Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

20 juin 2008

Ne tirez plus sur Hortefeux!

Brice Hortefeux trimbale une sale réputation. Surtout depuis qu’il a accepté d’être le premier ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement. (cette dernière attribution étant devenue depuis les municipales « développement solidaire », ce qui sonne mieux. Il faut dire qu'aux yeux de certains professionnels de la vigilance, créer un ministère de l’immigration était déjà céder à la lepénisation des esprits. Mais alors, lui accoler « l’identité nationale », là, ceux qui "s’y connaissent" voyaient assurément le retour de Vichy et de la milice. Hortefeux ne valait guère mieux qu'un héritier de Darnand.
Il n’est pas toujours mauvais d’être un mal aimé. Impopulaire presque par vocation, il ne risquait pas d'advenir à nore ministre les mêmes mésaventures qu'à son maître politique, Nicolas Sarkozy: Point de de temps à perdre en vaine tentative de séduction du microcosme, il restait seulement à travailler pour mettre en œuvre la première politique d’immigration digne de ce nom. Car l’invocation abusive du vilain passé français n’était pour les gens "aux idées larges" qu’une argutie pour de nier l’évidence : l’immigration est un défi économique, social et même stratégique pour toutes les nations, aussi bien émergeantes que développées. Pour y répondre il faut une politique qui se substitue à l’aveuglement responsable de nombreux maux français : déficit des comptes publics, chômage, insécurité dans les banlieues, racisme, régression dans le relativisme culture (comme l’illustre l’affaire du mariage annulé de Lille, ou celle du gymnase réservé aux femmes). Or jusqu'ici ce qui faisait office de politique était le laisser-faire, le laxisme, un peu à la tête du client, assortie de temps à autre d'une repression au faciès. Une sorte d'ultra liberalisme migratoire défendu, c'est curieux, par ceux-là même qui vomissent le mot en L...Résultat, sous couvert de compassion altermondialiste on laissait s'enrichir les passeurs sans scrupules et parfois criminels, les trafiquants d'êtres humains, marchands de sommeil et autres patrons véreux. Ce sont d'alleurs parfois les mêmes, associés dans ces filières exploiteuses de misère.
Cette semaine, Hortefeux présentait dans une conférence de presse interminable, au dessus des forces du pauvre journaliste submergé (2heures! Même Sarkozy n'orait pas osé.), le premier bilan de sa politique qu'il définit en trois mots: Equilibre, fermeté et justice.
Pour l'équilibre on fut heureux d'entendre le ministre affirmer que l'immigration zéro n'était "ni possible ni souhaitable" et même que, pour peu qu'elle soit maitrisée, elle pouvait être "un atout" pour la France. Oui vous avez bien lu et vous vous souvenez sans doute de la formule de Bernard Stasi "l'immgration, une chance pour la France" qui lui valu d'être vilipendé durant des années par le FN? On n'en est pas loin.
Côté fermeté on ne sera pas surpris de voir que les reconduites à la frontière sont en forte augmentation (+31% depuis juin 2007) et que le rythme s'accélère. Plus spectaculaire, celle des retours volontaires (+374% en un an), ce qui prouve que des perspectives reviennent dans les pays du sud et que les aides sont donc plus incitatives. C'est une bonne nouvelle. De même on interpelle plus d'employeurs en fraude et de marchands de sommeil. L'immigration professionnelle ("choisie") se développe rapidement alors que les regroupements familiaux diminuent sous le coup des mesures dissuasives comme les tests de Français et peut-être les fameux tests ADN ( Je n'ai pas eu la patience d'attendre la fin de la conference pour poser une question sur ce sujet.). Par ailleurs, les conjoints inactifs ayant déjà bénéficié du regroupement familial sont incités à prendre une activité de type "emploi à la personne". Bref on s'assure désormais avant d'autoriser le séjour d'un étranger qu'il jouiera de conditions de vie décentes, comparables à celle de tout citoyen. C'est tout simplement une question de respect des droits de l'Homme. Tout ceci est excellent. Je suis davantage géné en revanche, revolté même, par les arrestations "d'aidants", près de 4000 personnes en un an soit une hausse de 28,5%. Héberger de façon désinteressée un clandestin est un comportement digne et même un devoir moral. En faire un délit est un scandale.
Justice enfin, envers les étrangers en situation régulière et tout ceux qui respectent la loi. A propos de la récente grève des sans-papier employés de la restauration et de l'hotellerie en région parisienne, Hortefeux a avancé des chiffres qui font réfléchir: A Paris, où le taux de chomage des étrangers-hors UE- est le triple de la moyenne nationale, sur 22000 étrangers (réguliers) demandeurs d'emploi, 1500 cherchent un emploi de cuisinier ou d'agent d'entretien. Régulariser massivement les clandestins reviendrait à défavoriser ceux qui ont souvent peiné pour se mettre en règle. Il n'annonce donc que quelque centaines de régularisations.
on verra comment tous ceux qui croient défendre les étrangers réagiront à ces premiers résultats. Ils ont l'air de convenir en tout cas aux pays d'origine de l'immigration, essentiellement en Afrique puisque le gouvernement français signe des dizaines d'accord avec eux et qu'une demi douzaine d'ambassadeurs assistaient au show d'Hortefeux.

17 juin 2008

Madrid 15 juin José Tomas-alias ET-coupe 3 oreilles à Las Ventas

Avec les 4 oreilles du 5 juin cela en fait 7 en 10 jours. El Pais a titre : "Une bonne après-midi pour mourir" Ce ne sera pas encore pour cette fois, et pourtant...Malgré trois "cornadas" dont au moins une grave Tomàs torrée jusqu'au bout, recolte ses trois trophées et se rend à pied à l'infirmerie ou il sera opéré durant plus d'une heure. "Quand j'entre dans une arène a-t-il dit un jour, je laisse mon corps à l'hotel". Torrero!

Sous un autre angle


Malheur à ceux qui-comme moi- n'y étaient pas ce jour-là, comme 10 jours avant.

12 juin 2008

Les atouts de l'Iran en Afghanistan

Entretien de France 24 avec le ministre des affaires étrangères
iranien (dans notre jargon on dit le “mae”), Manouchehr Mottaki. Ça
se passe à la résidence de l’ambassadeur, un magnifique hôtel
particulier dans le XVII arrondissement de paris, jouissant d’un
superbe patio surrélevé “à l’orientale”. En y pénétrant, j’ai
davantage l’œil d’un agent immobilier que celui d’un journaliste et je me
dis que les diplomates persans envoyés par le Shah avaient décidément bien du goût.
Face à moi, l’un des plus haut dignitaires de la République
Islamique, un proche d’Ali Larijani candidat malheureux à l’élection
présidentielle et ancien négociateur sur le dossier nucléaire. Comme
j’ai déjà pu le vérifier que la politique étrangère iranienne ne se
comprend qu'à condition d'en décoder les nombreuses
subtilités. L’homme est d’une courtoisie absolue, le verbe est
onctueux, le ton on ne peut plus mesuré et meme modéré, qui n’en
masque pas moins l’orthodoxie du propos. Lorsque je lui demande
pourquoi il a appelé les musulmans du monde entier à
détruire Israël (“Si chaque musulman jetait un baquet d’eau sur
l’entité sioniste, elle serait submergée”), il commence par répondre
qu’il respecte ceux qui ne partagent pas le point de vue iranien!
Mais attention que l’on comprenne bien: Téhéran ne songe pas à
vitrifier Israël, mais considère “en fonction des réalités “ que “le régime
sioniste honni” a perdu toute légitimité aux yeux du monde…comme ce
fut le cas pour le régime de l’Apartheid. On nous reservira cette
comparaison réchauffée (mais très appréciée de Jimmy Carter) à
Durban2 en 2009…
Il s’agit là d’ne version “humaniste” exclusivement destinée aux occidentaux. Devant les
orientaux les iraniens prennent moins de gants.
Cela dit, je pense que cette confrontation rhétorique avec “l’ennemi
sioniste” en dissimule une autre bien plus importante pour comprendre
l’évolution des rapports de force au moyen orient: l’affrontement
entre le “croissant chiite”, manoeuvré par l’Iran et le monde sunnite
dont le leadership fragile est assuré par l’Arabie Saoudite.
Le programme nucléaire iranien fournit une occasion d’une joute
verbale avec Israël qui arrange les deux parties et justifie que chacun
maintienne une garde haute. Mais il est surtout fait pour intimider ou
inquiéter les voisins immédiats de l’Iran, au premier chef l’Arabie
saoudite et les pays du golfe. Objectif déjà en partie
atteint. La puissance d’Israël ne gène nullement l’Iran. Au contraire, elle
maintient la pression sur le monde arabe et entretien le prestige de
l’Iran qui, par Hezbollah interposé, s’enorgueillit de tenir la dragée haute à l’Etat
Hébreu. Voilà pourquoi Téhéran et son allié au Liban feront tout ce
qui est en leur possible pour empêcher un réglement négocié du
conflit Israélo-palestinien.
Reste l’Afghanistan, la conférence sur la reconstruction du pays,
raison du passage à Paris du “mae” (il ne verra évidement aucun
officiel français. En tout cas pas au grand jour, l’Iran est
blacklistée.). Quel jeu y jouent exactement les iraniens? Une partie
d’échecs-jeu dont ils sont les inventeurs- dans laquelle comme il se
doit ils dissimulent parfaitement leur coup suivant. En 2001 ils ont
soutenu les moudjahidines de Massoud dans leur combat contre les
Talibans. Aujourd’hui encore lorsque je l’interroge sur le risque de
leur retour au pouvoir, Mottaki incrimine “ceux qui, à coup de
pétrollars, ont nourrit ces extremistes”, comprenez l’Arabie
Saoudite. Pourtant les services américains et britanniques sont
persuadés que l’Iran leur fournit aujourd’hui de l’armement (des
elements pour des “road bombs” déclenchées à distance au passage des
convois de l’OTAN). En septembre 2007 deux camions d’explosifs ont été
interceptés à la frontière irano-afghane. Mais l’Iran continue de
nier. Il faut dire que depuis le mensonge des ADM en Irak, on ne sait
plus à quelle source se fier…

Dans le même temps l’Iran aide économiquement l’Afghanistan. Mottaki
explique qu’avec $ 500000 les iraniens, très proches culturellement
des Afghans, font ce que “d’autres” (comprendre les pays de l’OTAN)
font avec 5 millions. Et sur ce point, on le croit volontiers.
En résumé, L’Iran soutient Karzai“tant qu’il sera là” (on ne saurait être
plus clair), par réalisme et “parce que c’est le choix du peuple”.
Mais les troupes de l’OTAN n’y seront pas éternellement, et Téhéran
attend leur départ avec impatience pour étendre son influence dans un
pays crucial à ses yeux. De là à forcer un peu ce destin, il n’y a
qu’un pas….

Pour visionner l'entreetien avec Mottaki, rendez-vous sur France24.com. Rubrique débat puis entretiens.