nouveau tourisme hospitalier avec une fracture que je ne souhaitais pas laisser traîner. L'interne a quand même ajouté que si je connaissais un chirurgien ailleurs, il ne voyait pas d'inconvénient à me transférer, même à Pétaouchnoque, si tel était mon bon plaisir. Ayant une préférence pour les hôpitaux dès qu'il s'agit d'opération sous anesthésie générale, me voilà, pendu à mon portable, toujours allongé sur ma civière, lutant contre la douleur, et en train d'essayer de joindre, un dimanche, tout ce que mon carnet d'adresse compte de sommités du corps médical. Finalement, après plusieurs avis tous contradictoires, j'optai pour l'Hopital Saint-Antoine, ou j'étais attendu, puis opéré dès le lendemain et traité comme...un être humain pendant 6 jours par une équipe dont le savoir faire et la disponibilité m'a, en effet "ébloui". Et je n'ai bénéficié d'aucun traitement de faveur puisque mes "collègues" d'infortune furent traités avec les mêmes égards. Une infirmière m'a même fait un shampooing sur mon lit hier soir! Je les remerce tous au passage.
Deux conclusions s'imposent:
1: J'ai de plus en plus de soupçons sur le fait que l'hopital Cochin fait tout ce qui est en son pouvoir pour arrondir le chiffre d'affaire d'une clinique privée ou exercent une partie de ses chirurgiens.
2: Il va falloir que je trouve autre chose que le roller pour avoir l'air de rester jeune. Si vous avez des idées...
Bon week-end quand même!

22 septembre 2005

Pétrole contre nourriture: pudeurs françaises


L'instruction du volet français de l'affaire "pétrole contre nourriture" avance à grand pas sous la conduite du juge Philippe Courroye. Hier, Claude Kaspereit, fils de Gabriel, ancien pilier du système parisien de l'époque chiraquienne, a été mis en examen. Il aurait bénéficié de 8,5 millions de barils de brut irakien revendus ensuite avec plusieurs millions de dollars de bénéfice.
Le 11 septembre dernier, celle de Serge Boidevaix, pour "trafic d'influence et corruption" a bien failli passer inaperçue. L'AFP l'a présentée comme celle d'un "ancien diplomate français." Comme s'il s'agissait d'un simple fonctionnaire du rang! Or, Boidevaix est, excusez du peu, un ancien secrétaire général du quai d'Orsay formé à l'école de Michel Jobert. Lui aussi est un membre du sérail chiraquien. Il fut le conseiller diplomatique de Jacques Chirac de 1974 à 1976, à la grande époque d'Osirak, celle ou le jeune occupant de Matignon était tombé sous le charme d'un non moins jeune vice-président irakien du nom de Saddam Hussein. Boidevaix est aussi un proche de Maurice Gourdeau Montagne, actuel conseiller diplomatique du chef de l'Etat. Voilà qui ne suffit pas à affirmer que Chirac est mouillé dans "Pétrole contre nourriture", mais au moins peut-on émettre l'hypothèse d'une implication possible de l'Elysée.
Boidevaix, reconverti dans le monde des affaires, est bien un ancien directeur de la chambre de commerce franco-arabe, c'est un intime de Tarek Aziz. Cela fait beaucoup de raisons pour lesquelles le pouvoir irakien de Saddam pouvait juger utile de le récompenser. Boidevaix s'est vu attribué, lui, plus de 32 millions de barils! En a-t-il ensuite fait profiter ses mentors politiques de cette manne? La question mérite, me semble-t-il, d'être posée avec un peu plus d'insistance.

En cherchant des informations sur Boidevaix, je suis tombé sur un excellent blog intitulé "politique arabe de la France", qui retrace complètement la carrière de l'ancien diplomate.
Voyez aussi comment l'agence reuters a traité l'information en soulignant correctement, elle, la qualité du mis en examen

19 septembre 2005

Premier jour au Sénat

Journée de prise de fonction à Public Sénat aujourd'hui. Mes fenêtres donnent sur le jardin du Luxembourg. Il y a pire comme environnement.
Attrait de la nouveauté, intérêt aussi pour la participation à l'encadrement d'une équipe jeune et motivée par la politique. Bref citoyenne. Elle donne une autre image de ce métier ou l'apparence et la course au vedettariat ont tendance à l'emporter sur les "fondamentaux". Je pense que ce pari peut-être gagné. Un signe: j'ai appris que le talk show de Fogiel sur France3 était en chute brutale (et irrémédiable) d'audience. Je crois vraiment que ces émissions sont condamnées aux gloires éphémères. Tant mieux. Même si Fogiel lui même fait preuve d'une certaine ténacité dans ses interview, que l'on aimerait voir chez d'autres journalistes encartés, il tombe un peu trop souvent dans la posture du pitbull. Attendons janvier pour que la nouvelle équipe de France télévision dévoile ses intentions.
Et puis il y a la nouvelle tranche d'info de 18 h qui sera à l'antenne la semaine prochaine.
Retrouvailles aussi avec l'équipe de Proche-Orient. Info qui lance une souscription en vue de reprendre son activité. Sympathique et chaleureux de retrouver l'équipe qui donnera bientôt de ses nouvelles. La souscription est encore ouverte sur le site. C'est important.

14 septembre 2005

Ségolène Royal s'essuie les escarpins sur le Sénat


Je suis en colère. En colère contre Ségolène Royal. A peine avais-je signé mon contrat avec Public Sénat que Madame Royal déclarait qu'il fallait supprimer le Sénat. Pourquoi subitement? D'autant que, franchement, c'est un sacré serpent de mer, De Gaulle lui-même y avait déjà pensé, avec le succès que l'on sait. S'agit-il d' une attaque personnelle? Je me suis posé la question.
Ségolène Royal a tout à fait le droit de demander la suppression du Sénat, des départements, de la fête des mères, du Beaujolais nouveau, des prix littéraires, des reality shows etc...Ce qui me met en colère c'est qu'elle le demande pour des raisons politiciennes, c'est à dire pour tacler (par derrière) son rival régional Raffarin qui entend faire son retour dans la haute assemblée, et en briguer la présidence. En cas d'empêchement de Chirac, il pourrait alors lui succéder, même temporairement. Amusant non? Mais n'allons pas si vite en besogne. Le" Pompidou du Poitou" (quelle trouvaille!) n'en est pas encore là.
Et bien j'ai le regret de dire à Mme Royal qu'elle a tort. Et pas seulement parce que je pense qu'une institution qui m'emploie a largement justifié son utilité (!). Je suis prêt à apporter la démonstration du caractère indispensable du Sénat. Même si l'on est en droit d' estimer que le mode de désignation des sénateurs (qui a déjà beaucoup évolué vers plus de représentativité) peut encore évoluer, et que la durée du mandat devrait être réduite. Un seul fait, afin de ne pas être trop long, sur un sujet qui, je le sens bien ne vous passionne pas: Dans un monde de plus en plus mercantile, où les puissances économiques sont en mesure de dicter leur loi aux citoyens, il est pour le moins surprenant, pour ne pas dire suspect, qu'une élue de gauche veuille supprimer une institution qui représente le peuple, ne rend de comptes à personne d'autre et contrôle l'exécutif de façon parfois plus approfondie que l'Assemblée Nationale.
Quant à moi, j'en suis arrivé à la conclusion qu'avoir pour employeur l'une des deux chambres parlementaires- qui n'a à vendre que des rapports difficiles à lire- ce n'est pas plus honteux ou compromettant que d'être salarié de marchands de canons ou de béton.

13 septembre 2005

Ramadan à Blair: Supprimez la journée de la Shoah!


La nomination récente de Tarik Ramadan comme conseiller de Tony Blair avait de quoi intriguer. La première idée de ces nouveaux conseillers issus pour la plupart de la communauté musulmane britannique dépasse toutes les craintes: Invités à faire des propositions pour lutter contre l'émergeance d'une génération de terroristes "home made" et "home grown", ces messieurs, si l'on en croit cet article du Sunday Times, estiment que Tony Blair devrait commencer par supprimer la journée de commémoration de la shoah. Parce que, disent-ils, elle offense les musulmans de Grande Bretagne. A la place, il conviendrait, si on les suit,d' instituer une journée de célébration de tous les génocides, parmi lesquels (ou plutôt surtout) le "génocide palestinien". Du Ramadan tout craché.
En vérité, par cette proposition, les nouveaux conseillers de Tony Blair font la démonstration par l'absurde et à leur corps défendant que l'Islam ne comprend rien à l'histoire européenne (faudrait-il dire à l'histoire commune de l'humanité?) et à la place à part qu'y occupe la Shoah. Bref Blair est là face à la quadrature du cercle communautariste.

11 septembre 2005

Quatre ans après


Quatrième anniversaire des attentats. J'ai apprécié l'analyse de Mark Danner tirée de son livre dans un article du Herald Tribune (je sais, deux citations en deux jours c'est limite pédant mais c'est devenu mon journal préféré.)
Je la trouve néanmoins faible sur un point. On peut soutenir que l'intervention en Irak a sucité des vocations de jihadistes par centaines. Il me semble que ce qui a le plus alimenté la mystique du kamikaze islamiste et favorisé les recrutements c'est l'audace des attentats eux-mêmes, la diffusion en boucle, névrotique, des images des tours en flammes. Cette démonstration, enfin faite aux yeux su monde entier, que l'Amérique n'était pas invincible avait de quoi transformer dans le monde arabe les frustrations en une determination farouche à infliger le plus de mal possible à l'Amérique. On comprend mieux la necessité pour l'Amérique de réagir vite et fort, quitte à obliger l'ennemi à livrer le combat sur un champ de bataille. Ce sera l'Afghanistan, puis (trop?) rapidement l'Irak.
Ce qui reste le plus regrettable dans cette affaire: Que le travail n'ait pas été terminé en Afghanistan, le mensonge des ADM bien sûr, et enfin, c'est lié, l'absence de coalition internationale et un mandat de l'ONU pour renverser Saddam Hussein
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10 septembre 2005

Philip Roth Canonisé de son vivant

Philip Roth vient de voir son oeuvre distinguée en entrant au catalogue de la prestigieuse "Library of America", sorte de Panthéon des lettres américaines. Un privilège d'ailleurs presque toujours réservé aux écrivains disparus, comme nous l'apprend cet article de Charles Mc Grath dans le Herald Tribune. Je me demande ce qu'attends son éditeur pour traduire et publier le dernier opus de Roth, "A plot against America" (un complot contre l'Amérique), paru il y a presque un an.
Dans ce roman, Roth depeint les drames d'une famille juive du New Jersey entre 1940 et 42. Il imagine les conséquences qu'auraient pu entrainer la nomination par les Républicains de Charles Lindbergh comme candidat contre Roosevelt. Antisémite déclaré, ouvertement isolationiste et pro-nazi (à la différence de Wendell Willkie, le candidat que choisirent alors les républicains), Lindbergh, héros national, l'aurait, dans le climat de l'époque, emporté sur l'homme du New Deal. C'est en tout cas l'hypothèse de Roth. Devenu Président, Lindbergh signe alors un traité d'amitié avec Hitler et laisse se développer une vague d'antisémitisme aux Etats-Unis. Sous pretexte que les Juifs sont accusés de ne pas être assez fondus dans la culture américaine, l'administration de Lindbergh encourage tout ce qui peut les arracher à leurs quartiers de prédilection, en envoyant par exemple leurs enfants dans des familles d'agriculteurs du Middle West, ou en organisant des mutations professionnelles.
Pendant ce temps, Hitler tisse tranquillement sa toile en Europe, assuré de ne pas entrer en guerre contre les Etats-Unis.
L'Amérique heureusement, réussira finalement- grâce à des hommes comme La Guardia, le maire de New York- à racheter son âme...

09 septembre 2005

Enorme: Chirac réapparaît!



Chirac est sorti du Val de Grâce! Il était temps les médias commençaient à se poser des questions sur sa disparition totale du paysage depuis près d'une semaine. Pour quelqu'un qui était censé marcher et travailler dans sa chambre...
Et à la sortie quoi? Rien ou presque. Pas un mot, pas une question, évidement, sur sa santé. Chez nous, les journalistes-et encore, triés sur le volet- ont le droit de poser des questions au Président une fois pas an, le 14 juillet. Le reste est à discrétion. Trois minutes de discours de sous-préfecture crispé sur l'excellence du système hospitalier ("aussi bien au plan humain qu'au plan technique." Ah, ce qu'il aime ressembler à sa caricature notre Chi!"). Du reste qu'est-ce que Chirac a bien pu en voir du "système hospitalier", dans sa chambre présidentielle du VDG? On devine quand même que la nourriture était passable car Chirac semblait nous dire: "J'ai hâte d'aller manger un vrai truc". Et ce "Chez moi" pour parler de l'Elysée dont il n'est qu'un hôte de passage (long passage, d'accord), cela faisait un peu propriétaire non?
Alors faute d'info, disons ce que l'on a cru assez nettement déceler: une raideur évidente dans le côté droit, perceptible tant dans l'oeil (torve) que dans la démarche, très peu assurée.
Voilà à quoi, journaliste ou pas, on en est réduit. Il paraît qu'au pays des aveugles...
Compte tenu des pouvoirs qui sont les siens, ne serait-ce que celui d'appuyer sur le bouton nucléaire, ne sommes-nous pas en droit de demander la transparence sur la santé du Président. Ah le grand mot de transparence. Ce n'est pas une curiosité maladive, une manifestation de la tyrannie démocratique. Seulement je ne m'en remets toujours pas que, pour être informé de la santé de Mitterrand en 1981, il fallait être abonné à Minute!
Dans le cas présidentiel, l'application de la loi sur le secret médical est simplement une incongruïté. Le Président devrait être contraint à des examens réguliers et sincères qui devraient, au minimum, comme le suggère Olivier Duhamel, être soumis au Président du Conseil Constitutionnel.

08 septembre 2005

Dieudonné ou l'antisémitisme au second degré



La confirmation, en appel, de la relaxe de Dieudonné pour son sketch antisémite conforte ma conviction que ces affaires ne gagnent rien, sauf les agressions physiques, à être portées devant les tribunaux.
Comprenez bien:
1/ Je pense que Dieudonné n'est pas seulement antisioniste et anti-israélien, comme le prétendait ce matin encore une journaliste d'une radio de service public qui ne parvenait pas à masquer son soulagement. Il est bel est bien antisémite et même dangereusement, puisqu'il à l'ambition, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, de fédérer autour de lui, sous habillage humoristique, un parti antisémite. Ses réunions publiques sont ses spectacles ou on se marre bien sur le dos des juifs, en toute bonne conscience donc puisque c'est pour rire. Ben voyons...
On pourrait parler d'un antisémitisme de second degré, comme il y a dans le droit pénal anglo-saxon des homicides de premier et de deuxième degré. Or nos tribunaux, nos juges, ne disposent pas des outils conceptuels et juridiques nécessaires pour trancher ces affaires. Notre arsenal de lois antiracistes, déjà l'un des plus répressif qui soit, n'est ni efficace ni adapté et ne le sera jamais sauf à apparaître encore plus comme une atteinte à la liberté d'expression. Tout simplement parce que les propos antisémitisme au premier degré sont devenus extrêmement rares. L'antisémite au premier degré a compris qu'il serait infailliblement condamné, donc il se doit de présenter différemment ses prises de positions. D'utiliser "l'understatement", la litote..ou le rire qui n'est pas la même chose que l'humour, comme chacun devrait le savoir.
Le registre de l'antisionisme total lui fournit un contexte idéal pour être compris par son auditoire (déjà acquit) à son antisémitisme, sans s'exposer à des représailles juridiques.
Dieudonné est un cas limite. En faisant mine de se retrancher derrière la licence de l'humoriste il profite d'une jurisprudence constante. Pour les tribunaux on peut rire de tout. Ils ont raison d'ailleurs, mais comme disait Pierre Desproges, pas avec n'importe qui. C'est là ou Dieudonné est plus que douteux. Le fait que la présidente de la cour se soit sentie obligée d'assortir son arrêt de relaxe par un jugement moral montrant qu'elle réprouvait Dieudonné est à la fois regrettable (la morale ne devrait rien à voir là dedans surtout quand il est flagrant qu'elle contredit instantanément une lecture du droit) et montre le désarroi des juges face à ces affaires.
2/ Si ce n'est pas à la justice de condamner Dieudonné, c'est la société, notamment ses médias qui devraient le faire. Pour le coup au nom de la morale et en prenant enfin conscience de nos responsabilités face à un politicien manipulateur. Aucun animateur de télévision ne devrait l'inviter. C'est à peu près le cas, me semble-t-il, depuis le début de cette polémique. Mais il y a fort à parier que Dieudonné se servira de cette nouvelle relaxe pour conforter sa paranoïa victimaire ("je suis victime d'un complot, d'un acharnement") et comme une autorisation pour continuer son oeuvre nuisible. Certains animateurs de talk Show ne tarderont pas, en ce qui les concerne, à refaire venir sur leur plateau un homme sulfureux qui vient d'être blanchi (pardon du jeu de mot) par la justice. Qui pourra encore le leur reprocher?
Le ton du papier de France Culture ce matin, en était un début d'illustration. A suivre avec l'affaire Edgar Morin qui a su mobiliser en sa faveur le monde intellectuel.
S'en remettre à la justice pour s'exonérer de ses responsabilités morales et politiques est un très mauvais signe. C'est celui que donne les médias mais aussi les inconditionnels de la judiciarisation de ces affaires. Le combat se mène ailleurs que dans les prétoires.

06 septembre 2005

L'Amérique malade. La France léthargique

L'Amérique est à la fois hyperpuissante et malade. La catastrophe humanitaire provoquée par Katrina nous montre la première puissance mondiale, incontestée et pourtant totalement démunie comme une vulgaire nation du tiers-monde. Tout dans les images du drame évoque cela, de la couleur de la peau des victimes, jusqu'au sauveteurs terrorisés, obligés, souvent, de jeter des rations du haut des hélicoptères, en se protégeant des gangs par des fusils à pompe.
Il est bien possible que l'opinion américaine, déjà en train de basculer au sujet de l'Irak mette à profit cet électrochoc pour se décider à soigner ses propres blessures. "
Que sommes-nous devenus si nous ne savons plus nous occuper de nous-mêmes?", écrit par exemple Maureen Dowd, en conclusion d'un éditorial du New York Times d'une extrême sévérité sur l'incompétence de cette administration.
On aurait pourtant tort de se réjouir par avance, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, d'un retour à plus d'isolationnisme, car, me semble-t-il, le monde a encore besoin des Etats-Unis, pourvu qu'ils soient dirigés par quelqu'un d'autre que Bush.
Face à cette Amérique en pleine détresse, il est extrêmement choquant de voir la France, son peuple, ses médias, qui s'étaient montrés si prompt dans la compassion au moment du Tsunami, pratiquement silencieuse. Certes, les offres d'aide étrangère sont rarement dénuées d'arrière pensées. Qu'il s'agisse des Russes, des Cubains, des Vénézuéliens, ou de certains pays musulmans, il y a là une façon de rappeler à bon compte à l'Amérique qu'elle est plus fragile qu'elle ne le pensait et qu'elle ferait bien de considérer le reste du monde avec un peu moins d'arrogance.
On pouvait espérer de la France,qui a une telle dette envers les Etats-Unis, un geste désintéressé, plus spontané, qui aille surtout au delà de la dizaine de volontaires de la Croix Rouge envoyés en Louisiane où la France a pourtant laissé une emprunte culturelle, même si elle s'est sédimentée. Ou sont les campagnes, les appels aux dons pour les centaines de milliers de réfugiés américains qui ont perdu le peu qu'ils avaient? Rien. Un silence affligeant, une indifférence, au mieux, que je ne peux expliquer autrement que par le niveau inquiétant atteint par cette vieille passion française qu'est l'anti-américanisme: "
Ils n'ont qu'à s'occuper de leurs pauvres au lieu d'envoyer leurs troupes en Irak. Ça leur apprendra!" Voilà ce que l'on croit entendre dans les chaumières. Un Américain, même noir, de l'Alabama vaut-il moins qu'un indonésien de Banda Ace? Où bien, terrible hypothèse, le mouvement de solidarité du début d'année s'expliquait-il par le nombre de Français, d'occidentaux, qui ont péri en Asie et ne sont pas rentrés de leurs vacances?
J'ai quand même noté, je le note pour la bonne bouche, la proposition d'aide venant de la ville d'Orléans. Est-ce un message codé, une clauque, des vieux européens, des vieux orléanais, en direction de Rumsfeld qui avait ironisé sur la mollesse de la vieille Europe? Sur le dos des pauvres sans-abri de la Nouvelle-Orléans? Je pense à cette chanson de Sardou un peu triviale, mais de circonstance: "Si les ricains n'étaient pas là..." Mais pour les moins de vingt ans tout ça est bien loin.

Affligeant également, le désintérêt manifeste de la presse française pour l'accident de santé de Chirac. Elle s'est, dans l'ensemble, contentée des communiqués officiels, quand on voulait bien lui en distiller, s'interdisant de poser les questions élémentaires sur la capacité de Chirac à diriger la France, dans ces temps difficiles, en pleine possession de ses moyens. 48 heures après la nouvelle est déjà reléguée en page intérieure, bien après l'augmentation du prix de l'essence. Cette apathie consterne venant d'une profession malade du conformisme et à la bienséance à laquelle on a continuellement menti sur cette question, ne serait-ce que par omission. Comment s'étonner, après ça que les français rechignent à payer 1€ (au moins) pour acheter un journal!

Pour ceux qui souhaitent aider les sinistrés américains, le Herald tribune donne quelques pistes