Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

16 décembre 2006

Tu seras pacha mon fils...


Depuis ma dernière note sur les prix Nobel, j'ai lu et adoré "Neige", d'Orhan Pamuk, qui est sans aucun doute l'oeuvre d'un écrivain marquant. Tout comme le restera son discours de reception du prix, admirable et émouvante "lettre au père". Je vous le recommande vraiment.

13 décembre 2006

Agitation


Il y a des jours où se dit-encore plus que d'habitude-que l'on a décidement de la chance d'être journaliste. Par exemple quand on rencontre des hommes aussi remarquables que Marc Peschanski, directeur de i-stem, laboratoire de recherche sur les cellules souches. C'était clair, limpide, intelligent. La France a pris du retard dans ce domaine à la suite de plusieurs lois bioéthiques déficientes.
Peschanski est l'un de premier médecins à avoir greffé des neurones sur des malades atteints de la chorée de Huntington, maladie dégénérative du système nerveux, caractérisée par des tremblements anarchiques incontrolables, on appelait ça, jadis, "la danse de Saint-Guy". Il a aussi mis au point un test génétique qui permet de savoir si l'on est porteur du gène responsable de cette affection. Problème: Le patient positif sait qu'il développera avec une presque certitude la maladie, aux environs de 40 ans. Ca n'incite pas à faire le test, mais au moins c'est un moyen-le seul- de mettre à l'abri sa descendance, par un tri d'embryon.
Demain avec les recherches sur les cellules souches embryonnaires, ces cellules nerveuses pourront se spécialiser...En somme les médicaments du futur. Le débat lancé par l'Eglise catholique est totalement déplacé et l'accusation d'eugénisme, scandaleuse puisqu'il ne s'agit pas de créer un homme sur mesure mais seulement d'éviter des vies de souffrance, au stade de l'embryon.
Dans un registre différent, j'espère que vous n'avez pas raté Abdulaye Wade, président de la République du Sénégal, premier chef d'Etat invité de France 24. J'avoue que je ne m'attendais pas à cette reconnaissance si vite. Avis à tous les autres.
Petit scoop ensuite avec Jacques Attali qui nous a dit deux choses sur Ségolène Royal:
1: Il ne voit pas comment elle peut-être battue l'an prochain.
2: Elle n'a pas encore de vision du monde, condition essentielle selon lui pour faire un(e) bon(ne) président(e)...mais elle va s'y mettre. Il serait plus que temps...

09 décembre 2006

Lancement réussi


Le lancement de France 24 a été de l'avis général une réussite. Evidement nous sommes conscients d'avoir encore une marge considérable de progression...Mais compte tenu des circonstances, le travail accompli par tous fut assez énorme. Finalement le génie "français" ça existe peut-être. Je mets des guillements car, comme on le sait, une partie de l'équipe n'est pas française.
Dès mercredi soir, j'ai interviewé le journaliste Thomas Friedman, qui avait publié, en 2003, un éditorial intitulé "Notre guerre avec la France" et qui disait notament ceci: "La France n'est pas notre rivale, elle est notre ennemie". C'était évidement dans le contexte du "veto" de la France au conseil de sécurité de l'ONU sur le mandat réclamé par les Etats-Unis en Irak. Dans un autre papier, il avait suggéré de donner le siège permanent de la France à l'Inde!
Aujourd'hui, Friedman-qui affirme beaucoup aimer la France- ne regrette pas l'excès de son propos. Il continue de penser que l'histoire eut été différente si l'Amérique ne s'était pas lancé dans l'aventure toute seule.
Sa participation à la soirée de lancement est, pour moi, un signe fort que France 24 ne sera pas une chaine au service de la diplomatie française ni "taillée sur mesure" pour qui que ce soit d'ailleurs. Mais je sais que nous devrons donner davantage de gages de nos bonnes intentions.
Pour autant, je trouve normal que nous aillons aussi interrogé Dominique de Villepin ce soir là. Il était interessant d'avoir la réaction de l'homme du "discours de l'ONU" au rapport Baker. Evidément le gouvernement, comme l'opposition encensent ce document.
Le lendemain, toutefois, dans le premier "débat de France 24" la tonalité était toute différente. Pas seulement de la part de Laurent Murawiec, néo-conservateur déclaré qui y voit dans les préconisations de Baker-Hamilton une capitulation pure et simple devant les dictatures moyen-orientales. Denis Lacorne, professeur à Science-po, y a vu un "tissu de banalité" et l'expert militaire Pierre Servent était à peine plus enthousiaste.
Ce rapport est assez peu original, en effet, et il relève finalement davantage de la politique intérieure américaine. Passons.

Le lendemain, encore des propos assez critiques pour la France et ses gouvernants chez Pascal Lamy premier invité de mon "entretien de france 24". Le directeur général de l'OMC estime que si la France s'adapte moins bien, ou moins vite, que ses voisins à la mondialisation, la faute en incombe à ses gouvernants. C'est à eux et à personne d'autre que revient la responsabilité d'élever le niveau éducatif de la population. C'est à cette condition que nous seront peut-être capables de créer des emplois qualifiés en nombre suffisant pour remplacer ceux qui sont détruits ou délocalisés. Et si notre système universitaire est si défaillant ce n'est ni la faute de la mondialisation, ni celle de l'Europe, mais bien celle des gouvernements successifs qui ont été incapables de le moderniser. Cela fait 20 ans que ça dure (j'y reviendrai dans une prochaine note avec l'anniversaire des évènements de 1986).
Il y avait plus fort, à mon avis dans l'interview de Lamy: En réponse à une question, il estime qu'il faut se préparer à un mouvement d'émigration des peuples européens vers des pays émergeants dont l'économie est plus dynamique que la notre et où se créeront de plus en plus d'emplois à haute valeur ajoutée.Associer
Après tout, dit-il, un tel processus n'est pas inédit et on l'a déjà observé au début du XXème siècle quand les Européens émigraient aux Etats-Unis, en Australie ou en Nouvelle Zélande...
Le risque pour notre vieux continent, dont le poids relatif dans le "monde plat" va mécaniquement baisser, c'est que ses cerveaux fasse leurs valises pour l'Inde ou la Chine et qu'il ne soit plus en mesure que d' attirer que des immigrants indigeants en provenance de pays pauvres, attirés par un généreux système de protection sociale et d'assistance qui sera devenu impossible à financer.
D'où l'urgence de réformer notre marché du travail. Ce n'est pas du libéralisme, c'est du bon sens et un simple instinct de survie si on est attaché au maintient d'une culture européenne vivante et... généreuse!

PS: Ce blog sera bientôt consultable sur le site de France 24

05 décembre 2006

Ce qui s'est passé lors de PSG-Hapoël Tel Aviv

Témoignage consternant sur ce qui s'est passé lors du triste match Psg-Hapoël TA, par un supporter juif qui se trouvait au parc ce soir là. Rien d'autre à dire.

04 décembre 2006

France24 avant France24


En exclu, 48 heures avant le lancement mondial de France 24, mes amis de memoire vive.org ont mis en ligne une émission "à blanc" (ou "à sec", en anglais "a dry run") d'un débat de France 24 tel que j'en animerai tous les jours (du lundi au jeudi). Ce jour-là nous ne nous étions pas organisé à temps pour diffuser un certain nombre de clips "politiques" visibles sur Daily motion. C'est pourquoi je trouve que ce débat manque d'images. Mais c'est pour cela qu'on s'entraine!

Ségolène Royal et le "cas" Hezbollah


C'est toujours la même chose avec Ségolène Royal. A priori, on met en doute sa compétence au delà d'un plan com pour le chabichou. Comme le dit Sarkozy à propos de la gaffe de sa rivale, un candidat à la présidence de la République "devrait avoir une idée précise de comment on évite que le conflit entre Palestiniens et Israëliens dégénère."
C'est bien le problème. Car Ségolène Royal, mais pas davantage que Sarkozy ou qu'un autre candidat n'a d'idée précise sur la question qui obsède la planète: Comment faire la paix à Jérusalem. On peut aller plus loin: Aucun grand dirigeant du Monde- pas même Kofi Annan (!)- n'a d'idée précise sur la question. Je dirais la même chose d'Ehud Olmert et de Mahmoud Abbas. Pourtant ce serait simple: Il suffirait que le premier arrête la colonisation des territoires, propose de se retirer sur la frontière de 1967 ou d'échanger des territoires équivalents situés aujourd'hui en Israël. Quand au second il renoncerait par exemple au fameux "droit au retour" des réfugiés qui est une façon sournoise de nier la "raison d'être " d'Israël: d'être, justement, un Etat juif.
En réalité les seuls qui aient une idée précise se moquent pas mal que la situation dégénère ou non. Ce sont les extrémistes comme Ahmadinedjad ou Lieberman. Le premier rayerait bien Israël de la carte, quand au second, il transfererait bien tous les Arabes d'Israël et des territoires dans un nouveau "pays" bâti on ne sait pas très bien où d'ailleurs.
Mais revenons à nos candidats, et surtout au Liban. Mme Royal s'est pris les pieds dans le tapis libanais. C'était bien prévisible. Il ne s'agit pas de cette histoire de traduction qui est, en soi, ridicule. Il est toujours possible de ne pas entendre ou comprendre ce qu'un interlocuteur vous dit dans une langue qui n'est pas la votre et qui peut être traduite approximativement. C'est un mauvais procès. Surtout quand il y a beaucoup plus grave, et que personne ne semble voir: Se rendre au Liban en ce moment, interdisait moralement de ne pas choisir clairement son camp. Au lieu de celà, Ségolène Royal a cru bon de finasser avec les rhétoriciens du Hezbollah.
En entrant dans une conversation hors sujet sur Israël avec un député du Hezbollah, elle est tombée dans le piège qu'il fallait éviter. Car le Hezbollah excèle à mettre en avant sa lutte armée contre "l'ennemi sioniste" pour entretenir son prestige auprès des libanais. Sauf qu'ils sont de moins en moins nombreux à être dupes. Le sujet de la visite de Mme Royal n'était pas Israël, sujet glissant pour tout politicien français, mais bien l'avenir du Liban.
Or, la France a un devoir de protection du Liban. Et aujourd'hui cela veut dire défendre l'union sacrée des chrétiens, des musulmans sunnites et Druzes contre la Syrie et ses seïdes fondamentalstes. Le Liban est en danger de tomber dans les griffes du fascisme islamique. Son premier ministre, officiellement soutenu par les occidentaux (mais de plus en plus comme la corde soutient le pendu), a dénoncé une tentative de coup d'Etat. Un ministre vient d'être assassiné pour s'être mis en travers du chemin syrien. Que faut-il de plus pour que l'on s'alarme?
Arrivant au Liban dans ce contexte quasi insurrectionnel, il était assez indigne de la part d'un homme politique français, fut-il une femme, de tenir une position d'équilibriste en prétendant veiller- un peu à la manière du CSA- à "l'égalité des temps de parole." Bref de faire comme si la démocratie, comme la diplomatie d'ailleurs, ça pouvait être "5 minutes pour les Juifs, 5 minutes pour Hitler."Ou plutôt 5 minutes pour les libanais qui attendent notre aide et se réclament de nos valeurs et 5 minutes pour les fous de Dieu.
Hitler, justement. On s'envoie trop souvent Hitler à la figure et c'est même une spécialité du Hezbollah dès qu'il s'agit de "l'entité sioniste". Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il s'agit de l'hommage du vice à la vertu, ne soyons pas manichéen. Mais enfin, si on y regarde de plus près, il y a quand même beaucoup de points communs entre le Hezbollah et le parti nazi. Ce projet communautaire, social, cette même organisation paramilitaire de la société, cette façon d'intimider le politique par la force physique et, bien sûr, cet antisémitisme obsessionnel. Jusqu'à la "technique du coup d'Etat" qui rappelle étrangement l'accession au pouvoir du fascisme et le nazisme en Europe. Cette façon de faire pression par la rue sur un gouvernement démocratiquement élu mais affaibli...avant de remporter des élections au moment politiquement favorable. J'entends d'ici l'argument: "Et les bombardement israéliens qui n'ont laissé que pierre sur pierre au sud Liban étaient-ils dignes d'une démocratie?" Sans doute pas, et les démocraties ont aussi leur indignité. Mais les Alliés, par exemple, tout en combattant le nazisme-ou parce qu'ils le combattaient- avaient eux aussi fait un usage démesuré de la force en bombardant Dresde et ses habitants. Personne n'a jamais qualifié ces bombardements de "nazis".
Une candidate française, si elle avait eu des idées claires et une vision du Monde aurait du profiter de sa visite pour résolument se ranger aux côtés des démocrates, dénoncer au moins la tentative de coup de force qui se déroulait pratiquement sous ses yeux. Sinon mieux valait s'abstenir. Comme les autres candidats qui en matière de politique étrangère n'ont guère fait leurs preuves jusqu'ici .
La réalité démographique du Liban est telle que le Hezbollah et ses soutiens (y compris le genéral Chrétien Aoun, de plus en plus souvent comparé à Pétain) pourraient être portés légalement au pouvoir. Il y a des précédents qui démontrent que la démocratie, ou plutôt ses aspects formels comme les élections, peuvent être dévoyés par les extrêmes. Les libanais qui se sentent proches de la France n'en veulent pas. C'est vers eux que devraient aller directement les dirigeants Français, sans se perdre dans le puzzle politique libanais.