Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

06 juin 2007

François Mitterrand réincarné en corbeau


J'étais, d'abord, séduit par le "blog de François Mitterrand". Par sa belle écriture classique, par son réalisme surtout. L'analyse politique était très fine et souvent pertinente. Et puis cette façon de se promener, la dague à la main, dans les allées de la maison socialiste. Cette manière d'assassiner ou simplement de ridiculiser d'un trait tel ou tel courtisan... Tout cela a bel et bien l'air "d'être" du Mitterrand. Et puis ces anecdotes "d'époque" distillées au compte-goutte dont j'ai pu vérifier qu'elles avaient, au moins certaines, une part de vérité. Elles ne pouvaient être connues que d'un très proche de Mitterrand.
Mais voici que depuis quelques jours l'auteur de ce blog mysterieux lui donne un ton que je n'aime guère. Ce n'est plus un "à la manière de" talentueux, mais une sorte de lettre anonyme ouverte. Derrière Mitterrand pointe un corbeau décidé à embarrasser certaines personnes, souvent des journalistes, avec de vieilles histoires. Le sommet de l'inquiétant étant, jusqu'à présent: "Demandez-donc à Jean Michel Apathie ce qu'il a vu, un soir de 1992, dans les toilettes du conseil régional de Haute-Normandie". Fichtre! Le tout répété avec insistance jusqu'à ce que l'interessé, excédé à bon droit, finisse par sortir de son silence. Là, je commence à avoir un peu la nausée. Car voyez-vous, j'ai beau penser que l'autocensure est la maladie la plus sévère qui ronge ma belle profession, je n'entends pas par là que tout ce que voit un journaliste doit être aussitot rapporté et encore moins publié. Apathie affirme qu'il ne se souvient de rien de marquant de cette soirée, mais confirme qu'il était bien à Rouen ce soir là. Il peut aussi avoir de très bonnes raisons de ne pas avoir raconté ce qu'il a vu, ou de vouloir s'en souvenir aujourd'hui. Un journaliste comme tout un chacun a droit au secret, à la confidentialité. Tout ne se dit pas, n'est pas bon à dire. Qui plus est, le lieu en question (les toilettes) suggère qu'il s'agit peut-être de quelque anecdote salace ou au moins intime. Or les journalistes ne sont pas des égoutiers. Certes, il faut parfois chercher là ou personne ne veut mettre les mains, mais nous ne sommes pas là non plus pour exposer le contenu des poubelles. Nous sommes maitres, et heureusement, de nos choix et même, au risque de nous tromper, seuls juges de ce qui est digne ou mérite d'être porté à la connaissance du public. Celà s'appelle la conscience professionnelle, tout simplement.
Le fait est que de plus en plus souvent hélas les journalistes, ou les patrons ou actionnaires de presse s'abritent derrière l'argument de la protection de la vie privée pour censurer des informations en réalités importantes voir essentielles pour mieux comprendre les évènements publics. Mais c'est une autre histoire et j'y renviendrai.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous avez parfaitement raison.

Ce surcroît de déballage serait-il un symptôme de la crise au PS ? Cela ne doit pas manquer d'y renforcer la bonne humeur générale.

Rimbus a dit…

Bonjour
je suis assez d'accord, encore que tout cela me semble une farce destinée à augmenter l'audience du blog. Et c'est efficace parceque c'est LE sujet actuel sur la blogosphère.

Je crois que les journalistes devraient plutot parler du soutien qu'il faut apporter à Denis Robert et s'inquieter de la possible disparition de Arrêt sur Image.
C'est mon sujet du jour,
http://rimbusblog.blogspot.com/
vous devriez m'emboiter le pas. Les journalistes doivent être solidaires, non ?
Bien cordialement