Le blog de Sylvain Attal/ "La vie n'imite pas l'Art, elle imite la mauvaise télévision." W.Allen

09 mars 2007

Quand, ne craignant plus rien, tonton Raymond en vient à règler quelques comptes...


La harangue de Barre contre le lobby juif, l' éloge funèbre de son ancien ministre Papon, et du "pays" Gollnisch, son autojustification pathétique de ses propos tenus après l'attentat contre la synagogue de la rue Copernic lui ont valu le soutien du dit Gollnisch mais aussi de Dieudonné, ce qui dit assez dans quel état Barre termine sa vie publique. Là dessus, je souscris à ce qu'en a dit Claude Askolovitch. Nous avons les mêmes souvenirs. J'ajouterai ceci: Barre peut bien en vouloir à un "lobby juif". J'ai déjà dit que cette expression, en soit, ne me choquait pas. Celà a été utilisé par quelques sites pas très bien intentionnés et j'en profite pour préciser: On peut très bien appeler "lobby juif" le regroupement de certains juifs, de certaines associations qui estiment, à un moment donné qu'elles veulent unir leur force pour mettre en échec ce qu'elles considèrent être des actions nuisibles à l'idée qu'elles se font des intérêts des Juifs, mais plus souvent- puisqu'il s'agit de politique- d'Israël. L'ennui c'est que, primo elles peuvent très bien se tromper sur ce qui est bon pour les Juifs et pour Israël: quels Juifs? Les religieux ou les laïcs? Quel Israël? Celui des colonies ou celui qui s'encanaille à Tel Aviv? Bon, déjà. Secondo, l'autre problème c'est que le poids démographique des Juifs Français ne peut faire peur qu'aux antisémites qui ont tendance à le surpondérer. A tout casser 6 à 700000 personnes, et encore pas toutes revendiquées comme telles. Ça ne peut pas avoir de réel poids politique, comme par exemple influencer sur le résultat politique dans une ville comme New York. L'antisémitisme commence lorsque l'on prête à ce "lobby" des pouvoirs, ou une influence qu'ils n'a pas. Mais il arrive, allez, disons deux ou trois fois dans un siècle, que ces Juifs qui ne sont pas d'accord sur grand chose quand il s'agit de politique, soient soudain tous d'accord et avec eux, ça arrive aussi, une bonne partie du reste des Français, assez parfois pour faire une majorité du peuple français. Pendant l'affaire Dreyfus ça n'a pas été sans mal. Sous Pétain, on sait que les persécutions anti-juives ont été le déclencheur, avec le STO, d'un lent mais inexorable retournement d'une opinion d'abord largement maréchaliste vers la résistance, ou en tout cas disons vers les "anti-boches" et "les anti-collabo". Le comportement de Papon a révulsé la France et la justice a tranché. La France juge tout aussi sévèrement l'attitude de Raymond Barre. Ce qui s'est passé, en 1981, c'est que pour une fois, une partie importante des Juifs de ce pays, qu'ils soient de gauche ou de droite ont soutenu Mitterrand. ils l'ont fait comme beaucoup d'autres catégories de Français pour des tas de raisons. Simplement, le comportement méprisant de la France giscardobarriste vis à vis des Juifs et d'Israël en était une de plus. Là dessus, Barre a complètement tort d'incriminer " la partie la plus à gauche du lobby juif". Celle là était de toute façon acquise à Mitterrand. Ce qui s'est passé, c'est que le Renouveau Juif réunissait des Juifs plutôt à droite, plutôt des bourgeois commerçants qui auraient dû craindre l'arrivée des "socialocommunistes", mais qui, à cause de comportements comme ceux de Barre après Copernic, ou de Giscard courbé devant les pétromonarques, ont voté à rebours de ce que leur dictaient leurs interêts sociologiques. Je crois que cela ne s'est pas reproduit depuis.

28 février 2007

Une campagne nulle


La compétitivité de la France dégringole de la 6ème à la 9ème place des dix plus grandes nations européennes, selon une étude de l'économiste en chef de l'assureur Allianz. L'Allemagne a fait le chemin rigoureusement inverse (de la 9ème à la 6ème place). Seule l'Italie fait moins bien que nous. Avez-vous entendu un seul candidat évoquer ce sujet? Non. Ils ont tous bien trop peur de passer pour "déclinistes". Le manque de compétitivité d'aujourd'hui est directement responsable du chômage de demain, ce qui laisse présager que le futur ou la future élu (e) va passer un sale moment. (dernière minute: Ségolène Royal vient de dire que "les deux premières années seront difficiles". Il y a du mieux...)
Airbus va supprimer 10000 emplois, dont probablement 4000 en France. Ce n'est pas une de ces entreprises dirigées par des financiers obsédés par la rentabilité, mais par des capitalistes à l'ancienne, c'est à dire choisis en raison de leurs connexions avec l'Etat, actionnaire lui aussi. D'ailleurs on les sent de moins en moins motivés par leur présence au tour de table de l'avionneur. Leurs euros rapporteraient en effet beaucoup plus investis ailleurs. Ils ne restent que parce qu'ils n'y a pas d'autres partenaires européens industriels privés d'importance pour les y remplacer. Bref, on leur demande de faire preuve de patriotisme économique, ce qu'ils font jusqu'ici, en ne cessant pourtant de dire que c'est du provisoire. On peut rêver mieux comme actionnaire!
Ces suppressions d'emploi ont leur origine dans les retards du programme A380 et dans le taux de change euro/dollar qui plombe les exportations (et donc les emplois) européens. Si les Allemands s'en sortent mieux que les Français avec le même euro, c'est justement parce qu'ils ont su améliorer leur compétitivité. La boucle est bouclée. La France ne peut prétendre bénéficier des avantages de l'euro avec une gestion des finances publiques aussi catastrophique et en négligeant la productivité du travail.
Normalement, le pays devrait vivre un grand débat sur les moyens de retrouver le chemin de la compétitivité. Un débat avec nos voisins pour s'inspirer des recettes qui ont bien marché ailleurs. Un débat sur le prix à payer, car il est évident qu'il y en aura un. Mieux vaut dire quelles catégories devra le supporter et dans quelles proportions. C'est le rôle de la fiscalité. Le sujet de la TVA sociale, ou de l'impôt de consommation est complètement absent du débat. Aucun candidat n'ose le mettre en avant, de crainte de le payer en impopularité. C'est pourtant un moyen efficace utilisé avec succès par les Allemands et les scandinaves (tiens, vous avez remarqué, personne ne parle plus du "modèle danois"...) pour soulager la production sans taxer le travail et en même temps en pénalisant les importations en provenance des pays à faible coût de main d'oeuvre. Bref un impôt anti-délocalisation et favorable à l'emploi en France, et personne n'en veut! Vous y comprenez quelque chose? Evidement, c'est le consommateur qui va payer, mais comment faire autrement si l'on ne peut plus taxer ni le capital, ni le travail?
De ce débat essentiel, il n'est guère question nulle part. Sarkozy a déserté le thème de la rupture. Ségolène a mis une sourdine à sa petite musique pour se ménager les éléphants. Je doute que cela lui fasse gagner une seule voix. Les candidats, mais tous les candidats, continuent à surenchérir en promettant tout et son contraire. A qui apparaîtra comme le plus compassionnel, le plus sécuritaire, le plus ouvert ...ou un mélange de tout cela. Aucun des principaux candidats ne manque pourtant de qualités et ils valent sûrement mieux que la caricature que leurs adversaires passent beaucoup de temps à peaufiner. Ségolène Royale n'est pas populiste parce qu'elle veut tenir compte du peuple. Pas incompétente parce qu'elle s'affranchit de quelques dogmes en politique étrangère. Sarkozy n' a pas eu tort de parler de la "racaille" des banlieues. Elle existe, hélas, et prétend même lui interdire d'y remettre les pieds. La moquerie dont l'affligent les socialistes à ce sujet est consternante.
Reste Bayrou, qui tente bien de récolter quelques pépites abandonnées par l'adversaire. Mais lui aussi déçoit. C'est dans son camp que l'on trouve les adeptes les plus convaincants de la TVA sociale. Or, il n'en dit mot, préférant flatter la clientèle enseignante. Un clientélisme éhonté auquel même les socialistes n'osent plus se livrer.
A force de reculer le moment de vérité, vous verrez que ce sera tooujours le même qui réussira à passer pour celui qui la dit. Devinez qui?

19 février 2007

Avec Alain Duhamel


Alain Duhamel, suspendu après avoir révélé- de manière incidente- son intention de vote en faveur de François Bayrou, a dénoncé le "caractère totalitaire d'Internet". Je crois qu'il se trompe. Ce qui est totalitaire, c'est de l'avoir suspendu, et pas d'avoir simplement porté à la connaissance du public son propos. Après tout, Alain Duhamel est un des journalistes politiques les plus influents du pays, il n'est pas anormal que ces déclarations publiques soient portées à la connaissance de ses lecteurs et auditeurs, au delà du petit cercle des étudiants de sciences-po. Ce qui l'est, c'est de suspendre un journaliste pour une raison pareille! Alain Duhamel a parfaitement montré qu'un journaliste digne de ce nom peut très bien conserver son sens critique, même envers un homme politique pour lequel il éprouve de la sympathie. Cette suspension est un lynchage pur et simple. C'est aussi une hypocrisie de plus, car nombre de journalistes ne se privent pas de manifester leur soutien à tel ou tel candidat, de manière évidement subliminale, parfois par une connivence qui s'exerce loin des micros et des cameras. C'est aussi un signe d'archaïsme profond du monde journalistique français. Aux Etats-Unis, pays ou l'on ne plaisante pas avec l'indépendance de la presse, il est de tradition que les journaux fassent part de leur préférence à la veille d'une échéance importante. C'est une forme de respect.
Par ailleurs, on ne peut pas encenser le "journalisme-citoyen" et empêcher les journalistes d'être aussi des citoyens et d'informer, s'ils le souhaitent, leur public de leur préférence. C'est la différence entre choix citoyen et choix partisan. Que croit-on? Que même les admirateurs inconditionnels de Duhamel vont forcément l'imiter, créer un comité de soutien à Bayrou, lui envoyer des chèques? Qu'ils seront influencés? Peut-être, et alors? La presse n'influence-t-elle pas de manière beaucoup plus insidieuse?
Le comprtement d'Alain Duhamel est exemplaire et moderne. Ne sommes-nous pas entrés, justement avec internet, dans une époque de clarté entre les citoyens et les medias?
N'est-ce-pas au contraire en libérant la parole des journalistes, en cessant d'en faire les eunuques du harem politique que le public retrouvera un peu confiance en eux? C'est d'ailleurs ce qui est intéressant dans les propositions de Bayrou, justement, qui veut empêcher les groupes industriels dépendant des marchés d'Etat de contrôler des medias. Car, contrairement à Alain Duhamel, je ne m'offusque pas des critiques du candidat centriste contre le monde médiatique, que je trouve assez fondées dans l'ensemble. Précisément, le contrôle des moyens d'information de masse par des groupes dépendant de commandes publiques est source d'opacité et fait pencher ces medias du côté du manche ou de celui ou celle dont ils estiment qu'il ou elle aura les meilleures chances de l'emporter. Actuellement, Sarkozy. Evidement ils ne le disent jamais.
A côté de cela, la révélation par Alain Duhamel de sa préférence est une manifestation d'honnêteté et d'intégrité professionnelle. Ni plus ni moins.

14 février 2007

Débat atomique (suite)

Ce soir, sur France 24, nous avons mis sur la sellette Dominique Lorentz ("Affaires Atomiques", "Secrets atomiques" Ed.les Arènes, dont j'ai déjà parlé ici, en la confrontant à deux contradicteurs: François Géré de l'Institut Français d'Analyse Stratégique ("Les tourments perses", Ed.lignes de repères) et quelqu'un que je connaissais moins, Nader Barzin ("L'Iran nucléaire", l'Harmattan). Je n'ai pas eu le temps de redonner les références bibliographiques tant le débat était animé! Lorentz a été interpelée sur sa méthode de travail avant de rétablir la situation, à mon sens, dans la deuxième partie lorsqu'elle obligea François Géré à révéler ses sources (services de renseignement, AIEA). Sont-elles nécessairement plus fiables que les documents ouverts et la méthode analytique de Lorentz? A vous de juger en visionnant ce débat animé et passionnant.

12 février 2007

La martingale Royal


La candidate socialiste peut-elle refaire son retard sur Nicolas Sarkozy avec ses 100 propositions?..Avec quelques symboles aussi, Une candidate qui est aussi une mère et qui affirme vouloir la même réussite pour chaque jeune Français que pour ses propres enfants...Les candidats pères n'avaient jamais osé...Chirac s'était contenté de souhaiter faire avec la France la même chose qu'à Paris.

La veste rouge, ensuite, en accord avec la tonalité du discours qui, de l'avis général, a déplacé son centre de gravité sur la gauche, alors que Sarkozy affichait à la Mutualité ses ralliements centristes...

Pourtant, à y regarder de près, les choses pourraient bien être plus compliquées que cela...La mise en garde sollenelle sur la gravité de l'endettement de la France d'abord, le coup de boutoir contre l'Etat jacobin ont surpris dans les premiers rangs de l'assistance où se trouvaient les élephants....Heureusement vint aussitôt la déclinaison de "l'ordre juste"...

Mais comment augmenter le SMIC (si l'Etat le prend en charge), les petites retraites, l'allocation logement, handicapés, financer le revenu jeunesse, la carte santé des 16/25 ans, doubler le budget de la justice, limiter à 17 elèves les classes de Zep, depenser autant par étudiant que la moyenne de l'OCDE etc...etc...sans aggraver l'endettement, ni augmenter les impôts...(ce qu'on suppose depuis la controverse avec François Hollande, puisque Ségolène Royal n'en a pas pipé mot hier.)
C'est la martingale Royale...
Il est vrai que les électeurs ne sont pas des comptables et que les chiffrages ne font pas de grands discours...Nicolas Sarkozy ne déroge pas à cette règle, lui qui a son lot de promesses ("tout devient possible") et veut en même temps baisser de 4% le taux de prelèvement obligatoire...4%, rien que cela, alors que Margaret Thatcher, au plus fort de sa "rupture", les fit baisser de 2%...seulement...
Alors, les promesses "n'engagent-ils que ceux à qui elles sont faites"?....Et la fonction des campagnes électorales ne serait-elle que de préparer les frustrations et les désillusions de demain?...

07 février 2007

Dominique Lorentz, c'est de la bombe!


Hier soir, je recevais Dominique Lorentz, auteur de "Sujets Interdits" édité par les Arènes. Il y a dix ans, j'avais été impressionné, étourdi même, par son permier livre "Une guerre" qui, à contre-courant de l'ensemble de la presse, faisait le lien entre les enlèvements de Français par le Hezbollah au Liban, l'attentat contre la Fnac, rue de Rennes, l'assassinat signé Action Direct, de George Besse alors patron de Renault, la disparition de Michel Baroin et, déjà, la bombe iranienne. Dominique Lorentz est une analyste. Elle ne travaille que sur des sources "ouvertes", ignorant volontairement les sources confidentielles et les dossiers opportunément déposés dans les boites aux lettres. Au fil des ans, elle est devenue une spécialiste des questions nucléaires et de la prolifération.
Dans "Secret atomique", elle raconte dans le détail l'histoire cahotique de la coopération nucléaire franco-iranienne. Elle fut la seule a relever la facétie de l'ancien président Khatami. En visite à Paris, où il vient exiger le respect par la France des engagements pris à l'époque du Shah, il dépose une gerbe sur la tombe de...Pierre et Marie Curie.
Dans "Affaires atomiques" elle révélait, rien moins, que la bombe française était le fruit de la volonté des Etats-Unis, avec le concours de chercheurs juifs du nouvel Etat d'Israël. Autrement dit, selon elle, et contrairement à l'histoire officielle, c'est Israël qui a permis à la France de monter sa bombe atomique et non l'inverse!
Dans "Des sujets interdits", l'auteur raconte comment elle a été recrutée par la Defense nationale pour travailler à la définition d'une doctrine française de contre-prolifération, avant d'être bloquée sur intervention de la DGSE. Aujourd'hui Dominique Lorentz végète, de petits boulots en petits boulots. Elle est traitée en paria pour excès de curiosité.
Hier, sur France 24, elle affirmait ceci: La supposée "gaffe" de Chirac sur l'Iran n'en est pas une. En effet, il n'est plus question, dit-elle, d'empêcher les iraniens d'avoir la bombe, ils l'ont déjà. La bombe pakistanaise est en fait une bombe irano-pakistanaise. Les puissances nucléaires occidentales ont organisé la prolifération pour créer un système d'équilibre de la terreur. Le meilleur exemple est le conflit indo-pakistanais. S'il ne dégénère pas c'est que New Dehli et Islamabad savent qu'ils ont les moyens de se détruire mutuellement. L'évolution du regime des mollahs est venu bouleverser la donne. Et si la République islamiste se montrait moins rationnelle que les autres détenteurs de l'arme nucléaire? Et si Khatami, et aujourd'hui Ahmadinedjad mettaient à exécution leur menace de destrution d'Israël? Conclusion de Lorentz: Il s'agit maintenant non plus de dissuader l'Iran d'obtenir la bombe, mais de s'en servir. D'où la menace explicite de "raser Téhéran" en cas d'utilisation de l'arme nucléaire. C'était le message très peu diplomatique que souhaitait faire passer Chirac et reçu 5 sur 5 par son destinataire. Seul bémol: Israël ou ses alliés sont-ils en mesure d'intercepter en vol un missile nucléaire avant que celui-ci n'ait quitté l'espace iranien? Mais l'essentiel est que les fanatiques iraniens pensent que cette éventualité est suffisament sérieuse pour réfléchir à deux fois avant d'appuyer sur bouton nucléaire.

PS: Le verbatim des deux entretiens accordés par Jacques Chirac au nouvel obs et au New York Times sont très instructifs. Il est impensable que Jacques Chirac se soit cru "off the record"

01 février 2007

Le candidat retro


Regardez bien cette photo. Rien ne vous choque? Rien ne vous interpelle? Reflechissez bien...
Mais oui, évidement, c'est elle tout simplement: la pipe.
Nous sommes le 1er Fevrier et la loi qui interdit de fumer dans tout lieu public fermé entre en vigueur. Surtout, cela fait bien longtemps que vous n'avez pas vu un homme politique, encore moins un candidat présidentiable, s'exhiber en public une clope au bec, encore moins avec un Havane...Et c'est ce même joour que choisit Bové pour lancer sa candidature. Et José, lui ne cache pas sa pipe. Car José est différent. La pipe est différente. La pipe rassure. Elle ne fait ni pollueur, ni empoisonneur. La pipe est un accessoire apaisant et retro.
Y a-t-il plus qu'une coincidence? Est-il possible que cette pipe fétiche soit là pour nous rappeler le souvenir d'une époque ou on s'enfumait joyeusement dans les arrières salles de bistros entre camarades, en refaisant le monde? La pipe, comme image subliminale d'un temps révolu, celui des R16 et des pattes d'éph. en velours côtelé.

26 janvier 2007

Jumblatt le téméraire


L'autre soir à l'occasion de la conférence sur la reconstruction du Liban j'avais invité des libanais qui étaient restés à Beyrouth. Les autres étaient trop occupés par les discussions d'alcôve. Il y avait un lieutenant de Michel Aoun et Walid Jumblatt. Un sacré tempérement ce Jumblatt! Et il était spécialement en forme ce soir-là.
Tout le monde ou presque au Liban a été à un moment donné l'allié de la Syrie et/ou du Hezbollah. Y compris Jumblatt dont le père a pourtant été assassiné par les barbouzes d'Assad père. Il était donc facile au représentant d'Aoun de retourner à l'envoyeur l'accusation de traitrise.
Je retiens ceci des propos extrêmement peu diplomatique du leader druze: "J'ai essayé de "libaniser" le Hezbollah mais c'est impossible. Aujourd'hui, nous n'aurons la paix au Liban que si l'on se débarrasse au préalable du régime criminel de Damas." Fichtre. On comprends que Jumblatt hésite à sortir de chez lui ces derniers temps.

PS: Je suis nominé au concours de blogs des journalistes de la "coupe de l'Info" qui se tiendra début février à Courchevel (je sais, j'y vais beaucoup en ce moment...) Vous avez jusqu'au 31 janvier pour voter ici. Vous n'êtes pas obligés de voter pour moi. Il y a plein d'excellents blogs!

22 janvier 2007

Le réchauffement les laisse froid


Je participais ce week-end aux premiers "Ateliers de la terre" consacrés au réchauffement climatique, réunis à Courchevel. Les interventions étaient d'une grande qualité, évitant soigneusement le catastrophisme. Quelques regrets, néanmoins: On n'a pas assez pris en compte le progrès technique et l'innovation. Or, je suis convaincu que l'on ne peut plus poser la problématique de la diminution des émissions de carbone sans se demander comment le progrès technique va nous aider à moins consommer des énergies fossiles, pour nous chauffer ou nous déplacer. C'est la raison pour laquelle la protection de la planète n'est pas au contraire l'ennemie de la croissance.
Par ailleurs, alors que le "suspens Holot" doit prendre fin ce matin, aucun représentant des candidats sollicités n'avait fait le déplacement, mis à part Corrine Lepage.
Cela montre à quel point ce débat essentiel est cruellement absent de la campagne, comme d'ailleurs les autres dossiers internationaux.
PS: la belle photo ci-dessus est signée Staffan Widstrand elle est tirée d'une magnifique exposition photographique, en milieu naturel, intitulée "les sommets de l'image". Elle est proposée jusqu'au 22 avril à Courchevel et destinée à sensibiliser l'opinion sur la problématique de la protection des richesses naturelles menacées par le réchauffement climatique.

18 janvier 2007

Comme un défaut


C'est sorti comme ça, comme une mauvaise blague mais tellement irresistible... "Le seul défaut de Ségolène Royal, c'est François Hollande". Je m'interroge: Arnaud Montebourg fait-il partie de ces gens capables de (se) tuer pour un bon mot? Ou bien y a-t-il quelque chose que nous ne captons pas bien sur ce couple Royal-Hollande?
Complices ou rivaux?Quel sorte de pacte unit donc ces deux là? Y a-t-il quelque secret quelque part, que nous ne connaissions pas et qui brouille notre réception?
J'avoue ma perplexité.
Je suis en effet frappé par le génie que met Ségolène Royale à malmener son compagnon depuis sa désignation. Humilier serait un mot un peu fort mais j'ai néanmoins hésité à l'employer.
Pendant les voeux à la presse de la candidate, par exemple, François n'eut droit, par exemple, qu'à une petite tape sur le bras. Lorsqu'elle est descendue de la tribune, Ségolène avait d'abord chaleureusement salué Bianco et Chevènement.
Et que dire de l'accueil reservé par elle à la proposition fiscale de Hollande suggérant d'alourdir les impôts des contribuables gagnant plus de 4000€ par mois? Elle est semble-t-il approuvée par une majorité des sympathisants socialistes. Pourtant, Ségolène n'eut de cesse de renvoyer son compagnon à ses chères études, avant de choisir Strauss-Khan comme conseiller économique...
J'entends d'ici votre objection: C'est que, croyez-vous, elle veut tellement éviter le reproche de favoritisme qu'elle en fait peut-être un peu trop en le rabrouant. Sauf que ça ne tient pas la route! Ne nous ont-ils pas montré à quel point ils formaient un couple moderne? Et convaincu qu'aucun des deux ne devait à l'autre sa réussite politique? Il s'agit après tout du premier secretaire du PS! Lequel a joué un rôle essentiel dans la nomination de Royal. En doutez-vous? D'abord, il ne s'est pas présenté lui-même alors que certains l'y poussaient et qu'il pouvait y prétendre. Ensuite, il a tourné le dos à Jospin qui n'attendait qu'un signe de lui pour débarquer. Puis, non content d'avoir ainsi dégagé le terrain, il a refusé de soutenir DSK qui était, dans le camp majoritaire, le plus ancien dans le grade le plus élevé. Pareille "neutralité" avait tout d'un soutien résolu...
Et vous pensez qu'après ça Hollande doit se mettre en congé si sa compagne est élue?
Je ne partage pas du tout l'opinion, un peu vite admise, qui considère comme impossible éthiquement , que la presidente élue nomme Hollande à quelque poste de responsabilité, et qu'il ne lui resterait, pour se consoler, que le rôle de "première dame". Au contraire, je ne vois vraiment pas au nom de quoi il ne pourrait pas être ministre, et même un ministre important du gouvernement. Premier ministre serait peut-être un peu trop "intime", compte tenu de la singularité du couple exécutif, mais si Hollande n'avait pas été le compagnon de Royal, la seule récompense politique envisageable pour le chef du parti ne pouvait être que Matignon.
Or, pour l'instant, jusqu'à ce qu'une "ligne jaune" ne soit franchie par un de ses porte-parole (s'y sentait-il autorisé?), Ségolène Royal s'employait à marginaliser François Hollande.
Ce couple politique représente une énigme qui, à mon avis, ne peut être comprise, à défaut d'être résolue, qu'en empiétant sur l'histoire de leur couple..tout court. Or, c'est un domaine dans lequel aucun journaliste français ne s'estime autorisé à pénétrer. Il y a bien des rumeurs qui circulent ici ou là, que certains qualifieraient volontiers de "délits d'initié", mais jusqu'ici nul ne s'est autorisé à enfreindre la règle. Jusqu'à quand?

13 janvier 2007

Je te laisse, j'arrive aux voeux...

Incongruité française: les "voeux". Trois semaines de salamalèques et autres courbettes auxquels s'adonnent avec frivolité l'élite du pays. Dès les premiers jours de janvier, le Président ouvre le bal avec les voeux au gouvernement, puis aux parlementaires, corps diplomatique, autres corps constitués, "forces vives" (représentant les "vrais gens") et ainsi de suite par ordre décroissant de prestige. Cela se termine par les voeux à la presse. Les journalistes en dernier, donc, mais tout de même invités à l'Elysée autour d'un buffet très réputé pour sa qualité (Ah! ce tartare de Saint Jacques au vinaigre de réglisse).
En ce qui me concerne, en raison d'un fond de sentiment républicain, je réponds à cette invitation et à celle-là seulement. C'est à cette occasion que je croise des vieux camarades que je ne vois plus qu'une fois par an...
Car, c'est là ou ça devient cocasse, emboitant le pas au Président, tout le monde ou presque l'imite, à commencer par le premier ministre et chacun des ministres, secretaire d'Etat etc ...Et chacun d'organiser "sa" petite sauterie de début d'année. Comme ce sont souvent les mêmes, ou presque, qui sont concernés, tantôt comme invités, tantôt comme invitant, on comprend que leur activité "professionnelle" se trouve particulièrement allégée, disons jusqu'au 20 janvier. Heureusement qu'il y a les télephones mobiles pour rester en contact! Mais il n'est pas rare, en cette période, que votre conversation avec tel ou tel de ces édiles soit brutalement interrompue par un: "Je te laisses, j'arrive aux voeux de machin..." Un ancien ministre que je sollicitais ces jours-ci pour un "entretien de France 24", ou une interview si vous préférez, me fit ainsi répondre qu'il s'excusait car il devait assister au même moment aux voeux de...son préfet de région. Bon sang mais c'est bien sûr! Une fois les voeux terminés à Paris, on attaque les voeux régionaux! A l'heure ou la France se met au régime pour corriger les excès des "fêtes", la classe dirigeante, elle, préfère prendre quelques kilos supplémentaires.
Cette année, toutefois, on a pu croire un moment à l'Elysée que l'on allait rompre avec la tradition du discours policé et assez assomant du début d'année, copié sur celui de l'année précédente. Le président de l'association des journalistes de la presse présidentielle (!) termina son discours de "voeux" par cette question qui était en effet sur toutes les lèvres: "M. le Président, s'il vous plaît, dites-nous si vous serez candidat..." Les voeux allaient-ils enfin servir à quelque chose?...Le Président joua parfaitement le jeu, faisant mine d'être surpris (personne n'est dupe, le discours est communiqué avant la cérémonie), avant de répondre: "Celle-là elle vient de loin...ça mérite que j'y réflechisse..."
Et chacun de se dire, alors, qu'il n'était pas encore temps de mettre tous ses voeux dans le même panier.

10 janvier 2007

La Fin du Journalisme?

Je suis invité ce vendredi après-midi à 17H sur France Culture à un débat sur ce thème, dans l'émission "Du Grain à moudre", de Julie Clarini et Brice Couturier, entre 17H et 18H. Je le dois évidement à mon papier du "Monde" sur les blogs. Sachez-le immédiatement je ne crois pas du tout, mais alors pas du tout, à la fin du journalisme. Je ne crois pas non plus que ce soit l'alpha et l'omega, ou un moyen de changer le monde, hélas.
Pour savoir comment capter France Culture dans votre région, allez ici .
Vous pouvez aussi podcaster l'émission ou l'écouter sur son site , qui est bien sûr rafraichi chaque jour en fonction du thème.
On pourra ensuite prolonger la discussion, ici ou ailleurs.
Chouette! je vais refaire de la radio...

La France championne d'Europe des SDF

Nous avons fait récemment un "débat de France 24" pour comparer la façon dont nos voisins traitent les SDF. La conclusion a été vite tirée: Pour des raisons différentes, du Nord au Sud de l'Europe aucun pays d'a sur le pavé autant de sans-abri que la France. Nous n'avons ni la solidarité familiale des pays du sud, ni la politique de logement des pays du nord et continentaux. En Allemagne, il n'y a pratiquement personne dans la rue qui ne l'ai réellement souhaité, parce que les landers ont construit des foyers en nombre suffisant pour les loger. Au Royaume-Uni, pays qui applique sans complexe le capitalisme intégral dans ses aspects les plus durs, Tony Blair a pratiquement fait disparaître le problème, comme le souligne cet article du Figaro. Bref, même si les choses ont semble-t-il commencé a changé sous l'impulsion de Borloo, voici une preuve supplémentaire que le modèle français n'a de social que le nom. Ou, dit autrement, que notre Etat obèse qui doit faire face à des charges exorbitantes ne fait plus son travail. Cela a forcément des conséquences dans le comportement des Français face aux urnes.

06 janvier 2007

Mon article dans "Le Monde"

L'article que vous avez pu découvrir ici a donc été publié hier dans "Le Monde". Bien sûr, il a subi quelques coupes pour rentrer dans l'espace disponible. Voilà une preuve supplémentaire de l'utilité du net: le seul texte fidèle à 100% ne se trouve qu' ici.
Mais je me pose cette question: qui lit les articles jusqu'au bout? J'ai des doutes. Combien de temps passez-vous à lire le journal? Et sur ce blog? Moi qui lit plusieurs journaux par jours, et suis payé pour ça, je finis par ne plus avoir les bon points de repère...
En fait il faudrait s'astreindre à publier des résumés au dessus des articles complets, comme dans les revues où les articles font 30 pages...ou des chapeaux. Ah! ces fameux "niveaux de lecture" enseignés par nos maitres de l'Ecole de Journalisme!
Cette note est courte. Vous serez certainement nombreux à la lire entièrement. Je n'en dirais pas autant des précédentes...

04 janvier 2007

Journalisme vs web (suite)

J'envoie cette contribution aux pages débats du "Monde", en réponse au point de vue de Jean-Pierre Elkabbach. J'espère q'il sera publié. Je vous en laisse la primeur:

Dans vos colonnes, Jean-Pierre Elkabbach s'inquiète de l'avenir du métier de journaliste à l'ère du web participatif. Il a raison. Mais la solution ne saurait se trouver dans une appellation journalistique contrôlée (par qui?). Le web 2.0 n'est pas une déontologie c'est un outil qui a déjà tout changé. Qu'on le veuille ou non, le temps où une petite élite journalistique décidait de ce qui se dit et ne se dit pas et de qui a le droit de le dire est déjà révolu. Sur le net rien n'est jamais définitif. Tout est soumis à la critique en temps réel. Les citoyens ne veulent plus, par exemple qu'on leur dise qui a ou non les qualités requises pour être candidat aux élections.
L'une des raisons pour lesquelles la France compte un tel nombre de blogs- et probablement davantage qu'aux Etats-Unis si on le rapporte au nombre d'habitants- s'explique par la déception des citoyens dans les medias "dominants". Les internautes ont parfaitement compris que la concentration capitalistique dans le monde des medias, peut-être nécessaire sur un plan économique, n'a pas favorisé la liberté d'expression. Les journalistes sont encore trop dépendants du monde politique dans leur plan de carrière. Il y a encore beaucoup de sujets qu'il n'est pas recommandé d'aborder si l'on ne veut pas tomber en disgrâce. Voyez le nombre de journalistes reconnus qui ont trouvé refuge dans leur blog. Voyez aussi tous ceux qui estiment qu'il n'y a que sur leur blog qu'ils peuvent dire réellement ce qu'ils pensent. Davantage que d'une "évolution" du journalisme, il s'agit plutôt d'un retour aux sources, avec des moyens artisanaux. Les blogs permettent pour un coût quasi nul de s'adresser à un large public devant lequel notre responsabilité personnelle est engagée.
Sur internet, comme chacun le sait le "pire" côtoie le meilleur. Mais après tout ce n'est pas le privilège des blogs! A terme les réputations, bonnes ou mauvaises, redistribueront les cartes aussi sur internet.
En principe, nous autres journalistes ne publions rien qui n'ait été préalablement vérifié et recoupé. On sait bien qu'en réalité beaucoup d'informations tronquées ou fausses sont diffusées dans les journaux, à la radio ou à la télévision. Pire. Il y a certains sujets sensibles politiquement sur lesquels les medias français n'enquêtent pas, ou pas assez, alors même qu'eux seuls en auraient les moyens. D'une certaine façon, il s'agit d'une nouvelle "trahison des clercs". Il faut parfois aller chercher dans des journaux étrangers des informations sur notre propre vie politique! C'est ce que le public reproche aux journalistes français, en se tournant vers internet ou il a l'impression qu'en tout cas même s'il peut être abusé, on ne lui cache rien. A lui d'apprendre à faire le tri, ou à qui s'adresser pour l'aider à le faire.
Prenons deux exemples "limites" du défi qui est lancé aux journalistes:
Les internautes sont particulièrement friands des théories conspirationnistes sur les événements du 11 septembre 2001. Ces thèses sont particulièrement perverses et difficiles à contester. Aucun journaliste sérieux ne peut les cautionner. Mais exciper de sa qualité et de sa déontologie journalistique ne suffit pas. A terme il faut parier sur l'intelligence et ne pas donner l'impression de vouloir cacher quelque chose.
Deuxième exemple: les images de la pendaison de Saddam Hussein tournées sur un téléphone portable et diffusées sur internet. L'accession du grand public aux nouvelles technologies a rendu caduc le débat déontologique sur les images que l'on peut montrer ou pas. Mieux: ces images, en montrant cette exécution sous son véritable jour, ont dit la vérité et découragé toute tentative d'écrire une version officielle. Mais ces images ne rendent pas superflues une enquête journalistique sur les circonstances de la pendaison, chose qui n'est pas à la portée de n'importe quel blogueur propriétaire d'un téléphone mobile.
Prenons, enfin, l'argument de la gratuité. Il a déjà été utilisé contre la presse gratuite. Elle était censée constituer une concurrence déloyale aux "vrais" journalistes. Or il est prouvé qu'elle a attiré un nouveau lectorat. Certes tout ce qui est de bonne qualité à un coût. Mais c'est aux diffuseurs de rendre solvable la demande d'information. Après tout, il n'est pas nécessaire de payer avant de pouvoir écouter la radio! La publicité est un moyen détourné de faire payer l'élaboration de l'information par le consommateur.
Comme les radios "libres" dans les années 80, le web 2.0 est en train d'obliger les journalistes à se remettre en question. Et tant mieux.
Il est illusoire de prétendre arrêter ce mouvement, comme il est vain de vouloir stopper la mondialisation économique. Est-ce qu'on arrête le courant avec ses mains? Il vaut mieux apprendre à nager!

01 janvier 2007

L'Europe, impuissance moraliste

La peine de mort est un châtiment barbare. Je crois bien que j' en ai la conviction à pu près depuis que j'ai l'âge de raisonner. Le spectacle de la pendaison de Saddam Hussein opère à cet égard comme une piqûre de rappel, et donne une occasion d'approfondir cette conviction. Puisque même l'exécution d'un des plus grands tyrans du XXème siècle, responsable de l'assassinat de centaines de milliers et peut-être de millions d'innocents nous soulève le coeur, c'est donc bien que nous avons raison de ne pas y voir un acte de justice, mais plutôt de vengeance.
Sachant que je devrais commenter cet "événement" sur France 24 j'ai d'ailleurs éprouvé du mal à m'endormir vendredi dernier. J'avais l'impression d'être convoqué à une exécution capitale publique. Ce qui fut bien le cas. Je considère pourtant que la décision de diffuser ces images que certains ont trouvé indécente n'est même plus un objet de débat. Sur internet, on peut même visionner la scène tournée jusqu'au bout avec cris et chants de réjouissance. Et puis, je ne crois pas que nous autres journalistes devons nous ériger en autorité morale. Nous devons seulement mettre en garde et éclairer les évènements, pas les occulter ou les édulcorer.
La mort reste pourtant un tabou et j'observe avec satisfaction qu'aucune télévision n'a diffusé la séquence du châtiment jusqu'à son terme.
Il est évidement désolant, tragique au regard de la justice (mais ô combien prévisible!), de voir que Saddam Hussein ne répondra pas de ses crimes les plus graves, ceux dans lesquels certains gouvernements occidentaux ont sur la conscience de lui avoir apporté une forme de soutien...
Il faut bien, aussi, faire cette constation historique: partout ou presque la "mort du tyran" a bien souvent constitué un exutoire. Et quoi qu'il en coûte, que l'exécution de Saddam Hussein ne provoquera sans doute pas l'explosion de violence qu'annoncent déjà certains.
En Irak, ses partisans chercheront à perpétuer la vendetta contre les chiites. Le niveau déjà très élevé de la violence quotidienne ne devrait pas en être très modifié. Une chose s'imposera néanmoins à eux: Ils ne peuvent plus caresser le rêve de le réinstaller au pouvoir. Saddam lui-même, d'ailleurs, croyait très fermement à cette éventualité. Le reportage de Patrice Claude, dans le Monde, nous apprends d'ailleurs qu'il plaisantait avec ses gardiens américains en leur promettant de leur faire visiter son pays, une fois sa couronne retrouvée. Les quelques protestations venant d'autorités religieuses sunnites, ou de mouvements islamistes comme le Hamas palestinien, sont purement formelles et seront vite oubliées. Il faudra se rendre à l'évidence: Bien peu pleureront l'ancien dictateur ou le considéreront comme un martyr dans le monde musulman. Et pour une raison simple: Saddam a surtout massacré des musulmans, de toutes sortes, en ne faisant guère de distinctions dans son délire paranoïaque entre chiites (qu'il situait en compagnie des juifs et des mouches au sommet de sa haine mais n'en avaient pas pour autant le monopole), et les autres.
Dans le pire des cas la guerre civile continuera comme avant et aboutira à une partition. Dans le meilleur, la disparition de Saddam permettra d'associer les anciens baasistes à un processus de réconciliation nationale. En tout cas, quoi que l'on pense de la peine de mort, il nous faut bien admettre que les irakiens ont procédé à un acte de souveraineté "révolutionnaire", comparable aux exécutions de Louis XVI, d'Eichman, ou plus près de nous des Ceausescu. Au fond, seul les bolcheviks ont été plus loin dans l'abjection en faisant disparaître toute la descendance des Romanov.
L'humanité aura beaucoup progressé le jour ou elle s'entendra sur une justice internationale refusant la peine de mort. En attendant, il n'y avait aucune raison de priver les irakiens de ce procès.
C'est pourquoi la réaction officielle de l'Union Européenne est si affligeante. Qu'elle réaffirme son opposition absolue à la peine capitale est naturel, mais guère étonnant et un peu court. Qu'une grande institution politique qui souhaite rayonner se borne à cette seule profession de foi humanitaire et moraliste en dit long sur son impuissance politique.
L'Europe s'est bâtie sur un rêve de paix dans un continent que les guerres avaient saigné. Ce rêve s'est réalisé-à la Yougoslavie près- mais ses frontières s'étendent. Mais faire de cet horizon iréniste le fondement d'une diplomatie est une grave erreur car elle occulte la cruauté du monde. C'est ne pas voir que tous les peuples ne vivent pas la même histoire que nous, en même temps que nous. Que les nations sont égoïstes et pas encore prêtes à s'unir derrière l'étendard "humanitaire" de l'UE ou de l'ONU. Réaffirmer nos valeurs, c'est essentiel et il ne faut surtout pas céder, en ce domaine comme en d'autres, à la tentation du relativisme culturel. Mais le fait que les institutions européennes et la plupart des gouvernements (à l'exception de quelques-uns comme ceux de Merkel et de Blair) ne soient pas allés plus loin dans leur analyse nous condamne à ne construire qu'une Europe isolée et aveugle, un "hymne à la joie"...
Au fond cette réaction synthétise bien l'impuissance de l'UE à être autre chose qu'une immense association de consommateurs charitables. Un super "Que choisir". Voyez Margot Waldström, vice présidente de la commission européenne (et en charge de la communication), qui vient de publier la liste des dix actions les plus importantes de l'Europe en 2006. Qu'a-t-elle placé en tête de liste? La baisse des tarifs de communication sur les téléphones mobiles entre pays de l'union...Tout un programme non?
Bonne année 2007 à tous.

16 décembre 2006

Tu seras pacha mon fils...


Depuis ma dernière note sur les prix Nobel, j'ai lu et adoré "Neige", d'Orhan Pamuk, qui est sans aucun doute l'oeuvre d'un écrivain marquant. Tout comme le restera son discours de reception du prix, admirable et émouvante "lettre au père". Je vous le recommande vraiment.

13 décembre 2006

Agitation


Il y a des jours où se dit-encore plus que d'habitude-que l'on a décidement de la chance d'être journaliste. Par exemple quand on rencontre des hommes aussi remarquables que Marc Peschanski, directeur de i-stem, laboratoire de recherche sur les cellules souches. C'était clair, limpide, intelligent. La France a pris du retard dans ce domaine à la suite de plusieurs lois bioéthiques déficientes.
Peschanski est l'un de premier médecins à avoir greffé des neurones sur des malades atteints de la chorée de Huntington, maladie dégénérative du système nerveux, caractérisée par des tremblements anarchiques incontrolables, on appelait ça, jadis, "la danse de Saint-Guy". Il a aussi mis au point un test génétique qui permet de savoir si l'on est porteur du gène responsable de cette affection. Problème: Le patient positif sait qu'il développera avec une presque certitude la maladie, aux environs de 40 ans. Ca n'incite pas à faire le test, mais au moins c'est un moyen-le seul- de mettre à l'abri sa descendance, par un tri d'embryon.
Demain avec les recherches sur les cellules souches embryonnaires, ces cellules nerveuses pourront se spécialiser...En somme les médicaments du futur. Le débat lancé par l'Eglise catholique est totalement déplacé et l'accusation d'eugénisme, scandaleuse puisqu'il ne s'agit pas de créer un homme sur mesure mais seulement d'éviter des vies de souffrance, au stade de l'embryon.
Dans un registre différent, j'espère que vous n'avez pas raté Abdulaye Wade, président de la République du Sénégal, premier chef d'Etat invité de France 24. J'avoue que je ne m'attendais pas à cette reconnaissance si vite. Avis à tous les autres.
Petit scoop ensuite avec Jacques Attali qui nous a dit deux choses sur Ségolène Royal:
1: Il ne voit pas comment elle peut-être battue l'an prochain.
2: Elle n'a pas encore de vision du monde, condition essentielle selon lui pour faire un(e) bon(ne) président(e)...mais elle va s'y mettre. Il serait plus que temps...

09 décembre 2006

Lancement réussi


Le lancement de France 24 a été de l'avis général une réussite. Evidement nous sommes conscients d'avoir encore une marge considérable de progression...Mais compte tenu des circonstances, le travail accompli par tous fut assez énorme. Finalement le génie "français" ça existe peut-être. Je mets des guillements car, comme on le sait, une partie de l'équipe n'est pas française.
Dès mercredi soir, j'ai interviewé le journaliste Thomas Friedman, qui avait publié, en 2003, un éditorial intitulé "Notre guerre avec la France" et qui disait notament ceci: "La France n'est pas notre rivale, elle est notre ennemie". C'était évidement dans le contexte du "veto" de la France au conseil de sécurité de l'ONU sur le mandat réclamé par les Etats-Unis en Irak. Dans un autre papier, il avait suggéré de donner le siège permanent de la France à l'Inde!
Aujourd'hui, Friedman-qui affirme beaucoup aimer la France- ne regrette pas l'excès de son propos. Il continue de penser que l'histoire eut été différente si l'Amérique ne s'était pas lancé dans l'aventure toute seule.
Sa participation à la soirée de lancement est, pour moi, un signe fort que France 24 ne sera pas une chaine au service de la diplomatie française ni "taillée sur mesure" pour qui que ce soit d'ailleurs. Mais je sais que nous devrons donner davantage de gages de nos bonnes intentions.
Pour autant, je trouve normal que nous aillons aussi interrogé Dominique de Villepin ce soir là. Il était interessant d'avoir la réaction de l'homme du "discours de l'ONU" au rapport Baker. Evidément le gouvernement, comme l'opposition encensent ce document.
Le lendemain, toutefois, dans le premier "débat de France 24" la tonalité était toute différente. Pas seulement de la part de Laurent Murawiec, néo-conservateur déclaré qui y voit dans les préconisations de Baker-Hamilton une capitulation pure et simple devant les dictatures moyen-orientales. Denis Lacorne, professeur à Science-po, y a vu un "tissu de banalité" et l'expert militaire Pierre Servent était à peine plus enthousiaste.
Ce rapport est assez peu original, en effet, et il relève finalement davantage de la politique intérieure américaine. Passons.

Le lendemain, encore des propos assez critiques pour la France et ses gouvernants chez Pascal Lamy premier invité de mon "entretien de france 24". Le directeur général de l'OMC estime que si la France s'adapte moins bien, ou moins vite, que ses voisins à la mondialisation, la faute en incombe à ses gouvernants. C'est à eux et à personne d'autre que revient la responsabilité d'élever le niveau éducatif de la population. C'est à cette condition que nous seront peut-être capables de créer des emplois qualifiés en nombre suffisant pour remplacer ceux qui sont détruits ou délocalisés. Et si notre système universitaire est si défaillant ce n'est ni la faute de la mondialisation, ni celle de l'Europe, mais bien celle des gouvernements successifs qui ont été incapables de le moderniser. Cela fait 20 ans que ça dure (j'y reviendrai dans une prochaine note avec l'anniversaire des évènements de 1986).
Il y avait plus fort, à mon avis dans l'interview de Lamy: En réponse à une question, il estime qu'il faut se préparer à un mouvement d'émigration des peuples européens vers des pays émergeants dont l'économie est plus dynamique que la notre et où se créeront de plus en plus d'emplois à haute valeur ajoutée.Associer
Après tout, dit-il, un tel processus n'est pas inédit et on l'a déjà observé au début du XXème siècle quand les Européens émigraient aux Etats-Unis, en Australie ou en Nouvelle Zélande...
Le risque pour notre vieux continent, dont le poids relatif dans le "monde plat" va mécaniquement baisser, c'est que ses cerveaux fasse leurs valises pour l'Inde ou la Chine et qu'il ne soit plus en mesure que d' attirer que des immigrants indigeants en provenance de pays pauvres, attirés par un généreux système de protection sociale et d'assistance qui sera devenu impossible à financer.
D'où l'urgence de réformer notre marché du travail. Ce n'est pas du libéralisme, c'est du bon sens et un simple instinct de survie si on est attaché au maintient d'une culture européenne vivante et... généreuse!

PS: Ce blog sera bientôt consultable sur le site de France 24

05 décembre 2006

Ce qui s'est passé lors de PSG-Hapoël Tel Aviv

Témoignage consternant sur ce qui s'est passé lors du triste match Psg-Hapoël TA, par un supporter juif qui se trouvait au parc ce soir là. Rien d'autre à dire.

04 décembre 2006

France24 avant France24


En exclu, 48 heures avant le lancement mondial de France 24, mes amis de memoire vive.org ont mis en ligne une émission "à blanc" (ou "à sec", en anglais "a dry run") d'un débat de France 24 tel que j'en animerai tous les jours (du lundi au jeudi). Ce jour-là nous ne nous étions pas organisé à temps pour diffuser un certain nombre de clips "politiques" visibles sur Daily motion. C'est pourquoi je trouve que ce débat manque d'images. Mais c'est pour cela qu'on s'entraine!

Ségolène Royal et le "cas" Hezbollah


C'est toujours la même chose avec Ségolène Royal. A priori, on met en doute sa compétence au delà d'un plan com pour le chabichou. Comme le dit Sarkozy à propos de la gaffe de sa rivale, un candidat à la présidence de la République "devrait avoir une idée précise de comment on évite que le conflit entre Palestiniens et Israëliens dégénère."
C'est bien le problème. Car Ségolène Royal, mais pas davantage que Sarkozy ou qu'un autre candidat n'a d'idée précise sur la question qui obsède la planète: Comment faire la paix à Jérusalem. On peut aller plus loin: Aucun grand dirigeant du Monde- pas même Kofi Annan (!)- n'a d'idée précise sur la question. Je dirais la même chose d'Ehud Olmert et de Mahmoud Abbas. Pourtant ce serait simple: Il suffirait que le premier arrête la colonisation des territoires, propose de se retirer sur la frontière de 1967 ou d'échanger des territoires équivalents situés aujourd'hui en Israël. Quand au second il renoncerait par exemple au fameux "droit au retour" des réfugiés qui est une façon sournoise de nier la "raison d'être " d'Israël: d'être, justement, un Etat juif.
En réalité les seuls qui aient une idée précise se moquent pas mal que la situation dégénère ou non. Ce sont les extrémistes comme Ahmadinedjad ou Lieberman. Le premier rayerait bien Israël de la carte, quand au second, il transfererait bien tous les Arabes d'Israël et des territoires dans un nouveau "pays" bâti on ne sait pas très bien où d'ailleurs.
Mais revenons à nos candidats, et surtout au Liban. Mme Royal s'est pris les pieds dans le tapis libanais. C'était bien prévisible. Il ne s'agit pas de cette histoire de traduction qui est, en soi, ridicule. Il est toujours possible de ne pas entendre ou comprendre ce qu'un interlocuteur vous dit dans une langue qui n'est pas la votre et qui peut être traduite approximativement. C'est un mauvais procès. Surtout quand il y a beaucoup plus grave, et que personne ne semble voir: Se rendre au Liban en ce moment, interdisait moralement de ne pas choisir clairement son camp. Au lieu de celà, Ségolène Royal a cru bon de finasser avec les rhétoriciens du Hezbollah.
En entrant dans une conversation hors sujet sur Israël avec un député du Hezbollah, elle est tombée dans le piège qu'il fallait éviter. Car le Hezbollah excèle à mettre en avant sa lutte armée contre "l'ennemi sioniste" pour entretenir son prestige auprès des libanais. Sauf qu'ils sont de moins en moins nombreux à être dupes. Le sujet de la visite de Mme Royal n'était pas Israël, sujet glissant pour tout politicien français, mais bien l'avenir du Liban.
Or, la France a un devoir de protection du Liban. Et aujourd'hui cela veut dire défendre l'union sacrée des chrétiens, des musulmans sunnites et Druzes contre la Syrie et ses seïdes fondamentalstes. Le Liban est en danger de tomber dans les griffes du fascisme islamique. Son premier ministre, officiellement soutenu par les occidentaux (mais de plus en plus comme la corde soutient le pendu), a dénoncé une tentative de coup d'Etat. Un ministre vient d'être assassiné pour s'être mis en travers du chemin syrien. Que faut-il de plus pour que l'on s'alarme?
Arrivant au Liban dans ce contexte quasi insurrectionnel, il était assez indigne de la part d'un homme politique français, fut-il une femme, de tenir une position d'équilibriste en prétendant veiller- un peu à la manière du CSA- à "l'égalité des temps de parole." Bref de faire comme si la démocratie, comme la diplomatie d'ailleurs, ça pouvait être "5 minutes pour les Juifs, 5 minutes pour Hitler."Ou plutôt 5 minutes pour les libanais qui attendent notre aide et se réclament de nos valeurs et 5 minutes pour les fous de Dieu.
Hitler, justement. On s'envoie trop souvent Hitler à la figure et c'est même une spécialité du Hezbollah dès qu'il s'agit de "l'entité sioniste". Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il s'agit de l'hommage du vice à la vertu, ne soyons pas manichéen. Mais enfin, si on y regarde de plus près, il y a quand même beaucoup de points communs entre le Hezbollah et le parti nazi. Ce projet communautaire, social, cette même organisation paramilitaire de la société, cette façon d'intimider le politique par la force physique et, bien sûr, cet antisémitisme obsessionnel. Jusqu'à la "technique du coup d'Etat" qui rappelle étrangement l'accession au pouvoir du fascisme et le nazisme en Europe. Cette façon de faire pression par la rue sur un gouvernement démocratiquement élu mais affaibli...avant de remporter des élections au moment politiquement favorable. J'entends d'ici l'argument: "Et les bombardement israéliens qui n'ont laissé que pierre sur pierre au sud Liban étaient-ils dignes d'une démocratie?" Sans doute pas, et les démocraties ont aussi leur indignité. Mais les Alliés, par exemple, tout en combattant le nazisme-ou parce qu'ils le combattaient- avaient eux aussi fait un usage démesuré de la force en bombardant Dresde et ses habitants. Personne n'a jamais qualifié ces bombardements de "nazis".
Une candidate française, si elle avait eu des idées claires et une vision du Monde aurait du profiter de sa visite pour résolument se ranger aux côtés des démocrates, dénoncer au moins la tentative de coup de force qui se déroulait pratiquement sous ses yeux. Sinon mieux valait s'abstenir. Comme les autres candidats qui en matière de politique étrangère n'ont guère fait leurs preuves jusqu'ici .
La réalité démographique du Liban est telle que le Hezbollah et ses soutiens (y compris le genéral Chrétien Aoun, de plus en plus souvent comparé à Pétain) pourraient être portés légalement au pouvoir. Il y a des précédents qui démontrent que la démocratie, ou plutôt ses aspects formels comme les élections, peuvent être dévoyés par les extrêmes. Les libanais qui se sentent proches de la France n'en veulent pas. C'est vers eux que devraient aller directement les dirigeants Français, sans se perdre dans le puzzle politique libanais.

22 novembre 2006

Bush et le chemin de Damas

Une couverture de Time en 89: Baker, main de fer dans un gant de velour deteste perdre...

Mon attention est attirée par cette brêve de l'excellent site mediarabe.info: Un journaliste de l'agence officielle syrienne se serait renseigné sur l'assassinat de Pierre Gemayel auprès d'un journal libanais pro-syrien...près d'une heure avant les faits!
Cela semble signer le forfait.
Ce qui est le plus stupéfiant dans cette histoire, c'est bien sûr la coincidence de l'attentat contre l'héritier d'une illustre famille chrétienne avec la visite du ministre syrien des affaires étrangères à Bagdad et le rétablissement de relations diplomatiques interrompues il y a 26 ans. La Syrie revient dans le jeu, avec l'assentiment de Washington où James Baker, chef de file des "paléo-conservateurs", président du groupe d'étude sur l'Irak et opposant de la première heure de l'intervention est désormais l'homme qui compte. Ses préconisations ont été mises en musique avant même d'avoir été officiellement présentées au président: Appeler à l'aide la Syrie et l'Iran. Surtout la Syrie.
Un analyste néo-con comme Laurent Murawiec (Hudson institute) me confiait hier que la réponse des républicains et de Bush à leur défaite cinglante aux élections, avait été de capituler dans l'heure et sans conditions devant l'axe du mal. Cela s'appelle la fin du voyage pour ces intellectuels idéalistes venus de la gauche et qui avaient misé sur Bush-fils pour appliquer leurs théories en matière de politique étrangère.
C'était bien la peine, en effet, si c'était pour dérouler aussi vite le tapis rouge à tous les dictateurs de la région. Demain faudra-t-il s'accomoder d'un Iran nucléaire pour avoir la paix en Irak?
Cela démontre à nouveau la cécité américaine en matière de politique moyen-orientale. D'une certaine façon la recommandation des néo-conservateurs n'était pas incohérente: Un changement de régime en Irak sans aller aussi à Damas n'avait guère de sens. C'est aussi l'avis d'un "réaliste" comme François Géré qui était de passage, lui aussi, à France 24 hier pour un "pilote", une émission non diffusée (qu'il en soit encore remercié).
Mais alors combien de soldats fallait-il envoyer? Et les Etats-Unis ont-ils vraiment la capacité de se projeter partout en même temps? Les pays arabes agités de rivalités tribales, minés par la corruption ont-ils la larme à l'oeil lorsqu'on leur parle de démocratie, surtout si celle-ci commence par avoir l'apparence d'un GI? Ils veulent peut-être qu'on les débarasse de leur tyran (en tout cas en Irak), mais est-ce pour adopter le parlementarisme?
Il en va différement avec le Liban. Et là, le soutien au mouvement démocratique libanais, fait avec le consours de la France a été plus efficace. Hélas, les nouveaux maitres de Washington ont l'air prêts à abandonner le mouvement du 14 mars à son triste sort en échange d'un petit service syrien en Irak. Après tout, Bush père avait bien lâché les chiites irakiens après la première guerre du golfe, alors qu'il leur avait promis sa protection.
Si ce scenario noir devait se vérifier, ce qui n'est pas sûr compte tenu de la combativité et du courage incroyable montré quotidiennement par les anti-syriens du Liban, alors on pourrait bien très rapidement regretter le temps des "néo-cons".

18 novembre 2006

Homonymie

Je n'ai pas eu le temps de vous raconter comment j'ai failli être enrôlé au FN! L'histoire est amusante.
Mardi dernier, en pleine "bourre" de préparation de "pilote" à France 24, je reçois à quelques minutes d'intervalle, deux coups de fils de confrères de Libé et du Monde: "Est-ce vous qui étiez ce week-end à la fête des Bleu Blanc Rouge? (BBR la fête annuelle des lepénistes). certaines "sources" nous disent vous y avoir vu et nous font une description assez précise de vous." Diable! Me voici donc tout près de la disqualification. Je fais immédiatement le rapprochement avec Anthony Attal, un dirigeant de la Ligue de Défense Juive (contrairement à ce qui est écrit il n'en est apparemment pas le président). La presse a affirmé qu'il avait été convié avec Dieudonné à la fête du FN. Apparemment quelqu'un cherche à détourner le soupçon sur moi afin de sortir la LDJ d'un mauvais pas. Son représentant est-il tombé dans le panneau? Je n'en sais rien, et je n'ai aucun moyen de le savoir, ne connaissant personne dans cette organisation qui a assez mauvaise réputation. Mais il semble que l'on cherche à se servir de moi et cela ne me plaît pas. Il est vrai que j'aurais pu, tout au plus, me trouver sur place en tant que journaliste, sans que cela soit le moins du monde compromettant. J'ai "couvert" le FN pendant des années et le précieux privilège de notre métier est, précisément, de pouvoir fréquenter des personnes peu recommandables ou considérées comme telles. Mais l'histoire est tout simplement inexacte. Je sais gré à ces deux journaux d'avoir vérifié leur information. D'autres l'ont peut-être reprise sans prendre cette précaution.
Le plus drôle c'est ce que certains ont mis en avant pour accorder un fond de vraisemblance à tout cela: Puisque j'avais accordé, en juillet, une interview à la revue d'extrême droite "Le choc du mois", je pouvais très bien faire désormais partie de la "famille". Alors là, les bras m'en tombent....Quelques ayatollahs de la profession (mais aussi quelques amis abusés) se sont émus de voir que mon nom figurait dans cette revue qui, depuis qu'elle reparaît, adopte semble-t-il (ce n'est pas une de mes lectures régulières!) un ton plus modéré et une ligne davantage pluraliste. Surtout peu de gens ont pris la précaution de lire ce que j'y disais: Je tente d'expliquer les raisons de la désaffection-peut-être provisoire- des Juifs de France (en tout cas les proches de la ""communauté") avec la gauche, mais j'explique pourquoi, à mon avis, Le Pen ne pourra jamais espérer capter une partie significative du "vote juif", tout simplement parce qu'il incarne la nostalgie de la droite vichyste et antisémite. Mon interlocuteur a été très courtois et j'ai pu relire l'interview avant parution. Je n'ai rien à en retirer.
Que l'on puisse une seconde me soupçonner, pour cette raison, de me rapprocher en quoi que ce soit du FN est risible mais aussi révélateur d'un certain terrorisme intellectuel insupportable. Diaboliser, voire criminaliser, Le Pen et ses amis depuis vingt ans n'a servi qu'à le faire prospérer électoralement et à esquiver les "bonnes questions" (comme disait Fabius) qu'il posait, en y apportant, bien sûr, de mauvaises réponses.
Tant pis pour ceux qui estiment que je suis devenu infréquentable...

15 novembre 2006

Avenir du blog

Je remercie tous ceux qui m'ont fait part ici (et pas sur la plate forme 20 minutes...) de leurs encouragements et de leur soutien.
Je ne me sens pas visé particulièrement, je fais juste quelques constatations sur une mauvaise engeance évoluant sur le net.
Mon propos ne visait évidement pas ceux qui expriment ici des désaccords avec mes points vue. Qu'ils sachent que j'apprécie autant (si ce n'est plus...) leurs contributions que celles de tous ceux qui sont d'accord avec moi...
Il s'agit de tout autre chose. Il y a des choses très intéressantes sur le net et la multiplication des vidéos amateurs dans la campagne électorale en fait partie. A mon avis elles concourrent à la manifestation d'une vérité malheureusement trop souvent absente du discours politique, ce qui a beaucoup favorisé, à mons sens, le developpement des extrêmes.
Que la pratique du "off" soit moralisée et restreinte au strict minimum me paraît très souhaitable. Puisse les "pros" en prendre de la graine!
Quand au futur site de France 24, il sera très attractif et comportera en effet une plateforme blog, au moins pour les collaborateurs de la chaine...A suivre.

14 novembre 2006

Confidence d'un blogueur lassé

Ces derniers temps, je consacre une bonne partie de ma journée à France 24 et lorsque je rentre, souvent fort tard, j'ai en général peu de temps pour consulter vos messages et les mettre en ligne. Là, je viens de refuser trois commentaires hostiles à mon post sur Karl zéro, venant d'internautes intéressés par ce qu'ils appellent les "théories alternatives" sur le 11 septembre. Pour eux, je ne suis qu'un journaliste stipendié qui désinforme ou participe au grand complot pour cacher la vérité. Ou bien je fais partie de ces gens qui préfèrent le "confort de leurs certitudes". On est sur une autre planète. Aucun argument ne permet de se comprendre. C'est une impasse totale, car nous nous réclamons tous de la Raison mais n'en avons pas la même définition. Aujourd'hui, d'ailleurs il est vain de se réclamer du rationnel.
Je ne pense pas que ces gens soient dangereux. Je pense qu'ils sont paumés. Gravement.
J'ai aussi, c'est plus banal, refusé quelques messages de nature antisémite provenant des amis de Dieudonné. Je le fais machinalement. Mais ce qui m'inquiète c'est que lorsque je regarde comment la plupart des internautes atterrissent sur ce blog, je suis consterné. A 90% ce sont des recherches google qui contiennent le mot "juif" ou "sioniste". Ou des combinaisons autour de ces mots clés. La plus demandée étant de loin "Sarkozy+Juif". J'avais en effet consacré un post à Sarkozy "traité de sale juif" par des manifestants pendant les émeutes des banlieues l'année dernière.
Je suis transparent, vérifiez vous même
Quand je vois tout cela je m'interroge de plus en plus sur l'utilité de tout ce cirque.
J'en conclus qu'elle est voisine de zéro. Je pense que beaucoup de gens se servent de nous pour se donner de l'importance et je pense que vous me lirez de moins en moins ici.

02 novembre 2006

Comment peut-on être smicard?


Je signale ce post très interessant de Daniel Schneidermann, dans le Big Bang Blog. On n'en attendait pas moins de l'indispensable redresseur de tors du PAF: Dévoiler les débats internes d'"Arrêt sur image". Je ne suis pas surpris que certains journalistes soient égarés par une méfiance instinctive envers tout ce qui peut être de près ou de loin assimilé à "la droite". De ce point de vue, Sarkozy, mais aussi TF1 sont "de droite". Cela nourrit l'estime qu'ils ont d'eux-mêmes. La méfiance ne me gêne pas. Je dirais plutôt que le scepticisme est de rigueur dans notre métier, ce qui n'est pas à confondre avec la méfiance qui a une versant trop négatif. De toute manière la méfiance, ou plutôt, donc, le scepticisme professionnel, le recul ou la distance sont des attitudes bienvenues lorsqu'elles s'appliquent à tout le monde et pas seulement à la droite....Or, beaucoup de journalistes ont tendance à investir toute démarche, pensée ou action réputée de gauche d'un a priori favorable. Comme le dit Daniel l'enfer est pavé des meilleures intentions, et dans le cas qui nous occupe (les smicards comme "cible" potentiellement récupérable dans la campagne de Sarkozy), le procès facile que l'on peut faire à TF1 de vouloir influencer l'audience pour qu'elle soit plus receptive aux thèmes de l'ami de Martin Bouygues, empêche tout simplement de poser la seule question interessante, journalistiquement:
Peut-on envisager le retour vers l'emploi d'un nombre important de chômeurs dans un pays ou l'écart est si infime entre la situation matérielle d'un smicard et celle d'un inactif qui vit de revenus d'assistance?
Sarkozy pose ce problème et c'est mal vu à gauche, sauf par Ségolène Royal peut-être. Mais est-elle encore de gauche, vous répondrons aussitôt les belles âmes? Dans le temps, être "travailliste", c'était être de gauche, socialiste même. Il semble que la gauche rejette désormais ces valeurs et qu'elle ait trouvé avec les chomeurs une catégorie plus "prolétarienne" que celle des smicards.

Il y a chomeur et chomeur, mais aujourd'hui, il en est qui ont une vie plus agréable que celle des femmes de ménage ou des caissières. Il est faux de dire que tous les chomeurs font tout ce qu'ils devraient pour retourner à l'activité. Le système ne les encourage pas à se comporter autrement et, en "homo economicus", ils arbitrent en permanence entre leur situation et celle qui deviendrait la leur en cas de reprise d'une activité. Et c'est vite fait, la conclusion est qu'il vaut mieux ne pas devenir...smicard. Comment expliquer, autrement que par des préoccupations d'ordre moral supérieures, le fait que malgré celà les smicards préfèrent le rester plutôt que de goûter aux délices de l'oisiveté? Pourquoi la gauche est-elle devenue à ce point amorale, renonçant à récompenser l'effort et le mérite, au mépris de toute justice?

30 octobre 2006

Lula four more years!


Voilà. Le Brésil l'a révé, Lula l'a fait. Le fondateur du Parti des Travailleurs, ancien ouvrier metalo et syndicaliste vient d'être réelu pour 4 ans. Il a triomphé dans cette exercice si difficile aux hommes de gauche: sortir intact et même renforcé, de l'exercice du pouvoir et de ses ombres. Destin extraordinaire que celui de cet homme fêté à la fois par les pauvres et par le FMI. Lula est devenu social-démocrate, et voyez comme, depuis, ses amis altermondialistes qui se réunissaient jadis autour de lui, à Porto Allegre, se sont subitement détournés. Ils ne l'ont pas rejeté mais l'on juste dégagé de leur Olympe. Ils font désormais les yeux doux à Chavez, un vrai anti-impérialiste celui-là, où à Evo Morales qui suit ses traces et bâtit un axe avec le très fin Ahmadinedjad. A la différence de ceux-là, Lula était trotskiste dans sa jeunesse. Mais il semble qu'il n'y ait qu'en France que les trotskistes doivent le rester à vie, et même qu'ils se multiplient par générations spontanées...
Lula aide les pauvres à l'être moins. Il prouve chaque jour que l'Etat a encore un rôle à jouer en politique. Mais il dit aussi ceci: "J'ai appris dans la rue, et non pas à l'université que l'on ne peut dépenser que ce que l'on a". Certes, ce n'est pas tout à fait exact, mais il semble que ce viatique ne soit guère plus enseigné à l'ENA...La rue c'est quand même une belle école du réel.
Lula croit, comme Mme Royal, a la démocratie participative. Ségolène s'est emparée du sujet, elle l'a "épongé", mais elle on la traite de "populiste". De Lula, nul n'ose encore dire cela. On observe seulement qu'il semble populaire.
Au fait, c'est drôle mais "Ordem e progresso" ça sonne un peu comme "l'ordre juste", non?
Faisons un rêve, mes amis, qu'un jour en France un homme ou une femme issu(e) du peuple et du syndicalisme, puisse accéder à la fonction suprême...
Ceci encore:
-Bonne nouvelle, DSK annonce que la campagne interne au PS "entre dans la réalité". Signe que l'on avait raison de souligner ici à quel point elle était , jusqu'ici, surréaliste...Mais je crains fort qu'il n'entende pas la même chose. Il veut dire que les militants ouvrent les yeux sur la vraie nature de sa rivale. Quelque chose me dit quand même qu'en demandant le retrait des CRS des banlieues, DSK a commis un déni de réalité...
-Hollande, après le chahut du zénith, prie les militants de ne pas se comporter "en supporters". Comme quoi ma comparaison avec le foot n'était pas totalement déplacée....

28 octobre 2006

Les hauts de hurlement


J'ai écouté sur le net le discours de Ségolène Royal au Zénith. Remarquez d'abord comme nous sommes friands de ce qui est prohibé( les enregistrements étaient interdits), quelque soit l'intérêt réel que présente un meeting politique. J'en ai couvert des centaines et franchement je ne regrette pas ce temps là. Ça m'a fait un peu l'effet d'une cure de jouvence. Et j'ai trouvé que cela ne volait pas très haut. La ci-devant favorite des sondages et des media qu'elle fait bien vendre a toutes les peines à faire passer ses idées qui sont souvent intéressantes (même le jury populaire qui gagnerait seulement à ne plus s'appeler ainsi), car dans ces occasions il faut surtout brosser le militant dans le sens du poil (ça donne des chefs d'oeuvres pompiers du genre: "mes chers camarades, sans vous rien n'est possible, mais avec vous tout devient possible"). Et, mon dieu, que c'est bête un militant! J'avais oublié à quel point... Quitte à régresser, je préfère encore des supporters de foot, c'est moins prétentieux.
Comme l'enregistrement a été pris par des fabiusiens, on entend régulièrement des beuglement: "Laurent président!", ou encore "Le projet! le projet!" (le projet socialiste, on l'aura compris, d'une indigence qui n'a d'égal que l'indulgence avec laquelle la presse française l'a accueilli). Ce projet, heureusement, les mieux placés pour savoir qu'il est totalement irréaliste et qu'il mettrait la France plus bas que terre en six mois, ce sont les candidats eux mêmes. Même Fabius le sait, mais toute sa tactique consiste à lui coller au maximum pour épouser l'aile gauche du parti, cette combien fameuse aile gauche censée être la seule voie pour gagner une élection interne. On verra bien. DSK qui n'y croit pas une seconde non plus, louvoie. Mais cela donne des vrai instants de grâce, de lucidité, comme par exemple lorsqu'il affirme qu'il ne verrait pas d'un mauvais oeil qu'EDF sponsorise demain une école d'ingénieur. Même Sarkozy n'ose pas aller aussi loin, et il a tort. Je vous renvoie à l'étude en tous points remarquable que consacre cette semaine "The Economist" à la France et en particulier au volet consacré aux universités qui démontre magistralement comment le refus obstiné et hypocrite par la gauche de toute forme de sélection, de concurrence et d'autonomie des universités a accentué finalement la production d' inégalités toujours au profit de l'élite (qui envoie ses enfants dans les grandes écoles) et aux dépens du peuple (qui n'a pas encore compris que les universités -80% d'entre elles en tout cas, celles qui ne trichent pas- délivraient des diplômes qui ne valent guère plus que le prix du papier.
Mais enfin, Ségolène Royal réussit quand même à glisser entre deux hurlements (le projet! le projet!)...que "ce n'est pas avec le seul projet que l'on ira au devant des français", ce qui est quand même le but d'une élection présidentielle.
Tout ça pour dire qu'en écoutant cet enregistrement pathétique je me demandais- vous allez encore me trouver sévère mais qui aime bien châtie bien- si nous n'avions pas, au fond, la gauche la plus bête du monde...

23 octobre 2006

Chirac a-t-il acheté l'UDR?


Le documentaire de Patrick Rotman avance un récit inédit de la prise par Jacques Chirac du mouvement gaulliste en 1974. Selon le film, Chirac, alors premier ministre, aurait utilisé les fonds secrets de Matignon pour convaincre le "baron" Alexandre Sanguinetti, "couvert de dettes et menacé d'un contrôle fiscal" de s'effacer au profit de Chirac, son ennemi juré. Thèse séduisante mais que rien, absolument rien, ne vient hélas étayer. Toujours et encore ce journalisme d'insinuation qui ne rend pas service. Et dire que ce film avait été précédé d'une réputation d'irrévérence! Pour la première fois on allait faire un portrait sévère d'un Président de la République avant même qu'il n'ait quitté l'Elysée! Fausse irrévérence en vérité et degré zéro de l'enquête. Un seul exemple: Pas un mot de l'affaire Boulin, le gaulliste social que Giscard comptait envoyer dans les pattes de Chirac pour l'affaiblir, assassiné mystérieusement mais avec le concours de quelques réseaux politiques occultes. Pourtant, en octobre 2003, le journaliste Benoît Collombat, de France Inter avait réalisé et diffusé une enquête passionnante( mais que personne n'a relayée) mettant directement en cause Charles Pasqua. (vous pouvez écouter ici cette enquête)
Il y avait eu beaucoup moins de roulement de tambour à l'époque...Au lieu de faire une enquête sérieuse Rotman nous ressert les vieux poncifs sur Chirac chaleureux et sympathique, naturellement porté à gauche mais manipulé par le tandem Juillet et Garaud qui tenta d'en faire leur "cheval" pour l'Elysée...On sait la suite, Chirac est entré à l'Elysée sans ses éminences grises. Quand à ce qui était censé être le "clou" de la première partie, le soutien du RPR à Mitterrand entre les deux tours de l'élection de 1981...c'est un secret de polichinelle...Bref, rien de nouveau sous le soleil

17 octobre 2006

Un débat social-(irréal)iste

Je viens de suivre l'intégralité du débat Ségo-DSK-Fabius, sur mon ancienne chaîne. "Débat "est d'ailleurs un bien grand mot. C'était plutôt un grand O. Ce qui frappe c'est que ce débat consacré aux questions "économiques" n'était pas un débat d'économistes, mais de "socialistes", ce qui peut passer pour une vérité de La Palisse, mais est en réalité très surprenant. On dirait que personne au PS ne pense qu'une politique sociale doit s'appuyer sur l'économie. Et que personne n'a semblé vouloir rappeler qu'il faut bien d'abord produire ce que l'on souhaite redistribuer. La seule solution- surtout si l'on veut continuer à travailler moins- c'est de miser sur les secteurs à forte valeur ajoutée et ou les gains de productivité, sont importants. Dans ce cas, inutile de vouloir retenir des entreprises qui délocaliseront de toute façon et d'autant plus volontiers d'ailleurs qu'on leur sucrera leurs aides publiques. Mieux vaut privilégier les secteurs où la France dispose d'avantage concurrentiel.
Débat de socialistes caricatural car personne n'a osé briser le consensus sur un programme dépensier et absolument irréaliste.
Par dessus le marché (!), je ne comprend toujours pas comment on peut avoir en 2006 un débat économique en France sans intégrer les aspects internationaux. C'est un peu hallucinant!
J'attendais DSK plus allant et plus moderne, mais il avait peur de passer pour droitier. Au bout du compte Ségolène Royal l'emporte à mon avis haut la main grâce à sa fraîcheur, son parler concret et proche du terrain, à un courage indiscutable face à quelques vaches socialistes sacrées (les 35 heures parfois synonyme de régression sociale!), et enfin, last but not least, parce qu'elle ose dire qu'elle n'a pas réponse à tout, ce qui est à mon sens une première venant d'un homme politique français aspirant aux plus importantes fonctions. Mais c'est vrai, au fait, ce n'est pas un homme...

14 octobre 2006

Deux Nobel "musulmans"



Pamuk, Yunus, deux Nobel pour le monde "musulman", mais à chaque fois c'est l'humanité qui est récompensée. Je n'ai pas-encore- lu Pamuk, mais je sais que le choix de l'inventeur du micro-crédit est une sacrée bonne "pioche", comme on dit aujourd'hui. Mohamed Yunus, l'homme qui ne prête qu'aux pauvres et veut remiser la pauvreté dans les musées est un vrai bienfaiteur du genre humain, un génie qui a montré que les règles du capitalisme n'étaient pas mauvaises en soi à condition d'être appliquées avec un peu plus de largeur d'esprit et, oui disons-le, de générosité.
Rappelons rapidement le principe de la "Grameen Bank": Elle ne prête que des petites sommes, quelques centaines de dollars, à des démunis qui n'ont absolument aucune garantie. Non seulement ça marche, mais il fait des profits! Mieux: Sa banque affiche un taux de remboursement de plus de 98%, alors que les établissements "classiques" en sont à moins de 50% et sont obligés de faire payer ce risque à ceux qui remboursent! Enfin, la quasi totalité des clients de Grameen sont des femmes, ce qui a contribué à améliorer leur statut dans la société bengalaise. Younous a essaimé en Afrique (au Mali notamment) et il a fait des émules chez nous avec Maria Nowak ou Jacques Attali. Pourtant cette formule sert bien peu à nos "pauvres", nos "exclus" et autres précaires. Est-ce parce que les bénéfices de l'assistance sont devenus plus attrayants que l'activité? Voilà encore une question tabou en France. La poser c'est se faire beaucoup d'ennemis.

09 octobre 2006

Retour aux réalités

L'information la plus importante du week end?
L'assassinat, à Moscou de la journaliste Anna Politkoskaïa. Elle dénonçait inlassablement la politique de Poutine en Tchétchénie, et les crimes de son homme lige Kadirov. C'est elle qui avait déjà accusé le Kremlin d'avoir tenté de l'empoisonner au moment ou elle couvrait la prise d'otage de Beslan.
L'absence de réaction officielle russe témoigne que Poutine ne songe même pas à masquer son sentiment. S'il n'a pas organisé, il couvre.
Certes, on ne fait pas de bonne politique avec de bons sentiments, mais il serait temps que l'Europe, et la France singulièrement puisqu'elle raffole de ces "alliances de revers" anachroniques avec la Russie, se rende compte qu'un rappel à l'ordre sérieux s'impose. On ne peut guère envisager d'aller très au delà face à un membre permanent du conseil de sécurité, mais qu'on songe simplement aux commentaires lourds de sous-entendus qu'avaient suivi la poignée de main Bush-Sarkozy, Quand personne ne s'émeut d'un sommet Chirac-Merkel-Poutine. A moins qu'on ne considère qu'une faille de civilisation nous sépare de la Russie.
Demain, il faudra répondre à la Corée du Nord, qui vient de procéder à un essai, et à l'Iran qui décourage toute entreprise diplomatique au sujet de son programme nucléaire. On verra quel genre d'alliée est la Russie.
Un beau sujet de dissertation: A l'heure de la mondialisation, une politique étrangère d'un grand pays peut-elle prendre en compte le respect des droits de l'homme?

A Londres, L'ancien ministre de l'intérieur Jack Straw est traité de raciste parce qu'il a exprimé haut et fort ce que de plus en plus d'anglais pensent tout bas: Le port du voile dans les sociétés démocratiques occidentales n'est pas qu'un droit vestimentaire. Il érige une barrière entre la femme musulmane et le reste de la société. Ce n'est pas un signe religieux mais un signe d'oppression culturelle de la femme. Le modèle multi-culturaliste britannique tremble sur ses bases depuis les attentats de Londres perpétrés par des jeunes anglais musulmans. Pour ces raisons, je pense, comme Henry Porter dans l'Observer, que
Straw devrait être remercié et non isolé comme commencent à le faire ses amis politiques.
Ne pas affronter ces réalités c'est accepter la montée inexorable des partis xénophobes, comme le montre le résultats des élections en Flandre.

30 septembre 2006

Sur l'affaire Redeker, et au delà

Mon premier réflexe, c'est la solidarité avec Robert Redeker. Elle doit être totale, inconditionnelle, active et même prosélyte. Le plus important est de résister à cette peur sourde qu'inspire à certains les fatwas de quelques fous. Ne pas oublier non plus que ces fous, pour ultra minoritaires qu'ils soient, n'en sont pas moins ultra dangereux. Comprendre aussi qu'il bénéficient d'une certaine mansuétude, hélas, du simple fait du silence de trop de musulmans qui se sentent insultés par les propos critiques contre leur prophète.
C'est qu'il y a un point sur lequel Redeker a particulièrement de mérite dans sa "provocation": Elle interpelle les fidèles musulmans sur la violence intrinsèque du Coran, originelle de l'Islam. Un passage de son texte me semble devoir être particulièrement souligné:

De fait, l'Église catholique n'est pas exempte de reproches. Son histoire est jonchée de pages noires, sur lesquelles elle a fait repentance. L'Inquisition, la chasse aux sorcières, l'exécution des philosophes Bruno et Vanini, ces mal-pensants épicuriens, celle, en plein XVIIIe siècle, du chevalier de La Barre pour impiété, ne plaident pas en sa faveur. Mais ce qui différencie le christianisme de l'islam apparaît : il est toujours possible de retourner les valeurs évangéliques, la douce personne de Jésus contre les dérives de l'Église.

Aucune des fautes de l'Église ne plonge ses racines dans l'Évangile. Jésus est non-violent. Le retour à Jésus est un recours contre les excès de l'institution ecclésiale. Le recours à Mahomet, au contraire, renforce la haine et la violence. Jésus est un maître d'amour, Mahomet un maître de haine.

Mais il faudra ici faire l'effort de me lire jusqu'au bout: Je pense que dire que: "l'islam est une religion qui, dans son texte sacré même, autant que dans certains de ses rites banals, exalte violence et haine.", c'est infliger une blessure inutile à des millions de musulmans qui vivent, heureusement, leur foi en interprétant le Coran, et en ignorant tout ce qu'il peut avoir de violent. Bien sûr, Redeker veut montrer qu'il n'est pas toujours facile de distinguer Islam et Islamisme, en raison même de la violence du texte sacré, de l'absence de séparation entre temporel et intemporel en Islam. Mais il faut aller au delà de cette constatation.
Ainsi, au risque de surprendre, je ne suis pas en désaccord avec ce que dit Tarik Ramadan dans Libération du jour. En particulier le fait que: "le contexte global de lutte contre le terrorisme (...) a amplifié, dans le monde musulman, l'impression qu'à travers les radicaux on s'en prenait à l'islam. (...) c'est une impression vécue quotidiennement et qui a fini par s'inscrire dans le réel "
Ramadan a singulièrement mis de l'eau-j'allais dire dans son vin qu'il me pardonne cette métaphore judeo-chrétienne- ces derniers temps. Qu'il s'agisse où non d'une tactique, je n'en ai cure et trouve cela particulièrement réjouissant, compte tenu de son influence dans la jeunesse musulmane en occident. Je retiens particulièrement cette évolution majeure: Ramadan estime qu'il faut prendre le terme islamophobie "avec des pincettes". Quelle victoire sémantique nous avons remporté là! Le mot "Islamophobie" est en effet extrêmement ambigu en ce sens qu'il a été créé pour interdire la critique de l'Islam et à faire taire, ou pire à intimider des gens comme Redeker. Il n'y a guère plus que le MRAP pour l'employer. Le MRAP, seule association soit-disant laïque qui-soit dit en passant- ait refusé de soutenir le professeur de Toulouse en le qualifiant même d'incendiaire.
Je crois donc avoir trouvé avec Ramadan un terrain d'accord inespéré: Le débat nécessaire sur l'Islam en occident peut encourager, chez certains, des réflexes racistes, anti-arabe ou anti-musulman. Il faut être extrêmement vigilant là-dessus. Intraitable même. De le même façon que j'ai dit et écrit qu'une critique du sionisme lorsqu'elle devient radicale, sytématique ou hystérique se confond avec l'antisémitisme, je dirais la même chose pour la critique de l'Islam. Il y a un moment où elle devient raciste ou, pour le moins où elle encourage la haine de l'autre.
Nous voici donc devant deux nécessités tout aussi importantes l'une que l'autre: refuser les diktats, les intimidations, l'autocensure (voir la lamentable affaire Idoménée à Berlin) que veut nous imposer l'Islam radical, ou plus exactement (Olivier Roy a raison sur ce point) des radicaux au nom d'une lecture littérale du Coran; et en même temps, la pente de la discrimination religieuse qui compromet notre vie commune dans une société, non pas multiculturelle, mais métissée et pluraliste.
IIl y a un autre point qui me préoccupe. C'est la timidité, la retenue de beaucoup trop de journalistes français à aborder le débat sur l'Islam. Est-ce déjà la peur qui les aurait vaincus? Ou bien l'effet de cette "sécularisation du christianisme" dont parle Redeker et qui fait que l'on préfère être faible que passer pour intolérant? Evidément, il y a la une de Libération aujourd'hui. Je la trouve un peu tardive, et l'éditorial encore un tantinet bien pensant. Les journaux gratuits qui ont moins peur de dénoter ont réagi plus rapidement. La presse anglo-saxone me paraît moins éffarouchée. Je partage l'interrogation d'Ivan Riouffol , en particulier ceci:
"Les médias sont-ils prêts à dire toutes les vérités qui dérangent ? Eux aussi se seront prêtés à l'occultation de réalités. La presse bien pensante aura attendu 2000 pour reconnaître la violence installée depuis des années dans les cités et les écoles. Elle aura longtemps sous-évalué l'antisémitisme dans les banlieues. Elle aura laissé à la commission Stasi le soin de révéler la fracture du communautarisme et au rapport Obin celui de dévoiler l'intégrisme à l'école, tandis qu'il est revenu à Philippe de Villiers d'aligner les preuves de l'emprise islamiste à Roissy. La profession sait-elle être encore curieuse ? "
Pour en revenir à cette montée du racisme contre les musulmans, même "modérés", il n'est pas faux de dire, comme Riouffol que "Le mépris dont ils se plaignent est dû, en partie, à cette indifférence des bons apôtres (mediatiques)."