Il y aurait beaucoup de choses à dire sur "La chute", film assez moyen d'un point de vue purement cinématographique. Mais ce que je retiens c'est la composition effrayante de Bruno Ganz. J'ai l'impression d'avoir passé deux heures d'Adolph Hitler, Goebbels, Martin Borman etc...Au point d'en faire (et oui à mon age!) des cauchemars.
A quoi doit servir un film, en particulier sur un tel sujet? Doit-il aider à réflechir ou simplement montrer, sans imposer de point de vue? Je ne prétend pas trancher et je comprend que l'on puisse ressentir un malaise devant le parti pris d'Olivier Hirschbiegel. On sent qu'il a voulu montrer que le peuple allemand a été, lui aussi martyrisé par son tyran. C'est vrai à la fin ou Hitler l'a sacrifié à sa mégalomanie (Il dit à Speer, son ministre de la construction, que de toute façon seuls les plus lâches et les plus faibles ont survécu à la défaite.) Mais on pourrait aussi objecter que dans sa écrasante majorité le peuple l'avait choisi et soutenu.
Il y a, bien sûr, un aspect défi relevé par la performance d'un comédien exceptionnel (Julian Köhler en Eva Braun hallucinée est aussi excellente). En dehors d' un obscur film autrichien (Pabst en 1955), personne n'avait jamais osé montrer Hitler à l'écran autrement que dans une parodie (Lubitsch, Chaplin). Cette prouesse n'est pas totalement vaine car elle permet d'illustrer cette "banalité du mal" dont parlait Arendt à propos d'Eichman. Ainsi Hitler, le plus grand criminel du XXème siècle (avec Staline auquel il se compare), pouvait aussi se montrer gentil avec sa secrétaire, sa maitresse, son chien, sa cuisinière ( La scène ou Hitler mange son dernier repas végétarien à la table de ses "domestiques" est étonnante.) Tout cela ne fait pas beaucoup avancer la réflexion sur le IIIème Reich, j'en conviens, et ce film ne remplacera pas une approche historique globale. En revanche je ne crois pas que cette représentation puisse être jugée complaisante. Cet Hitler "peoplisé" n'en reste pas moins terrifiant, tout comme ceux sur qui il excerce son emprise totale, telle cette Magda Goebbles ("La femme la plus courageuse du Reich" dixit Hitler) qui supplie à genoux son "führer" de ne pas l'abandonner, puis, une fois cet excès de mélancolie vancu, empoisonne méthodiquement ses six enfants "parce qu'un monde sans national-socialisme n'est pas digne d'eux." C'était ça le nazisme.
Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen
10 janvier 2005
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4 commentaires:
Imposer son point de vue ? est-ce bien la finalité du cinéma...? Nous aider à réflèchir sur un sujet si sensible , sans apporter aucune conclusion définitive , c'est déjà bien !
et voir une maman capable de tuer aussi froidement ses enfants , remet bien les choses en place , c'est l'acte ultime d'êtres fous embrigadés dans une secte .
Malheureusement la secte national socialisme survit encore , ce w end un joueur de foot de Rome , di canio , a honoré le public d'un salut dit "Romain" (le bras tendu) il a même été felicité pour son geste par la petite fille du Ducce...
le ventre est encore fécond...
Dark Vador
ps : merci m'sieur Attal pour ton blogg
La technique consistant à ne pas imposer de point de vue est certes élitiste, hélas, (je me comprends) mais c'est pour moi la meilleure, même si c'est la moins efficace en ce qui concerne l'éducation des masses... N'oublions pas que ce film est un film allemand avant tout destiné à un public allemand qui en sait déjà beaucoup sur le sujet.
Oui Hitler était un homme qui aimait son chien et était même capable de quelques sentiments. Faut-il le caricaturer pour être certain qu'on ne lui pardonnera rien? La caricature semble malheureusement le moyen d'expression privilégié à notre époque, gare à celui qui a un peu plus de jugeotte.
Cordialement.
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