Mon premier réflexe, c'est la solidarité avec Robert Redeker. Elle doit être totale, inconditionnelle, active et même prosélyte. Le plus important est de résister à cette peur sourde qu'inspire à certains les fatwas de quelques fous. Ne pas oublier non plus que ces fous, pour ultra minoritaires qu'ils soient, n'en sont pas moins ultra dangereux. Comprendre aussi qu'il bénéficient d'une certaine mansuétude, hélas, du simple fait du silence de trop de musulmans qui se sentent insultés par les propos critiques contre leur prophète.
C'est qu'il y a un point sur lequel Redeker a particulièrement de mérite dans sa "provocation": Elle interpelle les fidèles musulmans sur la violence intrinsèque du Coran, originelle de l'Islam. Un passage de son texte me semble devoir être particulièrement souligné:
De fait, l'Église catholique n'est pas exempte de reproches. Son histoire est jonchée de pages noires, sur lesquelles elle a fait repentance. L'Inquisition, la chasse aux sorcières, l'exécution des philosophes Bruno et Vanini, ces mal-pensants épicuriens, celle, en plein XVIIIe siècle, du chevalier de La Barre pour impiété, ne plaident pas en sa faveur. Mais ce qui différencie le christianisme de l'islam apparaît : il est toujours possible de retourner les valeurs évangéliques, la douce personne de Jésus contre les dérives de l'Église.
Aucune des fautes de l'Église ne plonge ses racines dans l'Évangile. Jésus est non-violent. Le retour à Jésus est un recours contre les excès de l'institution ecclésiale. Le recours à Mahomet, au contraire, renforce la haine et la violence. Jésus est un maître d'amour, Mahomet un maître de haine.
Mais il faudra ici faire l'effort de me lire jusqu'au bout: Je pense que dire que: "l'islam est une religion qui, dans son texte sacré même, autant que dans certains de ses rites banals, exalte violence et haine.", c'est infliger une blessure inutile à des millions de musulmans qui vivent, heureusement, leur foi en interprétant le Coran, et en ignorant tout ce qu'il peut avoir de violent. Bien sûr, Redeker veut montrer qu'il n'est pas toujours facile de distinguer Islam et Islamisme, en raison même de la violence du texte sacré, de l'absence de séparation entre temporel et intemporel en Islam. Mais il faut aller au delà de cette constatation.
Ainsi, au risque de surprendre, je ne suis pas en désaccord avec ce que dit Tarik Ramadan dans Libération du jour. En particulier le fait que: "le contexte global de lutte contre le terrorisme (...) a amplifié, dans le monde musulman, l'impression qu'à travers les radicaux on s'en prenait à l'islam. (...) c'est une impression vécue quotidiennement et qui a fini par s'inscrire dans le réel "
Ramadan a singulièrement mis de l'eau-j'allais dire dans son vin qu'il me pardonne cette métaphore judeo-chrétienne- ces derniers temps. Qu'il s'agisse où non d'une tactique, je n'en ai cure et trouve cela particulièrement réjouissant, compte tenu de son influence dans la jeunesse musulmane en occident. Je retiens particulièrement cette évolution majeure: Ramadan estime qu'il faut prendre le terme islamophobie "avec des pincettes". Quelle victoire sémantique nous avons remporté là! Le mot "Islamophobie" est en effet extrêmement ambigu en ce sens qu'il a été créé pour interdire la critique de l'Islam et à faire taire, ou pire à intimider des gens comme Redeker. Il n'y a guère plus que le MRAP pour l'employer. Le MRAP, seule association soit-disant laïque qui-soit dit en passant- ait refusé de soutenir le professeur de Toulouse en le qualifiant même d'incendiaire.
Je crois donc avoir trouvé avec Ramadan un terrain d'accord inespéré: Le débat nécessaire sur l'Islam en occident peut encourager, chez certains, des réflexes racistes, anti-arabe ou anti-musulman. Il faut être extrêmement vigilant là-dessus. Intraitable même. De le même façon que j'ai dit et écrit qu'une critique du sionisme lorsqu'elle devient radicale, sytématique ou hystérique se confond avec l'antisémitisme, je dirais la même chose pour la critique de l'Islam. Il y a un moment où elle devient raciste ou, pour le moins où elle encourage la haine de l'autre.
Nous voici donc devant deux nécessités tout aussi importantes l'une que l'autre: refuser les diktats, les intimidations, l'autocensure (voir la lamentable affaire Idoménée à Berlin) que veut nous imposer l'Islam radical, ou plus exactement (Olivier Roy a raison sur ce point) des radicaux au nom d'une lecture littérale du Coran; et en même temps, la pente de la discrimination religieuse qui compromet notre vie commune dans une société, non pas multiculturelle, mais métissée et pluraliste.
IIl y a un autre point qui me préoccupe. C'est la timidité, la retenue de beaucoup trop de journalistes français à aborder le débat sur l'Islam. Est-ce déjà la peur qui les aurait vaincus? Ou bien l'effet de cette "sécularisation du christianisme" dont parle Redeker et qui fait que l'on préfère être faible que passer pour intolérant? Evidément, il y a la une de Libération aujourd'hui. Je la trouve un peu tardive, et l'éditorial encore un tantinet bien pensant. Les journaux gratuits qui ont moins peur de dénoter ont réagi plus rapidement. La presse anglo-saxone me paraît moins éffarouchée. Je partage l'interrogation d'Ivan Riouffol , en particulier ceci:
"Les médias sont-ils prêts à dire toutes les vérités qui dérangent ? Eux aussi se seront prêtés à l'occultation de réalités. La presse bien pensante aura attendu 2000 pour reconnaître la violence installée depuis des années dans les cités et les écoles. Elle aura longtemps sous-évalué l'antisémitisme dans les banlieues. Elle aura laissé à la commission Stasi le soin de révéler la fracture du communautarisme et au rapport Obin celui de dévoiler l'intégrisme à l'école, tandis qu'il est revenu à Philippe de Villiers d'aligner les preuves de l'emprise islamiste à Roissy. La profession sait-elle être encore curieuse ? "
Pour en revenir à cette montée du racisme contre les musulmans, même "modérés", il n'est pas faux de dire, comme Riouffol que "Le mépris dont ils se plaignent est dû, en partie, à cette indifférence des bons apôtres (mediatiques)."
Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen
30 septembre 2006
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8 commentaires:
La solidarité avec cette personne qui se permet d'attaquer l'existence même de plus d'un milliard de'individus, sous pretexte de la liberté d'expression. Vous croyez que cette liberté vous permettre d'aller injurer et attaquer qui que ce soit quand vous avez envie?! avez vous oubliez que votre liberté s'arrête quand la liberté des autres commence?! avez vous oubliez la phrase qui dit "ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse à toi-même"?! Ou, pardon, pour certains, la critique est interdite par la loi car ils sont... Je suis libre de dire ce que je veux, mais sans blesser ou injurer les autres, et cela est vrai pour vous et pour tous les autres, y compris cette perssone qui se dit intelligente et intellectuelle. Ce que cette personne raconte en délirant, n'est qu'une forme de terrorisme incitant à la haine et à la violence et menaçant la securité de la société. Donc, si cette forme de terroriste fait partie de la liberté d'expression (que le monde dit "LIBRE" nous fatigue la tête avec même s'il ne la pratique que quand cela s'arrange), on rentre dans un problème majeure, un problème dans la mentalité qui peut se transformer en une maladie mentale collective lorsque on continue à croire qu'on a toujours raison et qu'on a la seule verité dans ce monde.
Avec ces commémorations du 11/09, et maintenant les menaces qui planent sur Redecker, il me semble que les médias plongent dans le piège de la menace "grandiloquente", c'est à dire la menace terroriste.
Certes, il y aura toujours des allumés pour se jeter dans une tour ou assassiner un intellectuel, mais cela n'est il pas l'arbre qui cache la forêt ? A tirer sur la corde sensationnelle, n'épuise t on pas l'opinion ?
Il est pourtant clair que le 3ème totalitarisme est bien plus lié à l'islamisme politique qu'à l'islamisme terroriste même s'il existe des passerelles entre les 2.
Mais l'affaire Redecker est sur ce point très informative : ce ne sont pas Oumma.com, Ramadan ou l'UOIF qui lancent des fatwas. Par contre, ces derniers profitent de la grandiloquence de la menace pour se positionner en médiateur sur le créneau: "on ne doit pas menacer Redecker, mais rien de cela ne serait arrivé si il n'avait pas tenu des propos provoquants".
Ce faisant, l'islamisme politique se pose en modérateur (vous même, pourtant journaliste éclairé, acceptez la médiation de Ramadan). Et la bonne société de lui emboiter le pas (à commencer par Robien), laissant seul le citoyen Redecker.
La vraie menace est pourtant portée par ces mouvements insidieux, qui par leurs fatwas softs, ont amené tout le monde à se taire, en décidant sous un vernis de modernité ce qui était outrageant et ce qui ne l'était pas: "d'accord pour les cours de biologie, mais pas pour le voile"; "d'accord pour une critique des textes, mais Redecker est un sale raciste". Cette "modération" que vous louez n'est qu'une version soft de la menace physique. Certes, il n'est pas question de tomber dans un esprit de complot et de dénoncer une conivence islamisme politique et islamisme terroriste.
Mais dans cette affaire comme dans celles des caricatures, l'un s'est nourri de l'autre, et je crains qu'on ne revoit pas de sitôt des caricatures de Mahomet.
Et pendant ce temps, on nous bassine avec une menace terroriste potentielle, alors que notre liberté de parole, elle, est déjà concrètement alterée.
M. Delfau sénateur PRG a interpelé le gouvernement au Sénat sur cette grave question ci-dessous, l'extrait du compte-rendu du Sénat:
"M. Delfau -
Mon rappel a trait à l'organisation des débats. M. Redecker est menacé de mort à la suite d'une libre opinion parue dans Le Figaro, et doit vivre depuis dans la clandestinité. Le Gouvernement a réagi par la voix du Premier ministre, mais ni M. Sarkozy ni M. Douste-Blazy n'ont jugé bon de le faire. Il faut réaffirmer avec force la liberté d'expression. La République doit prendre en charge les frais inhérents à la clandestinité imposée à M. Redecker. La France ne peut être l'otage des extrémistes, ni renoncer au principe de laïcité. Je demande au Bureau d'organiser un débat public qui sera la réponse du Parlement aux islamistes, que je ne confonds pas avec l'ensemble des musulmans. (Applaudissements)
M. le Président -
Je vous donne acte de vos propos, votre Président de groupe peut évoquer la question en Conférence des Présidents."
M Attal, je ne partage pas votre point de vue. Ceux qui attaquent le sionisme en son fondement et en deviennent antisémites, d'abord sont légions partout dans le monde, et ensuite ne sont pas menacés de mort au premier article. Il suffit de lire la presse arabe pour s'apercevoir que la censure n'y coupe pas les passages de ce type.
Vous reprenez à votre compte l'idée de Gilles de Robien qui rejoint d'autres sur le discours "ne pas jeter d'huile sur le feu". D'abord on ferait bien de s'inquiéter surtout du feu, et ensuite l'argument ne tient pas. C'est précisement quand les débats sont rudes que les arguments s'affutent, jusqu'à devenir injustes et parfois blessants. C'est ainsi que Tsahal est traité de Nazi régulièrement. Scandaleux, ce dérapage ne mérite pas de Fatwa.
On pourrait tenter de "comprendre" si c'était là chose inédite, inhabituelle. Mais il faut bien admettre qu'une frange radicale de l'Islam ne supporte pas la critique (même celle du romancier Rushdie)et que sa réaction est systématiquement violente (un traducteur de Rushdie assassiné tout de même). On ne peut pas nier que le terrorisme le plus mortel est islamique, même s'il tue d'abord d'autres musulmans. Et il serait bon que ces "autres" musulmans s'expriment plus souvent et plus librement (j'estime que Tariq Ramadan n'en fait pas partie, non pas parce qu'il serait partisan de la violence, mais parce qu'il ne représente pas le citoyen musulman type, il est porteur d'un projet religieux).
Est-ce la faute à des Radeker ou à des Fallaci si cet islam wahabite rétrograde et violent monopolise le discours et l'actualité ? Est-ce sérieux d'analyser chaque phrase de ce monsieur pendant que des adolescentes adultères meurent sous les pierres en Iran, que les ménagères chiites sont explosées sur les marchés Irakiens ? C'est dérisoire de reprocher à Radeker une violence verbale pendant que la violence terroriste ne nous émeut même plus.
Je ne fais aucun paralelle entre l'antisionisme radical et les remarques de Redeker. Je comprend ses préoccupations et j'en partage l'esentiel, même si je trouve que la formulation n'est pas la plus opportune.
Merci à pascal Lalmy pour son information sur la question du enateur Delfau.
La manière sont les politiques se sont défilés sur cette affaire est absolument scandaleuse, et inquiète.
ce que je trouve étonnant dans cette affaire, c'est que dans les multiples débatssur l'affaire redecker, on demande dcertes si l'on peut critiquer l'islam mais personne n'a jamais posé la question si ce que redecker a écrit était fondé ou non: le prophète était-il, selon le coran, polygame ou s'agit-il d'une affabulation redeckerienne ? a-t-il massacré des juifs , toujours selon le même coran, ou est-ce une diffamation? etc.
on peut évidemment, en ne citant que des parties d'un tout et en omettant de contextualiser les choses en arriver à des contre vérités.
mais quand-même, la question serait plutôt de savoir si l'on a le droit de parler de l'islam.
ilm ne s'agit même plus de savoir si on peut le "critiquer".
on n'arrête pas de nous dire qu'au 9ème siècle , à cordoue, l'islam était éclairé et avancé. évidemment qu'il faut le dire. mais j'ai l'impression que c'est la seule chose qu'on ait le droit de dire de l'islam aujourd'hui en france sans susciter des controverses, voire des violences. et depuis le 9ème siècle, tant pis, on attendra.
D'un côté, un professeur de philosophie écrit que l'Islam est par nature violent, et la réponse est qu'il reçoit des menaces. N'est-ce pas lui signifier que son opinion est juste ?
De l'autre, le recul et le discernement s'imposent lorsque l'on formule des points de vue et opinions sur tout sujet. Il me semble bien qu'il s'agit d'un pré-requis philosophique normal.
C'est d'ailleurs pour cela que je n'appelle pas ce monsieur un philosophe, ce serait lui faire un honneur immérité.
Pour extrapoler Desproges, je considère que l'on peut tout critiquer, mais qu'il faut bien choisir à quel titre on le fait.
Les personnes qui ont formulé des menaces manquent autant de recul, ou en ont-ils trop...
bravo , et merci !
votre nouvelle que ramadan demande à prendre le terme d'islamophobie avec des pincettes est en effet une immense victoire en soi de la pensée complexe contre le manicheisme - victimaire ou accusateur .
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