Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

07 mars 2006

Les musulmans et la démocratie

Je suis interpelé par un lecteur après des propos que j'ai tenu, sur RTL, au sujet du nucléaire indien et israélien. Ce lecteur trouvait douteux que je ne veuille pas reconnaitre le même droit à l'Iran ou aux pays arabes. C'est le fameux reproche du "deux poids et deux mesures". Je suis à nouveau soupçonné d'être guidé par des sentiments "antimusulmans", sinon racistes. Je lui ai répondu (voir les commentaires de la note "la gauche sectatrice..."). J'aurai pu aller plus loin sur le rôle que joue, à mon avis, l'attitude d'une communauté vis à vis du progrès scientifique et technique et le developpement économique associé à des instituttions démocratiques. Choses qui font défaut en partie ou en totalité aux pays arabes et à l'Iran.
En complément de ma réponse je reproduis donc des extraits d'un article du quotidien qatari Al-Raya, dans lequel Tarek Heggy, intellectuel egyptien, voit dans l'exemple de la démocratie indienne la preuve que les pays arabes et musulmans ne recourraient pas au terrorisme s'ils pouvaient participer librement à la vie politique de leur pays, comme c'est le cas en Inde. [1]

"Alors que [presque] toutes les communautés musulmanes dans le monde ont produit des combattants du djihad, lesquels ont rejoint Al-Qaïda et d'autres organisations [du même type], il existe une communauté musulmane qui ne participe pas à ce phénomène: il s'agit de la deuxième plus grande communauté musulmans au monde, la communauté musulmane d'Inde.
Cette communauté de plus de 150 millions de personnes (…) est la seule communauté musulmane à n'avoir pas produit un seul individu ayant un jour quitté le pays pour participer à des opérations violentes appelées 'djihad' par leurs auteurs et 'terrorisme' par [le reste du] monde.
La communauté musulmane d'Inde n'est pas riche. Elle fait partie intégrante de la société indienne (…) où un pourcentage important de la population vit à l'écart de la richesse et de la prospérité. Toutefois, aucun membre de cette communauté musulmane n'a jamais n'a jamais planifié ou exécuté d'opérations telles que l'attentat du 11 septembre 2001 à New York, ou les attentats intervenus par la suite à Madrid, Londres, Istanbul, Taba, Charm El-Cheikh et ailleurs. En outre, la communauté musulmane d'Inde (malgré son statut de minorité) a donné un grand érudit, qui joue actuellement le rôle de président d'Inde.
[2]
Ce qu'il faut noter est que la communauté musulmane d'Inde est la seule communauté musulmane [au monde] à vivre dans une véritable démocratie nationale.
Que pouvons-nous conclure de ces faits ? La conclusion évidente est qu'au cœur de chaque individu se trouve un être politique (…) Si cet être dispose de moyens effectifs et légitimes pour agir ouvertement au niveau politique, il ne cherchera pas à agir de façon souterraine.
L'Inde n'est pas seulement une démocratie ; c'est la plus grande démocratie au monde. Non seulement a-t-elle réussi à réaliser le rêve d'une existence démocratique propre à [toute grande nation], elle a aussi permis à cette nation d'accomplir des progrès significatifs dans les domaines de l'économie, de la recherche scientifique, de la production, du marketing et de l'enseignement moderne. En outre, elle gère remarquablement la diversité de la société indienne et l'actuel Premier ministre est en effet membre de la minorité Sikh [qui ne représente que 2% de la population] (…)
Les universités d'Inde (contrairement aux universités des [autres] pays du Tiers-monde) sont classées parmi les meilleures au monde (tandis que l'université du Caire - la plus ancienne université du monde arabe - n'est [même] pas classée parmi les 500 meilleures universités du monde.)
L'essentiel est que l'Inde a prouvé que quand les musulmans [comme tous les autres êtres humains] se trouvent dans un climat qui leur permet de participer pleinement à la vie politique, ils n'ont pas recours à des activités souterraines (…) et ils ne quittent pas [leur pays] pour faire sauter un avion, un train ou un bus rempli d'innocents (…)"

[1] Al-Raya (Qatar], le 21 décembre 2005
http://www.raya.com/site/topics/article.asp?cu_no=2&item_no=110189&version=1&template_id=24&parent_id=23.
[2] CNN rapporte en effet que bien que né de parents musulmans, Abdul Kalam ne se considère pas comme musulman. http://archives.cnn.com/2002/WORLD/asiapcf/south/07/18/india.president/index.html

source: Memri

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Très juste ; voir aussi un article de Friedmann du NYT paru quelques temps apres le 11 septembre et qui faisait la même remarque.

Anonyme a dit…

Vous reprenez à votre compte l'idée selon laquelle les "pays arabes et musulmans ne recourraient pas au terrorisme s'ils pouvaient participer librement à la vie politique de leur pays, comme c'est le cas en Inde".Pourtant j'ai bien le sentiment que les extrémistes religieux musulmans et indiens recourent au terrorisme en dépit des possibilités d'expression politique que leur offre la démocratie indienne. Libération annoncait par exemple hier qu'un attentat contre un temple indou avait tué vingt-et-une personnes mardi à Benares.

La qualité et la maturité de la démocratie de New-Delhi ont peut-être évité aux islamistes indiens de se retrouver au centre du dispositif terroriste international. Mais elle n'a pas permis de résoudre les tensions interreligieuses qui l'assaillent depuis l'indépendance.

Sylvain Attal a dit…

Les attentats de Bénarès paraissent démentir le propos. En réalité ils ne font que le nuancer. La violence interreligieuse paraît à elle seule alimenter un terrorisme intérieur. Ce sont les avatars de la guerre indo-pakistanaise. Il ne faut pas tomber dans l'angélisme. Reste que les musulmans indiens ne se poussent pas pour alimenter le djihad international.